Intervention de François Rochebloine

Réunion du 27 octobre 2016 à 9h30
Commission élargie : finances - lois constitutionnelles

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Rochebloine :

Avec 6,9 milliards d'euros de crédits, le budget consacré à la mission « Justice » enregistre une augmentation de 4,5 % à périmètre constant.

Chacun s'accorde à le reconnaître, ce budget doit relever des défis considérables : permettre la réorganisation d'un système judiciaire qui attend hélas toujours une véritable modernisation, le tout sur fond de lutte contre le terrorisme. Nous considérons que l'un des objectifs de cette mission doit être de simplifier la justice tout en optimisant les moyens qui lui sont alloués. Espérons que la mise en oeuvre de la loi dite de modernisation de la justice du xxie siècle, adoptée très récemment, permettra d'engager la vraie réforme d'ampleur que nous appelons de nos voeux.

Concrètement, et à court terme, il s'agira de mettre en oeuvre les avancées obtenues en matière d'accès au droit et de simplification des procédures : la création d'un service d'accueil unique du justiciable et les mesures de déjudiciarisation permettant de désengorger les juridictions.

Seront également concrétisées des mesures que nous désapprouvons, comme nous vous l'avons indiqué lors des débats sur le texte : le transfert de certaines compétences aux officiers de l'état civil, qui vont faire peser des charges supplémentaires sur les communes, ou encore la suppression de la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail (CNITAAT).

L'avis du groupe de l'Union des démocrates et indépendants est donc partagé.

La lutte contre le terrorisme ne pouvait qu'être l'un des enjeux majeurs du projet de loi de finances pour 2017. Nous saluons les 233 millions d'euros de crédits, hors dépenses de personnel, alloués au ministère de la justice dans ce domaine, même s'il ne s'agit que d'un maintien à niveau des crédits de 2016.

Ces crédits bénéficieront notamment à la création du service public du renseignement pénitentiaire, ce dont nous nous réjouissons, car nous savons quel rôle déterminant les prisons ont pu jouer dans la propagation de la radicalisation, qu'il est essentiel de prendre en considération pour lutter contre le terrorisme.

Depuis le début de cette législature, le groupe de l'Union des démocrates et indépendants a dénoncé des budgets ne répondant pas au besoin carcéral qui se développe dans notre pays. Ainsi que vous l'avez indiqué dans votre rapport de septembre 2016 sur l'encellulement individuel, monsieur le ministre, la France ne comptait au 1er août 2016 que 58 507 places de prison pour héberger 68 819 détenus, ce qui représente un déficit de 10 312 places et une surpopulation de 118 %. La construction de nouvelles places de prison s'impose donc d'évidence.

En 2017, des autorisations d'engagement à hauteur de 1,558 milliard d'euros sont ouvertes pour la construction d'établissements pénitentiaires. Vous prévoyez ainsi de lancer un programme immobilier de réduction de la surpopulation dans les maisons d'arrêt – 4 300 places – et un programme de construction de quartiers de préparation à la sortie – 2 500 places. Nous nous réjouissons de la prise de conscience que cela manifeste de votre part.

À ce propos, monsieur le ministre, vous avez très récemment confirmé plusieurs opérations, parmi lesquelles – vous me permettrez de l'évoquer – la construction d'une nouvelle maison d'arrêt à Saint-Étienne, dont je me réjouis. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet, notamment sur les délais ? Vous avez parlé tout à l'heure du 16 décembre. Le problème du choix du terrain se pose, mais c'est l'État qui décide en définitive.

Par ailleurs, nous avons soudainement appris la fin des cinq unités de prévention de la radicalisation, inscrites dans ce budget et qui avaient commencé à fonctionner en janvier dernier. Vous avez annoncé mardi qu'elles seraient remplacées par six quartiers d'évaluation de la radicalisation. Comment ce changement va-t-il se traduire dans le budget ?

Je me dois enfin d'évoquer la refonte de l'aide juridictionnelle. À partir de 2013, nous avons assisté à une succession d'hésitations et d'incertitudes de la part du Gouvernement, qui témoignait d'une véritable improvisation en la matière. Cette année, le projet de loi de finances prévoit la revalorisation de l'unité de valeur de référence, qui passera de 26,50 à 30 euros hors taxes – voire 32 si votre amendement, monsieur le ministre, est adopté, ce dont je ne doute pas. Mais cela reste encore insuffisant, et vous le savez. Une réforme globale et pérenne de l'aide juridictionnelle et de l'accès au droit est indispensable.

Je ne voudrais pas conclure sans évoquer le mal-être du personnel des maisons d'arrêt et des prisons, qui vivent aujourd'hui des situations particulièrement difficiles ; mon collègue Philippe Goujon en a très bien parlé.

Si le groupe de l'Union des démocrates et indépendants tient à saluer des efforts importants et un certain nombre d'avancées, beaucoup reste encore à faire pour adapter notre système juridictionnel aux exigences du xxie siècle. Quoi qu'il en soit, monsieur le ministre, soyez remercié pour le travail accompli en neuf mois seulement. Quel dommage que vous n'ayez pas été nommé plus tôt à ce ministère régalien !

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