Intervention de Charles de Courson

Séance en hémicycle du 28 septembre 2016 à 15h00
Transparence lutte contre la corruption et modernisation de la vie économique - protection des lanceurs d'alerte — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCharles de Courson :

Je me félicite par ailleurs du rétablissement des élus locaux dans le champ d’action des représentants d’intérêts, eu égard au souci d’égalité entre élus locaux et nationaux. Notre groupe souhaite néanmoins qu’une réflexion soit engagée pour établir l’interdiction, pour les collaborateurs parlementaires, d’être rémunérés par des représentants d’intérêts puisque cette situation, hélas, existe.

Concernant les mesures liées à l’agriculture, nous avons regretté l’absence d’ambition du Gouvernement, ainsi que le reniement de la promesse du ministre de l’agriculture de refonder la loi LME de 2008. Chacun sait ce que notre groupe a dit à l’époque à propos de ce texte. Certaines dispositions vont cependant dans le bon sens. Ainsi, nous avons soutenu l’interdiction de la cession à titre onéreux des contrats de vente de lait de vache, proposition formulée d’ailleurs dans le rapport sur l’élevage français de nos collègues Thierry Benoit et Annick Le Loch. En effet, la fin des quotas laitiers a conduit à la mise en place de pratiques anormales de marchandisation des contrats de lait entre producteurs et acheteurs. Il était absolument nécessaire d’y mettre un terme. Nous regrettons toutefois que le rapporteur n’ait pas suivi notre proposition, qui aurait permis aux organisations professionnelles – les OP – et aux associations d’organisations professionnelles – les AOP – d’être responsables de la distribution des contrats laitiers en fonction de la demande des producteurs.

Nous saluons les dispositions de l’article 31, qui permettent, dans un indispensable souci de transparence, de sanctionner les entreprises agro-alimentaires qui ne déposeraient pas leurs comptes annuels. Cette petite mesure ne va certes pas bien loin, d’autant qu’elle devrait bien entendu englober la grande distribution, laquelle n’est pas toujours irréprochable sur ce point. En outre, nous avons déposé de nombreux amendements afin de rendre les négociations commerciales plus équitables et transparentes entre les parties. Plusieurs avancées ont ainsi pu être obtenues concernant la mise en place d’une première phase de négociations entre producteurs et industriels précédant l’envoi des conditions générales de vente aux distributeurs, le renforcement des missions de l’Observatoire des prix et des marges – dont on aimerait qu’il soit un peu plus percutant dans ses analyses –, l’inscription de références aux indicateurs publics de coûts de production en agriculture dans les accords-cadres et l’étiquetage de l’origine des viandes et du lait et des produits agricoles et alimentaires qui en sont constitués.

Toutefois, nous regrettons que le Gouvernement ne nous ait pas entendus sur plusieurs sujets : la mention du nom des négociateurs dans les contrats passés entre OP ou AOP et les industriels, la renégociation automatique des contrats entre fournisseurs et distributeurs en fonction des indicateurs établis par l’Observatoire des prix et des marges, l’interdiction du logo « Transformé en France » – logo destiné à tromper le consommateur, puisqu’il suffit de procéder à une petite transformation pour pouvoir l’apposer même si le produit est étranger, il faudrait au moins de la transparence en ce domaine – et la possibilité pour l’Autorité de la concurrence de fixer un pourcentage maximum de parts de marché applicable aux groupements d’achats afin de mettre fin à la cartellisation croissante de la grande distribution, problème central auquel, monsieur le ministre, aucun gouvernement ne s’est attaqué, hélas, depuis plus de trente ans. Je note qu’aujourd’hui, l’effort de contractualisation se heurte à ce problème, car cet oligopole à quatre se mène une guerre des prix qui les affaiblit eux-mêmes. Tout le monde trouve normal dans ce pays, en tout cas les gouvernements successifs de tous bords, que la plus grande centrale d’achats dépasse les 30 % du marché. Une telle situation n’interroge ni les différents ministres de l’agriculture, ni ceux chargés de la concurrence. On aurait pu espérer, monsieur le ministre, que vous mettiez tout de même en place, vous qui êtes en charge de la concurrence, une politique de la concurrence concernant la grande distribution. Il n’y en a plus ! On laisse se concentrer les groupements d’achats, qui imposent ainsi leurs prix et qui maintenant se battent entre eux pour les faire baisser, essayant d’en répercuter les conséquences non seulement sur les producteurs mais aussi, en amont, sur l’agroalimentaire. C’était pourtant un des fleurons de l’industrie française, et c’est, hélas, de moins en moins le cas.

Concernant l’artisanat, les députés du groupe UDI se félicitent d’être parvenus à contribuer à infléchir le projet de loi initial, qui portait atteinte aux artisans. Ainsi, le stage de préparation à l’installation devra être effectué dans un délai de soixante jours après la demande d’immatriculation, alors que le Gouvernement souhaitait initialement supprimer cette obligation.

S’agissant des qualifications, le texte a également évolué favorablement, permettant que les organisations professionnelles soient davantage prises en compte. Nous restons néanmoins vigilants quant à l’avenir de certaines professions, comme celle des ramoneurs, qui pourraient être dévalorisées.

Je dirai également un mot de l’article 47, puisque ce débat est d’importance : il faudra en effet aller plus loin sur ce sujet, afin d’introduire en droit français un dispositif juridique qui protège réellement les actionnaires minoritaires des sociétés non cotées face aux actionnaires majoritaires. C’est un problème très sérieux mais, hélas, on n’a rien fait sur le sujet depuis 1961… Je vous rappelle, monsieur le ministre, que les Allemands ont légiféré sur cette affaire dans une loi de 1965. On a un retard considérable. Il serait intéressant de savoir où vous en êtes de votre réflexion sur cette question.

Enfin, nous considérons qu’il est essentiel de protéger les épargnants détenteurs d’un contrat d’assurance-vie en prévoyant l’exclusion du champ du blocage des contrats d’assurance-vie en cas de graves difficultés des compagnies d’assurance dans les conditions prévues pour le déblocage de la participation et de l’intéressement. Il ne faudrait pas déstabiliser ces épargnants.

Mes chers collègues, je conclurai en disant que si le groupe UDI déplore l’absence de vision politique et d’ambition, conformément à ce que nous avions annoncé lors de la première lecture, nous ne nous opposerons pas aux mesures intéressantes, quoique souvent insuffisantes, que ce texte contient. Toutefois, nous aurions espéré que le Gouvernement se montre plus ouvert à nos propositions. C’est pourquoi le groupe UDI, en l’état du texte, s’abstiendra.

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