Intervention de Gabrielle Louis-Carabin

Séance en hémicycle du 4 octobre 2016 à 15h00
Égalité réelle outre-mer — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGabrielle Louis-Carabin :

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le rapporteur, madame et messieurs les rapporteurs pour avis, chers collègues, en France hexagonale, 14 % de la population vit avec un niveau de revenu net mensuel inférieur à 60 % du revenu médian, c’est-à-dire sous le seuil de pauvreté, soit 1 000 euros pour une personne seule et 1 500 euros pour un couple. En France d’outre-mer, en moyenne, 25 % de la population vit en dessous de ce revenu médian, donc du seuil de pauvreté, soit près du double, comparé à la France hexagonale.

Avec un taux de chômage de 45 % en Guadeloupe, en Martinique, à La Réunion et en Polynésie française et de 55 % à Mayotte, le chômage dans les outre-mer, notamment celui des jeunes, est de 2,5 fois supérieur à celui de l’Hexagone. Cette situation est d’autant plus inquiétante qu’elle frappe de plein fouet nos jeunes, dont le niveau de formation reste plus faible que dans l’Hexagone : 22 à 25 % des jeunes qui ont un emploi, qui sont au chômage ou qui sont inactifs non scolarisés, n’ont pas de diplôme.

Avec une précarité dominante, une paupérisation dont les proportions atteignent, dans les outre-mer, le double des niveaux constatés en France hexagonale et un emploi non sécurisé, il est difficile, pour une frange importante de la population ultramarine, d’assumer ses obligations sociales et familiales.

Madame la ministre, les chiffres sont parlants : en dépit des politiques publiques volontaristes menées depuis plus de cinquante ans, des bienfaits de la départementalisation dès 1946 ou encore des initiatives entrepreneuriales audacieuses, les écarts de niveau de vie entre la France hexagonale et la France des outre-mer persistent. L’égalité demeure une réalité trop lointaine pour bon nombre de nos compatriotes. Nos économies ultramarines fragiles, caractérisées par des entreprises de petite taille, ne favorisent pas toujours la création d’emplois.

Ce constat justifie l’urgence à agir pour relancer les objectifs de rattrapage économique et la nécessité de repenser les politiques publiques et d’appliquer une nouvelle méthode plus structurée : celle des plans de convergence contractualisés, à l’échelle de chaque territoire, inscrits dans ce projet de loi de programmation relatif à l’égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique.

Il est important de s’emparer d’un sujet sensible et fondamental, celui de la réduction des inégalités pour tendre vers une égalité réelle, à l’image de chaque territoire. Il s’agit pour nous de respecter la Déclaration des droits de l’homme et des citoyens de 1789, qui indique très clairement que l’appartenance à un territoire ne doit en aucun cas être source d’inégalité entre citoyens de la République. Il faut aussi respecter l’article 72-3 de la Constitution, lequel dispose : « La République reconnaît, au sein du peuple français, les populations d’outre-mer, dans un idéal commun de liberté, d’égalité et de fraternité. »

Il s’agit de répondre à l’engagement numéro 29 du programme présidentiel du candidat François Hollande, qui prévoit un « nouveau modèle de développement de l’outre-mer ». Ce nouveau modèle prend forme avec les plans de convergence contractualisés et les autres dispositions économiques et sociales, inscrits dans le projet de loi qui nous est soumis.

Ces plans s’attaquent aux multiples causes des inégalités qui perdurent et gangrènent nos sociétés. Il s’agit donc d’assurer à tous les Français, qu’ils vivent dans l’Hexagone ou dans les outre-mer, les mêmes chances d’accéder aux principaux services de la vie quotidienne : à la santé, à l’éducation, à la qualification, à la formation et à l’emploi durable. Tel est l’objectif principal du présent texte.

Madame la ministre, chers collègues, pour répondre aux attentes de nos compatriotes, il faut rompre avec la transposition d’un modèle de développement inadapté à nos réalités, car égalité ne veut pas dire uniformité. Le principe d’égalité inscrit à l’article 2 de la Constitution le confirme bien, en n’interdisant pas « l’application de règles différentes à des situations non identiques ».

Partir de chaque réalité locale conduit à mettre en oeuvre des solutions toujours plus concrètes pour lutter contre la précarité des jeunes et des personnes âgées, contre l’illettrisme, contre le chômage, pour donner du pouvoir d’achat aux plus précaires, pour lutter aussi contre les conditions de paiement des cotisations sociales et pour que les travailleurs indépendants de nos territoires bénéficient des allocations familiales au même titre que les travailleurs indépendants de la France hexagonale. C’est une injustice sociale que nous demandons à gommer – je le fais, pour ma part, depuis 2008.

Si j’ai pu avoir parfois des doutes sur cette formule d’« égalité réelle », au point de demander à Victorin Lurel pourquoi il avait accepté la responsabilité de ce rapport,

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