Intervention de Jean-Michel Baylet

Réunion du 27 septembre 2016 à 15h30
Commission des affaires économiques

Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales :

Ce que dit M. André Chassaigne n'est pas inexact, mais, avec la loi NOTRe, nous nous sommes engagés dans une construction qui renforce significativement les communautés de communes. Ne revenons pas en arrière avant même que ces transferts n'aient eu lieu – ils sont facultatifs à partir de 2018 et obligatoires à partir de 2020. Certains invoqueront le cas des offices de tourisme, mais je ne fais pas la loi sur les territoires de montagne pour détricoter la loi NOTRe ! En plus, on penserait que je le fais exprès.

Je connais le problème que vous évoquez, Monsieur André Chassaigne, mais le Gouvernement ne peut être favorable à vos propositions : la loi NOTRe attribue à titre obligatoire les compétences « eau » et « assainissement » aux communautés de communes, à compter du 1er janvier 2020, soit au terme d'un délai plus que raisonnable.

Les intéressés font bien le travail, certes, mais il est également vrai que les syndicats que vous évoquez sont de tout petits syndicats. Ces transferts ont donc vocation à assurer la réduction du morcellement des compétences et à permettre des économies d'échelle. Rendez-vous compte : la gestion de l'eau est aujourd'hui assurée par près de 35 000 services d'eau et d'assainissement ! Et 71 % des services d'eau potable recensés par l'Observatoire des services d'eau et d'assainissement restent gérés au niveau communal. La Cour des comptes n'a pas manqué de pointer cette dispersion, cette hétérogénéité et la complexité de l'organisation territoriale, sans parler de l'enchevêtrement des services communaux, intercommunaux et des syndicats techniques, parfois très anciens. Tout cela n'est pas sans poser des difficultés.

Dans ma propre commune, jusqu'à très récemment, il y avait trois syndicats d'eau, et il y en a encore deux. J'ai aussi connu le problème en tant que président de conseil général : j'ai échoué à créer – Mme Jeanine Dubié s'en souvient – un syndicat départemental. Il est effectivement très injuste que le prix de l'eau ne soit pas le même dans l'ensemble des communes d'un département et donc pour tous les citoyens – on pourrait tenir ce raisonnement au plan national. J'ai créé un syndicat de collecte et traitement des déchets, et il y avait un syndicat de l'énergie ; je n'ai pas réussi à créer un syndicat de l'eau, mais je trouverais juste que, dans un même département, le même prix soit payé par tous.

Par ailleurs, ces syndicats sont quand même d'une grande hétérogénéité : certains sont gérés au mieux, mais d'autres, qui se piquent de toujours pratiquer le prix le plus réduit, entretiennent très mal les réseaux. Un beau jour, c'est la catastrophe, et ils demandent des subventions au département ! Une telle hétérogénéité constatée sur des territoires d'une surface réduite est totalement anormale. Il s'agit tout de même d'un service public destiné à nos concitoyens. Et plus les syndicats sont nombreux, plus l'injustice et l'inéquité sont flagrantes. C'est la raison pour laquelle la loi NOTRe a voulu transférer cette compétence au niveau de l'intercommunalité. Je suis de ceux qui considèrent qu'il devrait même y avoir un syndicat départemental de l'eau dans tous les départements. Ce serait équitable en termes de service, de prix de l'eau et de gestion. Je ne peux donc être favorable à un retour en arrière à la faveur de l'examen de ce projet de loi, d'autant que, si nous ouvrons la possibilité de telles dérogations, il arrivera ce qui est arrivé pour les offices de tourisme. La dérogation devait concerner la montagne uniquement, et, naturellement, elle a été ouverte à tout le monde. Le Conseil d'État avait relevé le problème, et, si la possibilité n'avait pas été ouverte à tous, le Conseil constitutionnel aurait pu être saisi, au nom de l'égalité devant la loi – c'est pourquoi j'ai cédé si vite. Ne croyons pas que nous pourrions réserver de telles dérogations aux zones de montagnes, c'est une illusion.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion