Intervention de Martine Pinville

Séance en hémicycle du 6 octobre 2016 à 9h30
Ratification de deux ordonnances relatives à la consommation — Présentation

Martine Pinville, secrétaire d’état chargée du commerce, de l’artisanat, de la consommation et de l’économie sociale et solidaire :

Monsieur le président, madame la présidente de la commission des affaires économiques, madame la rapporteure, mesdames et messieurs les députés, sous l’impulsion du Président de la République, le Gouvernement et sa majorité ont fait le choix, dès 2012, de renforcer les droits et la confiance des consommateurs, pour en faire un levier essentiel de la relance de la croissance française. Ce choix, nous le constatons avec les dernières prévisions, est sur le point d’être récompensé.

Pour arriver à ce résultat, il a d’abord fallu apporter des garanties supplémentaires et de nouveaux droits aux consommateurs. C’était chose faite dès 2014 avec la loi défendue par Benoît Hamon, qui est venue renforcer les droits de consommateurs trop souvent malmenés. Quelques exemples concrets : les élèves des auto-écoles ne sont plus obligés de payer des frais à la restitution de leur dossier ; les achats de lunettes de vue sur internet sont encadrés ; les comparateurs en ligne sont obligés de proposer une information claire, transparente et loyale.

Cette loi sur la consommation est même allée plus loin. De nouveaux droits ont été créés : le droit de s’opposer au démarchage téléphonique abusif avec Bloctel ; le droit de résilier à tout moment, après un an de contrat, son assurance automobile ou multirisque habitation ; ou encore le droit d’obtenir réparation des dommages matériels subis à l’occasion d’un acte de consommation, avec l’action de groupe.

Aujourd’hui, après le renforcement de ces fondations et l’instauration de nouvelles règles, nous achevons le toit de cette grande maison du droit du consommateur. Vous l’aurez compris, ce toit c’est la recodification du code de la consommation, soumise à votre ratification à travers l’ordonnance du 14 mars 2016 relative à la partie législative du nouveau code de la consommation.

La loi a permis des avancées historiques en matière de droit du consommateur. Pourtant, un écueil reste à déplorer : les consommateurs ignorent le plus souvent leurs droits, nouveaux ou plus anciens, ce qui les empêche d’en bénéficier pleinement.

Un droit ou une liberté ne valent que si l’on peut en jouir pleinement. Sinon, ils ne restent que de beaux principes connus d’une poignée d’experts et ignorés du reste de la population.

Or, l’accès à l’information, autrement dit la lisibilité du code de la consommation, relevait de la chasse au trésor pour ceux qui trouvaient la patience de s’informer de leurs droits.

Certains d’entre vous savent de quoi je parle. Erreurs rédactionnelles, manque d’harmonisation des rédactions en matière de sanction notamment, ou même oublis : une refonte de ce code était nécessaire.

Cette recodification, entrée en vigueur le 1er juillet dernier, vient simplifier les dispositions et éclairer les utilisateurs que sont le consommateur, le professionnel, mais aussi l’administration, sur les règles et les droits en matière de consommation.

À travers une modernisation de l’organisation du code que les services de l’État préparent depuis déjà une dizaine d’années – je remercie vivement celles et ceux qui ont beaucoup travaillé sur cette question – les consommateurs ont enfin accès à une meilleure lisibilité de leurs droits et bénéficient donc d’une garantie supplémentaire quant à leur effectivité. La confiance à l’égard des professionnels est ainsi renforcée et le pouvoir d’achat des ménages protégé, nos concitoyens étant désormais mieux informés.

Les entreprises, quant à elles, peuvent d’ores et déjà profiter de cette nouvelle organisation pour dénicher de bonnes pratiques commerciales et s’accorder une plus forte sécurité juridique.

Enfin, les services de l’État disposeront de procédures et de pouvoirs d’enquête simplifiés, sécurisés et regroupés dans un livre dédié. La DGCCRF, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, peut en particulier jouir d’un nouveau dispositif de sanctions administratives et de nouveaux pouvoirs pour conduire encore plus efficacement ses enquêtes, de façon « masquée » ou en sollicitant des agents externes.

Madame la rapporteure, je tiens à vous donner des précisions sur la question que vous avez soulevée s’agissant des non-professionnels. Le non-professionnel s’apprécie au cas par cas lorsqu’une personne morale n’agit pas à des fins artisanales, commerciales ou encore industrielles. Cette définition, jusqu’ici jurisprudentielle, permet de préciser dans le code les protections dont bénéficient ces non-professionnels notamment, par exemple, en matière de clauses abusives. Ces dispositions peuvent alors bénéficier à des associations à but non lucratif, à des comités d’entreprise ou à des syndicats de copropriétaires qui ont recours à des prestations auprès d’autres professionnels hors de leur champ d’activité. Par exemple, une association se verrait protégée par le code de la consommation si elle dispose d’un abonnement téléphonique et que, lorsqu’elle souhaite le résilier, il lui est demandé de respecter un préavis alors que l’opérateur n’en a pas. Néanmoins – je tiens à vous rassurer sur ce point – cette définition est placée dans le code à droit constant et en permet simplement une plus grande lisibilité.

À ce jour, la jurisprudence n’a pas retenu le cas de l’application de la notion de non-professionnel aux collectivités locales, cependant, on ne peut pas exclure qu’à titre exceptionnel les juridictions puissent retenir cette qualification. Cela pourrait par exemple être envisageable pour une collectivité qui n’interviendrait pas en tant que prestataire, sous forme de régie ou de délégation de service public, et pourrait être déclarée victime d’une clause abusive dans un contrat ou d’une pratique commerciale trompeuse.

Mesdames et messieurs les députés, notre action pour protéger les consommateurs français ne s’arrête pas là, vous vous en doutez.

Nous avons été contraints tout au long de ce mandat par un contexte de crise économique dépassant largement nos frontières – je veux parler de la crise des « subprimes » venue d’outre-Atlantique qui a affecté directement la distribution du crédit immobilier en France.

Avec la directive européenne du 4 février 2014, nous avons mis en place un cadre juridique harmonisé du crédit hypothécaire à l’échelle européenne et nous avons facilité l’avènement d’un marché intérieur du crédit immobilier responsable et protecteur du consommateur. C’est l’objet de l’ordonnance du 25 mars 2016 sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage d’habitation qui transpose cette directive. Ces nouvelles dispositions sont appliquées aux contrats dont l’offre aura été émise après leur entrée en vigueur soit, pour l’essentiel, depuis 1er juillet 2016.

De nouvelles obligations ont été introduites dans le droit français, applicables aux établissements de crédit et aux intermédiaires de crédit – comme la remise d’une fiche d’information standardisée –, à l’évaluation de solvabilité, aux règles de conduite et de rémunération ainsi qu’aux règles de compétence.

De toute évidence, compte tenu de l’encadrement juridique robuste d’ores et déjà applicable au crédit immobilier en France, certaines dispositions ne nécessiteront qu’une simple adaptation du droit français aux exigences posées par la directive.

Je souhaite souligner que l’élaboration de cette ordonnance a donné lieu à une abondante concertation avec les organisations professionnelles et les associations de consommateurs. Je me réjouis de cette démarche constructive dans l’intérêt de tous.

Mesdames et messieurs les députés, le texte qui vous est soumis aujourd’hui a encore été amélioré sur le plan rédactionnel à l’occasion de l’examen en commission. À cet égard, je tiens à remercier la rapporteure pour la qualité de son travail. Je vous proposerai trois modifications afin d’aboutir à un texte qui apportera à nos concitoyens, à nos entreprises et aux services de l’État un cadre juridique modernisé au service de la protection des consommateurs et, in fine, du renforcement de l’économie française.

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