Intervention de Alain Ballay

Séance en hémicycle du 29 septembre 2016 à 9h30
Agence nationale de santé publique — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain Ballay, rapporteur de la commission des affaires sociales :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le projet de loi que nous examinons vise à ratifier l’ordonnance no 2016-462 du 14 avril 2016 portant création de l’Agence nationale de santé publique.

Cette agence, mieux connue sous le nom de Santé publique France, notre Assemblée l’avait appelée de ses voeux en habilitant le Gouvernement, à l’article 166 de la loi de modernisation de notre système de santé, à fusionner trois agences compétentes en matière de prévention, de veille et d’intervention sanitaire : l’Institut de veille sanitaire, l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé, et l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires.

La nécessité d’une telle réforme était en effet reconnue par tous. L’existence d’un trop grand nombre d’acteurs en matière de prévention et de veille sanitaire en France était incontestablement responsable d’un manque de cohérence et de lisibilité. De plus, contrairement aux pays anglo-saxons, la France ne disposait pas d’une agence à forte visibilité internationale en matière de santé publique.

Avant de vous présenter le contenu de l’ordonnance du 14 avril 2016, il me semble important de rappeler en quelques mots l’historique de la création de Santé publique France, dont l’existence est effective depuis le mois de mai dernier.

Comme je l’ai indiqué, la création de l’agence fait suite au constat, partagé par tous, du manque de lisibilité du système d’agences sanitaires français, qui s’explique par le fait que ces établissements ont été créées, pour la plupart, en réaction à des crises, donc sans cohérence d’ensemble.

Compte tenu des enjeux, notamment humains, de la fusion de l’InVS, de l’INPES et de l’EPRUS, la création de l’Agence nationale de santé publique a été préparée très en amont. Le Gouvernement a en effet confié à M. François Bourdillon, actuel directeur général de l’agence, alors directeur général de l’InVS, un vaste travail de concertation visant à définir les modalités d’organisation de l’agence et à identifier ses principales missions ainsi que ses premiers axes de travail.

Ce travail s’est traduit par la remise, en juin 2015, d’un rapport de préfiguration, qui fixait les grandes orientations de l’agence et proposait un ensemble de recommandations, relatives notamment à sa gouvernance et à ses modalités de fonctionnement.

En toute logique, l’ordonnance du 14 avril 2016 est fidèle aux préconisations de ce rapport et surtout conforme à l’habilitation contenue à l’article 166 de la loi de modernisation de notre système de santé. Je vais vous en donner quelques illustrations.

En premier lieu, l’ordonnance respecte le souhait d’une création à droit constant. L’agence reprend ainsi l’ensemble des missions anciennement dévolues à l’InVS, à l’INPES et à l’EPRUS, c’est-à-dire la prévention, la mise en oeuvre des politiques de prévention et d’éducation pour la santé dans le cadre des orientations de la politique de santé fixées par le Gouvernement, la surveillance et l’observation permanentes de l’état de santé de la population, la veille, la vigilance et la gestion des crises sanitaires, ainsi que l’administration de la réserve sanitaire et des stocks stratégiques. Cette agence sera ainsi un centre de référence et d’excellence scientifique, garant de l’intérêt général et de l’équité envers les populations.

La prévention est l’une des compétences les plus visibles de l’action de l’agence, puisque des campagnes de prévention sont régulièrement organisées, comme la campagne « moi(s) sans tabac », qui se déroulera en novembre prochain.

Certaines missions de l’agence, moins connues, sont tout aussi indispensables. C’est le cas par exemple de la réserve sanitaire, mobilisée sur des terrains très variés : au cours des six derniers mois, des réservistes ont notamment été envoyés dans les maternités de Guyane et de Martinique pour prévenir les risques liés au virus Zika ; d’autres ont été envoyés en urgence à Nice pour apporter une assistance psychologique aux victimes de l’attentat du 14 juillet et à leurs proches.

Que le regroupement des missions au sein d’une agence unique se soit fait à droit constant ne signifie pas que les compétences respectives des trois anciennes agences aient été simplement juxtaposées. Au contraire, la création de l’agence s’inscrit véritablement dans la continuité des missions des trois établissements fusionnés. Surtout, elle aura la capacité de développer des axes de travail plus transversaux et de développer des synergies pour améliorer la cohérence et l’efficacité des actions en matière sanitaire, donc, in fine, optimiser le service offert aux populations.

En second lieu, le rapport de préfiguration de M. Bourdillon avait particulièrement insisté sur la nécessité d’ancrer l’action de l’agence au niveau régional, ainsi qu’en outre-mer. Le message est passé puisque l’ordonnance précise que l’agence peut s’appuyer sur un réseau national de santé publique, qu’elle organise et anime, et, surtout, qu’elle dispose de seize cellules d’intervention en région. Ces cellules, déjà opérationnelles, permettront véritablement de décliner à l’échelle régionale les actions de prévention et de veille sanitaire de l’agence.

En ce qui concerne les ressources et les effectifs de l’agence, l’ordonnance a repris les dispositions anciennement applicables aux trois établissements fusionnés. Les ressources de l’agence sont ainsi essentiellement composées de subventions de l’État et, pour les activités de prévention, d’une dotation des régimes obligatoires d’assurance maladie. Par ailleurs, 625 agents, provenant des différents établissements fusionnés, travaillent au sein de l’agence en 2016.

S’agissant des modalités de gouvernance de l’agence, l’ordonnance a également suivi les préconisations du rapport Bourdillon. La gouvernance de l’agence s’articule ainsi autour de quatre instances, sur le point d’être constituées : le conseil d’administration, le conseil scientifique, qui aura notamment pour mission de développer les activités de recherche de l’agence, le comité d’éthique et de déontologie, garant de l’indépendance de l’agence et de ses recommandations, et le comité d’orientation et de dialogue, qui a vocation à marquer l’ouverture de l’agence sur la société civile.

Certains d’entre nous ont pu regretter qu’aucun parlementaire ne soit représenté au sein du conseil d’administration, alors que des élus locaux l’étaient. Compte tenu de l’importance des missions de l’Agence nationale de santé publique, du fait du regroupement en son sein de l’ensemble des compétences en matière de prévention, de veille et d’intervention sanitaire, il nous a semblé utile de modifier la composition du conseil d’administration ; j’ai déposé, à l’instar de mon collègue Gérard Bapt, un amendement en ce sens.

À l’exception de cette proposition d’amendement, que nous examinerons tout à l’heure, l’ordonnance n’appelle pas de modification majeure ; le projet de loi a d’ailleurs été adopté sans modification, la semaine dernière, par notre commission des affaires sociales.

Avant de conclure, il me tenait à coeur de vous faire part des priorités de l’agence pour les prochains mois, telles qu’elles m’ont été présentées par son directeur général.

Il s’agit d’abord de la prévention, qui se focalise à la fois sur les déterminants, comme le tabac, l’alcool ou le suicide, et la population, en ciblant particulièrement la petite enfance et la jeunesse, mais aussi les personnes âgées, pour accompagner la perte d’autonomie, lutter contre l’isolement et prévenir les chutes.

Il s’agit ensuite de la mobilisation de la réserve sanitaire, que j’ai évoquée tout à l’heure et sur laquelle je ne reviendrai pas.

Il s’agit enfin de la surveillance, notamment pour tout ce qui concerne les maladies transmissibles ou d’autres pathologies comme le diabète, les maladies pulmonaires ou la maladie d’Alzheimer.

L’agence s’intéresse aussi à l’articulation entre la santé et le travail ainsi qu’entre la santé et l’environnement. Elle compte se pencher sur les questions de la pollution des sols, de la pollution atmosphérique ou encore de l’émergence des troubles musculo-squelettiques, les TMS, et du burn-out, sujet également étudié par la commission des affaires sociales.

En conclusion, je veux souligner à quel point la création de Santé publique France est bienvenue : que ce soit en matière de prévention, de veille sanitaire ou encore d’intervention sanitaire d’urgence, la France est désormais dotée, comme la plupart des pays industrialisés, d’une structure solide de santé publique, ayant vocation à connaître, expliquer, préserver, protéger et promouvoir l’état de santé des populations, et capable d’intervenir rapidement en cas de crise sanitaire.

Pour préserver cet outil, notamment ses ressources, il nous reviendra de veiller à ce que l’agence dispose, pour les années à venir, de moyens suffisants pour accomplir au mieux ses missions.

Mes chers collègues, je vous invite, à la suite de la commission des affaires sociales, à adopter ce projet de loi de ratification.

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