Intervention de Sonia Lagarde

Séance en hémicycle du 29 septembre 2016 à 9h30
Agence nationale de santé publique — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSonia Lagarde :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, permettez-moi tout d’abord de saluer à mon tour le consensus qui règne ce matin sur ce sujet important de santé publique.

Il n’est nul besoin de rappeler que le climat était bien plus tendu dans l’hémicycle lors des débats sur la loi santé. Les députés du groupe de l’Union des démocrates et indépendants comme ceux du groupe Les Républicains s’étaient largement mobilisés contre ce texte : nous avons dénoncé à de multiples reprises les insuffisances d’une loi construite sans réelle concertation avec les professionnels de santé.

Près de neuf mois après sa promulgation, nous restons convaincus qu’une telle réforme aurait dû être pensée avec et pour les femmes et les hommes qui sont au coeur du système de santé, les patients d’une part, les professionnels de santé d’autre part. Nous estimons également que cette loi aurait dû permettre de structurer véritablement notre système de santé et d’installer un service hospitalier public fort et un secteur privé performant, travaillant ensemble à une meilleure prise en charge du patient, sans que la nature des structures soit discriminante.

Néanmoins, malgré notre opposition globale à la loi de modernisation de notre système de santé, plusieurs propositions nous semblaient bienvenues, parmi lesquels l’article 166 portant création de l’Agence nationale de santé publique. Pour une fois, un établissement n’était pas créé en réaction à une crise sanitaire mais était bien imaginé et construit dans une démarche d’ensemble. À cette occasion, je tiens à saluer, au nom des députés du groupe UDI, la qualité du travail du docteur François Bourdillon, directeur général de cette nouvelle agence, bâtisseur de ce beau projet.

Il n’est jamais évident de fusionner différentes structures au sein d’une même entité, chacune ayant son histoire et son organisation propre. Aussi, même si la capacité d’anticipation et de réactivité de nos agences sanitaires est déjà d’une grande qualité, il faudra être attentif, dans les tout premiers mois, et veiller à ce que la nouvelle agence ne fonctionne pas en silo, sur le modèle des trois agences, mais bien dans un schéma global cohérent.

Le rassemblement de l’Institut de veille sanitaire, de l’Institut de prévention et d’éducation pour la santé et de l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires, de leurs compétences et de leurs savoir-faire, devrait donner naissance à un établissement dont l’action aura plus de poids, plus d’efficacité et plus d’impact, notamment grâce à de véritables synergies et à des économies d’échelle.

En matière d’optimisation de la gestion publique, la mutualisation de certaines fonctions support est un véritable enjeu et la question des moyens de l’agence s’est posée lors des travaux en commission. Pour cette année, le budget s’élève à 220 millions d’euros, soit à peu près l’équivalent du budget des trois agences réunies. Lors de l’installation de l’Agence nationale de santé publique, en mai dernier, la ministre s’est montrée rassurante pour les années à venir mais on ne peut oublier que le budget des différentes institutions est en diminution depuis plusieurs années. Alors que nous consacrons aujourd’hui l’existence de cette nouvelle agence, nous aimerions avoir des gages sur le sort qui lui sera réservé lors des prochaines lois de finances.

La question des moyens est primordiale, compte tenu du rôle que la future agence sera amenée à jouer dans les prochaines années. En effet, l’installation de Santé publique France devrait permettre d’assurer une continuité de la réponse des pouvoirs publics face aux enjeux toujours plus complexes liés à la santé et garantir une plus grande visibilité nationale et internationale des opérateurs sanitaires de l’État.

Nous tous ici espérons que la fusion positionnera la France de manière conforme aux besoins et organisations identifiées au niveau international, à l’image des Centers for Disease Control and Prevention, de l’institut de santé publique britannique ou de celui du Québec.

Je profite de ce débat pour appeler votre attention sur la situation particulière de l’EPRUS dans cette nouvelle structure. En effet, ses missions devront faire l’objet d’un suivi particulier au regard de leur spécificité et des conditions particulières de sécurité et de confidentialité. Face au risque d’attaque bioterroriste, la gestion des stocks stratégiques, aujourd’hui assuré par l’EPRUS, devra être prise en charge par la nouvelle agence, afin de garantir que l’on pourra toujours fabriquer un vaccin adéquat dans de brefs délais.

Sur un autre aspect de cette ordonnance, les députés du groupe UDI sont satisfaits que le texte évoque l’enjeu de la probité, avec la création d’un comité d’éthique et de déontologie, je tiens à le souligner. La sécurité de la population et la confiance dans les institutions sont deux sujets corollaires, et nous tenons à ce que la nouvelle agence soit à l’abri de tout scandale sanitaire. En ce qui concerne les modalités d’application de ces règles déontologiques, nous devrons tous tirer les conséquences de l’affaire du Mediator en mettant en place différents systèmes d’organisation, de contrôle et de déontologie dans nos agences.

Avant de conclure, permettez-moi de formuler quelques observations sur les enjeux de santé publique propre à l’outre-mer.

J’ai constaté avec satisfaction que, en vertu de l’article 2 de l’ordonnance, l’Agence nationale de santé publique pourra exercer tout ou partie de ses attributions en Nouvelle-Calédonie ou en Polynésie française, sous réserve de la conclusion d’une convention et dans le respect de son équilibre financier. À l’heure actuelle, en Nouvelle-Calédonie, alors que certains sujets, tenant notamment à la prévention, sont bien traités, d’autres le sont moins et empêchent une coordination des soins. Je pense notamment aux complications liées à l’obésité, plus particulièrement au diabète : aujourd’hui, près d’un Calédonien sur deux est en surpoids, tandis que 10 % de la population est diabétique.

J’espère que la nouvelle Agence sera en mesure de conduire des études coordonnées visant à comprendre l’évolution de certains comportements à risque.

Je rappelle également, à propos du diabète, que bien souvent les populations vulnérables subissent cette maladie d’une façon beaucoup plus incisive que d’autres ; ce seul constat doit nous inciter à plus d’efforts.

Un autre sujet de santé publique est particulièrement sensible en Nouvelle-Calédonie : les maladies infectieuses. En mai dernier, la ville de Nouméa et l’archipel dans son ensemble ont été en situation d’épidémie de dengue. Des consignes de vigilance et de prudence ont bien sûr été adressées à la population. Cependant, avec l’approche de l’été, l’épidémie risque d’exploser et il faudra compter sur la mobilisation de chacun. Cela pourrait être une piste de travail de l’agence, en coordination, bien sûr, avec les services locaux.

Un autre sujet, qui constitue une préoccupation majeure en Nouvelle-Calédonie, a été évoqué tout à l’heure : le fléau de l’alcool et les drames qui en découlent à tous les niveaux.

Enfin, M. Bourdillon a récemment rappelé que la pollution de l’air était un véritable facteur de risque pour la santé publique. Aussi aimerais-je appeler votre attention sur la pollution de l’air en Nouvelle-Calédonie. Des études épidémiologiques ont mis en lumière les liens entre des pathologies respiratoires et des épisodes de pollution, causés principalement par l’activité industrielle et la circulation automobile de plus en plus dense. Sachez que notre territoire est également volontaire pour accompagner de nouvelles études sur ce sujet.

Ces remarques posées, vous aurez compris que le groupe UDI est favorable à l’adoption du projet de loi de ratification. Nous espérons que cette nouvelle entité sera à même de réaliser les nombreuses missions qui lui sont déjà assignées.

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