Amendement N° 617 rectifié (Adopté)

Projet de loi de finances rectificative pour 2016

Déposé le 6 décembre 2016 par : le Gouvernement.

I. – Le II de l'article L. 221‑31 du code monétaire et financier est complété par un 4° ainsi rédigé :

«  4° Les sommes versées sur le plan d'épargne en actions ne peuvent être employées à l'acquisition de titres détenus hors de ce plan par le titulaire du plan, son conjoint, son partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou leurs ascendants ou descendants. »

II. – Le I s'applique aux acquisitions effectuées à compter du 6 décembre 2016.

Exposé sommaire :

Le PEA constitue un outil de gestion de portefeuilles de titres visant à encourager, via une incitation fiscale, les ménages à constituer une épargne longue orientée vers le financement de l'économie et le renforcement en fonds propres des entreprises.

Pour atteindre cet objectif, l'avantage fiscal associé à ce plan est constitué par une exonération d'impôt sur le revenu des produits (sauf cas de plafonnement) et plus-values réalisées pendant toute la durée de fonctionnement du plan, cette exonération n'étant définitivement acquise qu'à compter du sixième anniversaire de l'ouverture du plan. En revanche, les prélèvements sociaux restent dus. Par ailleurs, dans les premières années du plan, les gains générés sur un PEA sont également soumis à une fiscalité dérogatoire (imposition à taux forfaitaire).

Si son fonctionnement est régi par les dispositions du code monétaire et financier (CoMoFi), auxquelles renvoie l'article 163quinquies D du code général des impôts, le PEA est un produit d'épargne qui se définit par les avantages fiscaux qui lui sont associés.

Ainsi, afin d'atteindre efficacement l'objectif recherché, ce plan est soumis à de strictes conditions de fonctionnement consubstantielles aux importants avantages fiscaux qui lui sont associés. S'agissant d'un produit d'épargne bénéficiant d'une fiscalité extrêmement favorable (exonération totale à l'impôt sur le revenu), ses règles de fonctionnement sont régulièrement ajustées afin de mettre fin aux montages les plus agressifs constatés à l'occasion de contrôles fiscaux ou de contentieux. Le présent amendement s'inscrit dans cette logique.

En effet, aujourd'hui, il n'est pas permis de transférer des titres d'un compte-titres ordinaire vers le PEA, les versements ne pouvant être effectués qu'en numéraire.

Dès l'origine, cette obligation de versement en numéraire sur le PEA avait pour finalité de drainer l'épargne des ménages vers l'investissement mobilier par l'apport de capitaux nouveaux dans le financement de l'économie.

Or, la décision du Conseil d'État n° 374211 en date du 14 octobre 2015 soulève des difficultés qu'il convient de clarifier par la loi. En effet, le Conseil d'État a jugé dans le cadre d'un contentieux fiscal, que la loi, dans sa rédaction actuelle, permet au titulaire d'un PEA d'employer les sommes figurant dans le plan à l'acquisition de titres qu'il détient dans son patrimoine en dehors de ce plan.

En l'état des textes, la « vente à soi-même » de titres ne constitue pas une cession à titre onéreux au sens de l'article 150‑0 A du CGI. Aussi, le transfert de titres déjà détenus vers un PEA ne constitue pas en lui-même un fait générateur d'imposition de la plus-value.

Aussi, permettre, ainsi que le prévoit la décision précitée, l'emploi des sommes figurant dans le plan à l'acquisition de titres détenus par le titulaire du PEA en dehors de son plan risquerait de favoriser les comportements d'optimisation, voire d'abus.

Tout d'abord, les exonérations liées à la détention d'un PEA seraient acquises par pur effet d'aubaine, sans que le contribuable n'ait injecté des fonds nouveaux dans l'économie.

De même, admettre ainsi la « vente à soi-même » de titres conduirait immanquablement à des sous-estimations de la valeur des titres transférés aux fins de contourner le montant du plafond d'investissement fixé à 150 000 € au jour du transfert dans le PEA. Ce type de contournement aboutirait dès lors à y « loger » tout ou partie de la plus-value d'ores et déjà réalisée et exonèrerait un gain qui aurait dû être soumis à l'impôt sur le revenu dans les conditions de droit commun.

Enfin, un tel dispositif pourrait conduire certains investisseurs à cumuler illégitimement les avantages fiscaux. Ils pourraient ainsi souscrire au capital d'une PME et bénéficier à ce titre de la réduction d'impôt dite « Madelin », puis ultérieurement transférer, sans imposition de la plus-value, les actions ainsi souscrites dans un PEA. Ils bénéficieraient ainsi d'avantages fiscaux à la souscription des titres, pendant leur détention, puis au moment de leur cession.

Le présent amendement vise ainsi à clarifier cette situation et interdire l'inscription dans le PEA (et le PEA-PME) de titres que le contribuable possède en dehors du plan. De même, afin d'éviter tout abus reposant sur l'interposition artificielle d'un tiers, la mesure vise également les titres détenus par le cercle familial du titulaire du plan.

Cette mesure, qui s'appliquera à compter de la date de dépôt du présent amendement afin d'éviter les effets d'aubaine, permettra de recentrer le bénéfice des exonérations fiscales aux investisseurs qui prennent des risques en affectant leur épargne au financement de l'économie.

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