Intervention de Audrey Linkenheld

Séance en hémicycle du 6 octobre 2016 à 9h30
Ratification de deux ordonnances relatives à la consommation — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAudrey Linkenheld, rapporteure de la commission des affaires économiques :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des affaires économiques, chers collègues, nous sommes aujourd’hui réunis pour examiner le projet de loi no 4047 qui tend à ratifier deux ordonnances récentes, l’une du 14 mars 2016 relative à la partie législative du code de la consommation, l’autre du 25 mars sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage d’habitation.

Si les projets de loi de ratification d’ordonnances sont quasi systématiquement déposés dans le délai imparti lors de la loi d’habilitation – l’ordonnance, sinon, est caduque –, il est plus rare que ces projets de loi soient inscrits à l’ordre du jour et examinés comme c’est le cas ce matin. Pour les ordonnances dont nous discutons aujourd’hui, cela s’est révélé nécessaire afin, comme vous l’avez dit madame la secrétaire d’État, de sécuriser le dispositif juridique et, ainsi, de parachever un long travail.

En effet, la volonté de refonder le code de la consommation est ancienne puisque, malgré une codification relativement récente issue de la loi du 26 juillet 1993, l’architecture du code de la consommation est apparue inadaptée et peu accessible pour ses utilisateurs en raison des nombreuses réformes intervenues dans le domaine du droit de la consommation et, aussi, de l’important mouvement de transposition d’un certain nombre de normes européennes.

Par deux fois, en 2008 et en 2010, le Parlement avait ainsi habilité le Gouvernement à procéder à cette refonte par voie d’ordonnance sans toutefois que ces deux habilitations, pour des raisons diverses et variées, puissent aboutir.

Au cours de cette législature, c’est donc à l’occasion de l’examen de la loi « consommation » que le Parlement a de nouveau habilité le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour procéder à cette recodification du code de la consommation dans un délai de vingt-quatre mois à compter de la promulgation de la loi – elle a été promulguée le 17 mars 2014 et l’ordonnance a été quant à elle publiée, nous l’avons dit, le 14 mars 2016 : les délais ont donc été respectés.

Conformément à cette habilitation parlementaire, la recodification de la partie législative a été opérée à droit constant, sous la réserve de modifications rendues nécessaires pour assurer le respect de la hiérarchie des normes et la cohérence rédactionnelle des textes ainsi rassemblés, pour harmoniser l’état du droit, remédier aux éventuelles erreurs – cela peut arriver – ou insuffisances de codification et pour abroger les dispositions, codifiées ou non, devenues depuis sans objet.

Le projet vise donc principalement à aménager le plan du code et à déterminer une clé de répartition plus rationnelle entre les différents livres. Ce sont 1 113 articles législatifs qui ont ainsi été redistribués dans huit nouveaux livres, lesquels se substituent aux cinq livres anciens. Chaque livre comporte désormais les règles, les dispositifs de contrôle et les sanctions administratives, civiles et pénales en cas de non-respect.

Pour ajouter encore à l’ampleur de la tâche, on précisera que parallèlement à ce volet législatif, le même travail a été conduit sur le plan réglementaire aboutissant au décret du 29 juin 2016 permettant au nouveau code d’entrer en vigueur au 1er juillet 2016 comme vous l’avez dit, madame la secrétaire d’État.

Si ce travail de clarification était évidemment nécessaire et permettra sans aucun doute un meilleur accès au droit, il impliquera inévitablement une période transitoire – toujours un petit peu compliquée – au cours de laquelle chacun cherchera à retrouver dans le nouveau code les articles avec lesquels il avait l’habitude de travailler dans l’ancien. Je précise donc que, pour faciliter cette transition, le ministère a mis en ligne une table de concordance permettant de faire plus facilement l’aller-retour entre l’ancienne et la nouvelle numérotation du code.

La deuxième ordonnance qu’il nous est demandé de ratifier concerne, vous l’avez dit, les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage d’habitation, ordonnance qui a été prise cette fois en application de l’article 14 de la loi du 30 décembre 2014 portant diverses dispositions d’adaptation de la législation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière.

Le délai d’habilitation, cette fois, était de quinze mois à compter de la promulgation de la loi, soit le 30 mars 2016, et le projet de loi de ratification devait être déposé devant le Parlement dans un délai de cinq mois à compter de la publication de l’ordonnance. Pour faire écho à quelques interrogations de collègues formulées en commission des affaires économiques, je précise donc que, là aussi, les délais ont été parfaitement respectés puisque l’ordonnance a été publiée le 25 mars 2016 et le projet de loi de ratification déposé le 8 juin 2016.

Cette deuxième ordonnance vise donc à transposer une directive du Parlement européen et du Conseil du 4 février 2014 sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage résidentiel. Cela a été souligné : cette directive a été élaborée sur le plan européen suite à la crise des« subprimes » et compte tenu de la prépondérance – dans certains pays européens en tout cas – d’un système de crédit hypothécaire où le crédit est accordé d’abord en référence au prix du bien et non aux capacités de remboursement de l’emprunteur.

Je tiens à rappeler que la France est plutôt une exception en la matière. D’ailleurs, dans la résolution proposée à mon initiative ainsi que celle de quelques collègues adoptée par la représentation nationale à l’unanimité le 13 juin dernier, nous avons bien souligné que nous voulions protéger, dans le cadre des négociations en cours au comité de Bâle, ce système français de crédit immobilier qui, contrairement à d’autres, fonctionne peu sur l’hypothèque et sur les taux variables mais… qui fonctionne bien – il a notamment prouvé sa grande résilience face à cette crise de 2008.

C’est pourquoi, si la transposition de la directive de 2014 a nécessité des ajustements techniques et, en effet, des consultations répétées auprès des acteurs du marché, elle n’a pas bouleversé le droit français du crédit immobilier à usage d’habitation.

Un exemple : la directive prévoit la professionnalisation de l’activité d’évaluation du prix des biens immobiliers dans le cadre de l’octroi de crédits hypothécaires, or, en France, l’impact de cette mesure sera en fait très marginal : les crédits hypothécaires étant minoritaires, l’activité d’évaluation des biens l’est également.

Je souhaite toutefois souligner à mon tour deux nouveautés entrées en vigueur le 1er octobre 2016 : d’une part, vous l’avez dit, la fiche d’information standardisée européenne qui permet à l’emprunteur de mieux déterminer si le contrat de crédit proposé correspond bien à ses besoins et de comparer les différentes offres entre elles ; d’autre part, le taux annuel effectif global – TAEG –, déjà en vigueur pour le calcul des crédits à la consommation, qui remplacera désormais partout notre actuel taux effectif global – TEG –, l’objectif étant encore de permettre à l’emprunteur de comparer plus facilement les offres et, surtout, de mesurer leur impact réel sur sa situation financière personnelle.

Vous l’avez compris, le projet de loi qui nous est soumis ce matin ne se contente pas d’une ratification sèche des deux ordonnances : des modifications rédactionnelles sont proposées afin de corriger telle ou telle erreur de référence ou de tirer ici ou là dans un autre code une conséquence qui avait été initialement omise.

Comme souvent, le travail s’est poursuivi après le dépôt du projet de loi le 8 juin dernier et sont apparus, ici ou là, d’autres oublis, parfois de petites erreurs dans la codification, ce qui entre nous soit dit n’est guère étonnant compte tenu de l’ampleur du travail accompli.

Sur mon initiative et après quelques auditions que j’ai menées, la commission des affaires économiques a donc pu adopter un certain nombre d’amendements visant à corriger ces quelques imprécisions et erreurs de référence sans que pour autant, je le répète, le droit existant n’en soit modifié. Le travail de toilettage s’est encore un peu poursuivi après l’examen en commission, le Gouvernement ayant déposé quelques amendements de précision – un peu tardivement ! – mais ils ne soulèvent de mon point de vue aucune difficulté.

Avec la commission des affaires économiques, je vous appelle donc à adopter ce projet de loi.

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