Intervention de Cécile Untermaier

Réunion du 27 octobre 2016 à 9h30
Commission élargie : finances - lois constitutionnelles

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCécile Untermaier :

Dès 2012, nous avons considéré que le budget de la justice était une priorité, comme ceux de l'éducation et de la police. Les faits ne cessent de nous donner raison. La politique menée pendant les dix années précédentes n'avait rien arrangé aux retards constatés depuis longtemps, comme vous l'avez souligné, monsieur le garde des sceaux. Michel Mercier, dernier garde des sceaux de la précédente législature, reconnaissait en mars 2011, après le mouvement des personnels de justice, les difficultés liées à une augmentation continue du contentieux et le retard à combler les manques de moyens.

Entre 2001 et 2011, on constatait une augmentation de plus de 46 % des affaires judiciaires, sans apport de moyens correspondants. Sans surprise, comme l'a rappelé M. Hetzel, la Commission européenne pour l'efficacité de la justice (CEPEJ) avait donc rétrogradé la France dans son classement d'octobre 2010. Parmi 43 pays européens classés en fonction de la part du PIB par habitant consacrée à la justice, notre pays est passé du 35e au 37e rang.

Cette situation n'est pas structurelle et nous pouvons y remédier par une volonté politique telle que celle que nous exprimons au travers de ce budget 2017.

La réforme brutale et inorganisée de la carte judiciaire, et notamment la suppression des tribunaux d'instance, a eu pour effet de priver nombre de justiciables d'un accès au droit et de rendre le service public de la justice totalement illisible. Il nous a fallu remédier à cet abandon. C'est le second pilier de notre action : adapter la justice aux besoins du citoyen et de notre démocratie.

Ce budget permet l'application des mesures de modernisation, de simplification, de mutualisation et de numérisation prévues par les deux lois portant sur la justice du XXIe siècle, sans compter les alternatives au jugement dont vous avez évoqué la teneur, monsieur le garde des sceaux.

Depuis 2012, ce budget a augmenté chaque année d'un peu plus de 1 %. Cet effort constant s'est intensifié cette année puisque le budget progresse de 4,5 % pour atteindre un montant total de 6,882 milliards d'euros. Les créations d'emploi se poursuivent à un rythme élevé : 2 100 ETP dont 1 403 ETP au titre de la lutte contre le terrorisme et la radicalisation. C'est un effort très important. Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous préciser la nature de ces postes et les endroits où ils seront créés ?

L'augmentation de 4 % des crédits hors masse salariale – soit plus de 36 millions d'euros par rapport à la loi de finances 2016 – traduit l'effort sans précédent de remise à niveau des moyens de fonctionnement des juridictions. C'est une mesure indispensable. Les difficultés, mises en évidence ces derniers jours et que vous aviez anticipées, confirment la pertinence de cet effort budgétaire.

Le budget relatif à l'administration pénitentiaire représente le premier programme de cette mission. Face aux enjeux de la radicalisation, de l'incarcération des terroristes, de la sécurité et de la surpopulation carcérale, il était nécessaire d'engager des moyens importants. Loin des simples discours, des dispositions concrètes sont prises. Vous prévoyez ainsi 1 566 cellules supplémentaires dans 28 quartiers de préparation à la sortie et 3 468 cellules en maison d'arrêt. Pourriez-vous nous expliquer la place des différentes structures et leur organisation ?

Je n'irai pas plus loin dans le détail des différents programmes présentés par nos rapporteurs. Elisabeth Pochon a évoqué le programme de l'accès au droit et la douloureuse question de l'aide aux victimes. Dans le cadre de ce programme, nous notons que les crédits affectés à l'aide juridictionnelle sont en augmentation et atteignent 454 millions d'euros. Nous voterons évidemment en faveur de l'amendement proposé qui permettra de majorer l'unité de valeur. Mais nous notons que les besoins sont en hausse et que l'accès au droit passe aussi par le relèvement du plafond d'admission à l'aide juridictionnelle.

Un effort substantiel a été fait par notre gouvernement, mais il nous faudra le poursuivre car trop de personnes abandonnent toute idée de justice à raison de son coût en appel et en cassation. Le relèvement du seuil est devant nous. À ce propos, en plein accord avec mes collègues de la commission des lois, je rappelle ici qu'un fonds interprofessionnel doit être mis en place avant la fin de l'année 2017. Ce fonds de redistribution, alimenté par l'écrêtement calculé à cette fin de tarifs proportionnels de professions réglementées, est également destiné, selon la volonté du législateur, à financer l'aide juridictionnelle.

Si les majorations sans précédent des crédits de la justice sont à saluer, il nous faut également noter l'effort simultanément poursuivi dans divers domaines : la réduction de 47 millions d'euros des dépenses pour frais de justice ; la modernisation indispensable des outils informatiques – nous pensons au système CASSIOPEE qui n'est toujours pas opérationnel au bout de quinze ans ; les mesures de déjudiciarisation permettant le redéploiement de 367 ETP.

Ce budget 2017 s'inscrit en cohérence avec la politique menée dans ce domaine depuis 2012. Il prend en compte les exigences multiples attendues sur notre territoire de la part de nos concitoyens et des nombreux acteurs oeuvrant dans le domaine de la justice, en faisant une large place aux enjeux majeurs de sécurité, d'efficacité et de qualité dans l'exécution de la réponse judiciaire. Ce budget s'inscrit aussi dans le long terme et l'effort n'a de sens que s'il est maintenu au-delà de 2017. Le groupe socialiste, écologiste et républicain appellera donc à voter pour ce budget.

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