Intervention de Général André Lanata

Réunion du 12 octobre 2016 à 18h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

Général André Lanata, chef d'état-major de l'armée de l'air :

Les livraisons d'A400M se poursuivent : deux appareils ont déjà été réceptionnés cette année, un troisième est prévu en fin d'année. Ces livraisons porteront à onze la flotte de l'armée de l'air. Sur ce programme, je suis attentif à ce que six appareils au premier standard tactique soient mis à notre disposition d'ici à la fin de l'année, conformément aux engagements de l'industriel. Toutefois, la crise sur les moteurs demeure un point d'attention central.

Enfin, je constate que les statistiques relatives à l'activité sont globalement en hausse par rapport à 2015, d'1 %, soit environ 1 000 heures pour l'armée de l'air. Cette progression masque toutefois une situation contrastée, en raison de la faible disponibilité de la flotte de transport. Si nos équipages de chasse réalisent l'essentiel de cette augmentation (168 heures par pilote et par an, dépassant ainsi les 159 heures inscrites dans la loi de finances), il faut garder à l'esprit que la grande partie de cette activité se déroule en opérations extérieures. C'est dire l'importance pour l'armée de l'air du projet de formation modernisée et entraînement différencié des équipages de chasse (FOMEDEC), auparavant appelé « Cognac 2016 », un projet indispensable sur lequel repose le maintien de nos capacités opérationnelles. Une décision doit être prise avant la fin de l'année.

Sur le plan des ressources humaines, la contribution de l'armée de l'air aux déflations d'effectifs depuis le début de la LPM était de 2 800 personnes fin 2016. Les décisions du conseil de défense d'avril 2016 ont ramené à 2500 suppressions d'effectifs l'objectif de l'armée de l'air sur la durée de la LPM (contre 3 200 prévus en LPM actualisée et 4 515 en LPM initiale), soit 55 % de l'objectif initial. Pour 2017, l'atténuation de la réduction des effectifs bénéficie principalement à la protection de nos emprises (environ 100 fusiliers), aux escadres de combatMCO (plus de 80 mécaniciens), ainsi qu'au renseignement (25 postes à l'escadron drones : équipages, officiers renseignement et techniciens). Pour ces raisons, et celles que je vous ai décrites à propos de l'importance de nos engagements, les ressources humaines constituent l'une de mes principales préoccupations.

S'agissant maintenant du projet de loi de finances pour 2017, je commence par noter que, dans la LPM actualisée, l'acquisition de nouveaux équipements a été en partie financée par des ressources internes au ministère, dégagées grâce aux marges résultant de l'évolution des indices économiques identifiées à l'issue de leur enquête par l'Inspection générale des finances et le Contrôle général des armées. Par ailleurs, l'effet « coût des facteurs », en particulier lié aux évolutions des prix du carburant, est intégré dans la construction budgétaire. Ceci étant posé, nous poursuivrons nos objectifs de remontée d'activité en 2017, conformément à la LPM actualisée, en prenant en compte la réalité de nos engagements opérationnels. Nous maintenons la trajectoire permettant de retrouver les normes d'activité prévues en fin de LPM. Ainsi, pour 2017, nous prévoyons respectivement 164 heures de vol par pilote de chasse et par an, 191 heures pour les pilotes d'hélicoptères et 267 heures pour les équipages de transport, une prévision d'augmentation liée en partie à nos efforts dans le MCO.

Concernant l'équipement des forces de l'armée de l'air, le PLF 2017 doit permettre de consolider la feuille de route de l'aviation de combat en lançant les commandes des premiers Mirage 2000D rénovés (avec quarante-cinq commandes sur les cinquante-cinq décidées, les dix derniers étant dans une tranche conditionnelle supplémentaire) ; d'améliorer les capacités d'intervention de nos forces avec la commande de quinze nacelles de désignation Talios supplémentaires ; de renforcer la capacité de protection avec la commande du troisième centre ACCS (Air Command and Control System) à Mont-de-Marsan, après ceux de Lyon et de Cinq-Mars-la-Pile. À ce sujet, l'ACCS, système de commandement et de contrôle aérien partagé avec nos alliés de l'Otan, constitue une de mes préoccupations majeures. Je juge que ce système n'est ni encore suffisamment mature ni suffisamment robuste pour satisfaire les exigences de la posture permanente de sûreté aérienne. Compte tenu des difficultés de sa mise au point, il sera nécessaire de prolonger le fonctionnement et le soutien du système actuel STRIDA jusqu'à l'horizon 2021, au lieu de 2018, pour garantir la continuité de la protection de l'espace aérien national. Je suis confiant car l'industriel estime être en mesure de tenir cette échéance, compte tenu des ressources qu'il a affectées au programme et de l'analyse des faits techniques restant à corriger. L'armée de l'air apporte tout son soutien au développement, notamment pour les tests en environnement réel, afin d'assurer le succès du programme malgré ces difficultés. Je signale tout de même la contrainte de maintenir une activité sur le site de Drachenbronn bien au-delà des prévisions. Il en résulte notamment des conséquences en matière de ressources humaines qui aggravent une situation difficile.

En matière de recueil de renseignement électromagnétique, l'intégration d'une charge d'écoute électromagnétique ROEM est prévue d'être commandée en 2016, pour une capacité opérationnelle attendue en 2018.

En ce qui concerne la mobilité, le premier des quatre C-130J neufs sera livré fin 2017 (puis un en 2018 et deux avions disposant d'une capacité de ravitaillement en vol d'hélicoptères en 2019). Pour l'A400M : trois autres appareils doivent être livrés en 2017 et le quinzième en 2018. La LPM actualisée prévoit ensuite une suspension des livraisons jusqu'en 2021.

Pour conclure, et compte tenu de la situation que j'ai décrite, vous comprendrez que j'ai absolument besoin d'une exécution à la lettre de la programmation militaire, amendée par l'actualisation intervenue en 2015, auxquelles sont venues s'ajouter les décisions prises en conseil de défense cette année. À défaut, l'armée de l'air ne pourra pas faire face à l'ensemble des missions qui lui sont demandées. Mais il y a une réalité qui dépasse l'analyse capacitaire derrière les mesures chiffrées du PLF, une réalité que j'aime à qualifier d'« épaisseur », opérationnelle et humaine. L'armée de l'air est tout sauf une abstraction budgétaire ou conceptuelle. Elle n'a de sens qu'intégrée dans les opérations interarmées, au service des ambitions de la France et pour la protection des Français. Par-dessus tout, elle n'a de sens que par celui de l'engagement des femmes et des hommes qui, en son sein, servent la France. C'est sur eux que reposent nos succès en opérations, c'est d'eux que dépend la réussite de notre transformation. J'ai confiance en eux, et je tenais à vous le redire publiquement. En ces circonstances, leurs conditions de travail et de vie font l'objet de toutes mes attentions et sont au coeur de mes priorités. C'est aussi une forme de reconnaissance que nous devons à leur engagement. Et je voudrais terminer sur ce point : la condition du personnel, les familles de nos aviateurs, sont une part intégrante de nos capacités de combat. Je sais que la commission, Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, est de tout coeur avec eux et sera attentive à cette préoccupation. Vous pouvez avoir confiance en eux.

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