Amendement N° CD3 (Adopté)

Adaptation des territoires littoraux au changement climatique

Déposé le 23 janvier 2017 par : Mme Got, Mme Berthelot.

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Rédiger ainsi cet article :

«  I. – À la demande de l'État, le fonds mentionné à l'article L. 561‑3 du code de l'environnement, par dérogation aux conditions posées à l'article L. 561‑1 du même code, finance les indemnités au profit du propriétaire d'un bien immeuble lorsque ce bien a fait l'objet d'une interdiction d'habiter ou d'occuper les lieux, prononcée par la puissance publique avant le 1er janvier 2017 en raison de la réalisation d'un recul du trait de côte. Ces indemnités sont calculées sans prendre en compte le risque de recul du trait de côte et leur montant maximum est fixé à 75 % de la valeur estimée de chaque bien.
«  II. – Les dispositions du I  sont applicables aux procédures en cours à la date de promulgation de la présente loi, en tant qu'elles portent sur l'indemnisation prévue par l'article L. 561-3 du code de l'environnement et dès lors qu'elles ne sont pas revêtues de l'autorité de la chose jugée. »

Exposé sommaire :

Les propriétaires de l'immeuble le Signal à Soulac-sur-Mer, frappé d'arrêtés de péril imminent, ne peuvent actuellement être indemnisés par le fonds « Barnier », parce que les circonstances qui ont conduit à l'évacuation de l'immeuble n'entrent pas dans les prévisions de l'article L. 561-1 du code de l'environnement, qui fixe de manière limitative les conditions d'une indemnisation en cas de« risque menaçant gravement des vies humaines ». En effet, au titre de ces conditions générales ne figure pas le cas d'un recul avéré du trait de côte, mais en revanche, est exigée une expropriation par l'État, dont les indemnités doivent être moins coûteuses que la mise en place de digues. Le mécanisme nouveau de prise en compte des mouvements dunaires , prévu par l'article 13 , qui n'a pas de portée rétroactive et qui applique ces mêmes conditions ne permet donc pas d'envisager la nécessaire indemnisation de propriétaires, pourtant frappés par une interdiction définitive d'occuper les lieux. Si le Sénat s'est accordé sur le principe d'un dispositif spécifique, et sur le plafonnement à 75 % maximum de la valeur des biens, il n'a pas précisé que l'indemnisation doit résulter d'une acquisition amiable dérogeant aux conditions habituelles posées par le code de l'environnement.

Le dispositif de l'amendement vaut également pour tous les cas dans lesquels l'interdiction d'occupation a été prononcée antérieurement au 1 er janvier 2017, mais il ne couvre en revanche pas les situations à venir provoquées par un recul du trait de côte, même si celui-ci, à terme doit conduire à des interdictions d'occuper les lieux. L'indemnisation ne met en aucun cas en jeu la responsabilité des collectivités locales.

Dans la mesure où le Conseil d'État est saisi, sur la base du texte législatif actuel, du cas du Signal, il est en outre nécessaire de prévoir que le dispositif revêt une portée rétroactive, pour permettre au juge de constater que les conditions d'une indemnisation sont possibles. A défaut, le risque est fort que le principe selon lequel« la loi nouvelle ne s'applique pas, sauf rétroactivité expressément décidée par le législateur, aux actes juridiques conclus antérieurement à son entrée en vigueur » (1re Civ., 9 décembre 2009, pourvoi no 08-20.570, 12 juin 2013, pourvoi no 12-15.688) ne conduise à une décision négative, qui irait à l'encontre du but recherché d'une indemnisation négociée. La portée rétroactive d'une telle indemnisation doit donc être affirmée dans le texte. L'article 23 de la loi no 2001-2 du 3 janvier 2001 relative à la résorption de l'emploi précaire et à la modernisation du recrutement dans la fonction publique ainsi qu'au temps de travail dans la fonction publique territoriale, l'article 47 de la loi du 5 juillet 1985 relative à l'indemnisation des accidents de la circulation, l'article 31 de la loi de finances rectificative pour 2011, dû à une initiative du Sénat, que le Conseil constitutionnel vient d'ailleurs de déclarer contraire à la Constitution, par la décision n° 2016-604 DC du 17 janvier 2017 , pour un motif autre que celui du caractère interprétatif de ce dispositif, revêtent par exemple un caractère interprétatif et modifient ainsi l'appréciation par le juge de situations en cours. Par l' arrêt Zielinski du 28 octobre 1999, la CEDH a jugé que:« si, en principe, le pouvoir législatif n'est pas empêché de réglementer en matière civile, par de nouvelles dispositions à portée rétroactive, des droits découlant de lois en vigueur, le principe de la prééminence du droit et la notion de procès équitable consacrés par l'article 6 s'opposent, sauf pour d'impérieux motifs d'intérêt général, à l'ingérence du pouvoir législatif dans l'administration de la justice dans le but d'influer sur le dénouement judiciaire d'un litige » (§ 57). En l'espèce, un tel motif existe bien : il ne s'agit évidemment pas ici de porter atteinte au droit au recours, mais au contraire de garantir l'effectivité du droit à indemnisation tel qu'il résulte de l'article XVII de la Déclaration des droits de l'homme, mais ce droit est actuellement bloqué par l'application du dispositif actuel de l'article L. 561-1 du code de l'environnement, dont il convient donc d'écarter, de manière exceptionnellement rétroactive , l'application pour les cas constatés avant le 1 er janvier 2017.

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