Intervention de Michel Sapin

Séance en hémicycle du 29 septembre 2016 à 15h00
Transparence lutte contre la corruption et modernisation de la vie économique — Article 45

Michel Sapin, ministre de l’économie et des finances :

La Constitution n’est pas une argutie, l’argument juridique et constitutionnel n’est pas une argutie juridique, et vous pourrez le répéter à qui de droit, en l’occurrence.

En matière de constitutionnalité, les choses sont aujourd’hui très simples : la décision du Conseil constitutionnel que j’ai sous les yeux, qui date de la fin de l’année dernière, dans son considérant no 33, dit très clairement que les dispositions qui étaient contestées par la droite, l’échange d’informations entre administrations fiscales, sont constitutionnelles parce qu’elles ne peuvent être rendues publiques, ce qui signifie a contrario que si elles étaient rendues publiques, ce serait inconstitutionnel.

J’en viens à la seconde articulation de mon raisonnement. Vous avez voulu avancer parce que la commission a eu la volonté de légiférer sur ce point, ainsi que le rapporteur l’a rappelé à juste titre. Voici notre raisonnement : nous pouvons faire exception à cette inconstitutionnalité si une directive européenne va dans ce sens. Le Conseil constitutionnel considère en effet que la directive européenne l’emporte, et rend constitutionnelle une disposition qui, à défaut, ne l’aurait pas été, si vous me permettez d’employer cette formulation peu rigoureuse sur le plan juridique. Donc nous devons rester dans le champ de cette directive, laquelle prévoit une publicité pays par pays pour deux catégories : les pays de l’Union européenne, d’une part – donc le Luxembourg n’est pas un exemple valable –, les pays non coopératifs ou paradis fiscaux, d’autre part. Pour les autres pays, les données peuvent être présentées sous forme agrégée. Vous allez plus loin, puisque vous prévoyez que dans les pays où une entreprise ne disposerait que d’un seul établissement elle serait exonérée de cette publicité.

Voilà l’objectif qui est le nôtre : l’efficacité. Nous avons été efficaces dans la lutte contre la fraude, nous l’avons été dans la lutte contre l’optimisation fiscale, soyons efficaces également dans l’instauration d’outils permettant, je le souhaite, au plus grand nombre de nos concitoyens de connaître les situations, les informations, y compris pour leur permettre de jouer leur rôle, d’aider l’administration fiscale dans ce domaine. Telle est notre position.

Alors bien sûr, on peut toujours décider de faire tout et n’importe quoi, mais dans trois semaines ou un mois, de telles décisions seront annulées par le Conseil constitutionnel et on n’aura pas avancé. Le progrès obtenu sur le papier aujourd’hui sera effacé d’un seul coup. Ce n’est pas une bonne manière de faire.

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