Intervention de Frédéric Reiss

Réunion du 27 octobre 2016 à 21h00
Commission élargie : finances - affaires économiques - affaires culturelles - développement durable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrédéric Reiss :

À l'approche de l'élection présidentielle, le Gouvernement présente un budget de l'enseignement supérieur en hausse de 852 millions d'euros. En outre, 25 000 étudiants boursiers passent de l'échelon 0 à l'échelon 0 bis ; est prévu le financement des 1 000 postes annuels depuis 2012, ainsi que le recrutement de 400 nouveaux chercheurs, mais aussi le financement des progressions salariales et la prise en compte de la hausse démographique à hauteur de 100 millions d'euros.

Ces quelques annonces ne sauraient masquer une dure réalité. Avec l'arrivée massive de 40 000 nouveaux étudiants, cette année encore, les photos d'amphithéâtres bondés ont abondamment circulé sur les réseaux sociaux. Le boom démographique était prévisible, mais le Gouvernement a préféré procrastiner.

La question du modèle économique de l'université est restée taboue et n'a pas été posée en cinq ans. Aussi, au lieu de lancer l'acte II de l'autonomie des universités pour donner à ces dernières les moyens d'avancer, la majorité a adopté la loi Fioraso qui a créé de vraies usines à gaz, notamment en matière de « gouvernance » et des regroupements qui ont fait perdre la dynamique créée par la loi relative aux libertés et responsabilités des universités.

Je rappelle que la question de l'augmentation et de la meilleure répartition des bourses a été entamée bien avant 2012. Pour mémoire, près de 115 000 nouveaux boursiers sur critères sociaux, provenant principalement des classes moyennes à revenus modestes, ont bénéficié du dispositif d'aides en 2010. En outre, plus de 110 000 étudiants les plus défavorisés ont bénéficié en 2012 du sixième échelon de bourse créé le 1er janvier 2008.

En ce qui concerne logement, là encore, on constate une grande déception de la part des étudiants, car, sur les 42 500 logements promis par François Hollande, seuls 26 500 seront livrés d'ici à la fin de l'année. Je vous trouve bien optimiste, monsieur le secrétaire d'État, d'affirmer que vos objectifs sont atteints.

En ce qui concerne la recherche, là encore, le Président de la République a déçu. Il avait promis de valoriser la recherche, mais le quinquennat va s'achever sur un bilan sévère. Nous avons la chance d'avoir des chercheurs français parmi les meilleurs au monde, comme l'a encore montré le prix Nobel de chimie décerné à Jean-Pierre Sauvage – ce qui prouve une fois encore l'excellence de l'université de Strasbourg. « On a un appareil de recherche, en France, qui est de très grande qualité, mais qui est en train de souffrir, déclare Alain Fuchs, président du CNRS. Si cela dure trop longtemps, il y a un risque de décrochage de la recherche française. »

Comment garantir la confiance entre l'État et les chercheurs lorsqu'on annonce des coupes budgétaires en plein milieu d'année, comme ce fut le cas au printemps dernier ? Face à la bronca des chercheurs, le Gouvernement a rétropédalé et a prélevé sur les grands organismes de recherche « seulement » 122 millions d'euros. Le rapporteur pour avis Vincent Ledoux a raison de mettre l'accent sur la stagnation de l'effort national et sur le fait que les crédits restent insuffisants pour que la France scientifique et industrielle reste compétitive.

Ma première question porte par conséquent sur les actions que le Gouvernement compte entreprendre pour redonner à la recherche française de meilleures perspectives. L'augmentation des crédits de la présente mission, la dernière année du quinquennat, ne doit pas masquer la baisse constante des crédits dévolus à la recherche au cours des quatre derniers exercices. Nos chercheurs ont besoin de visibilité et le signal qui leur a été envoyé a été plutôt brouillé.

Ma seconde question porte, elle, sur les moyens de réconcilier la recherche avec le droit du travail. Les personnes interrogées par le rapporteur pour avis Ledoux ont unanimement dénoncé les effets négatifs sur la recherche publique de la loi du 12 mars 2012. Par crainte de devoir transformer des contrats à durée déterminée (CDD) en contrats à durée indéterminée (CDI), les organismes de recherche limitent la durée des contrats à cinq ans, voire à trois ans, ce qui a un effet désastreux sur la performance de la recherche avec une rotation très importante et des projets non aboutis. Quelles actions le Gouvernement compte-t-il mener pour allier la sécurité de l'employé et de l'employeur avec une recherche de qualité ?

Enfin, monsieur le secrétaire d'État, depuis l'école primaire jusqu'au monde de la recherche, en passant par l'enseignement secondaire et l'enseignement supérieur, je milite pour la reconnaissance et la valorisation du mérite. À l'image d'un étudiant recevant une bourse plus importante pour récompenser ses réussites académiques, les équipes de chercheurs ayant fait leurs preuves devraient voir leurs crédits récurrents renforcés. Cela libérerait l'esprit des chercheurs des contraintes administratives liées aux recherches de financement et leur permettrait de se consacrer pleinement à leurs travaux. Quelle est la position du Gouvernement sur cette remarquable suggestion du rapporteur pour avis Vincent Ledoux ?

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