Intervention de Cécile Untermaier

Séance en hémicycle du 4 novembre 2016 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2017 — Justice

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCécile Untermaier :

Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, monsieur le rapporteur spécial, mesdames et messieurs les rapporteurs pour avis, chers collègues, l’examen du budget de la mission « Justice » pour l’année 2017 en commission élargie n’a pas donné lieu à des critiques tendant à le remettre en question, en dehors quelques positions de principe bien difficiles à défendre, tant nous devons convenir que le service public de la justice est une priorité.

Depuis 2012, nous avons soutenu ces budgets, qui ont régulièrement augmenté. Nous l’avons fait aussi pour la police et la gendarmerie, ainsi que pour l’éducation, car il ne faut pas séparer la politique éducative de la prévention, de la sécurité et de la justice. Les faits ne cessent de nous donner raison, même si le retard pris pendant trente ans ne pourra être comblé par l’action salutaire menée au cours de ce seul quinquennat.

Le nombre d’affaires judiciaires, en France, a augmenté de plus de 46 % entre 2001 et 2010, sans que les moyens correspondants soient affectés à la justice. Vous savez que la Commission européenne pour l’efficacité de la justice a rétrogradé la France du trente-cinquième au trente-septième rang sur quarante-trois pays, en octobre 2010, en termes de dépenses de justice rapportées au PIB par habitant.

La réforme de la carte judiciaire n’a pas arrangé les choses : il nous faut donc, tous ensemble, rendre le droit et la justice lisibles et accessibles dans n’importe quelle partie du territoire. Nous y travaillons déjà, dans les zones rurales, avec les tribunaux de grande instance, dans le cadre de la mise en place des SAUJ. Ces services ne doivent pas rester figés à l’entrée des tribunaux de grande instance : il faut inventer des formes délocalisées d’accueil du public, afin de remédier au sentiment d’abandon.

La justice doit être efficace et rapide pour les citoyens : cette exigence est d’ores et déjà transcrite en droit par les deux projets de loi que nous avons adoptés, qui constituent la réforme de modernisation de la justice du XXIe siècle. La justice doit répondre à une autre exigence, tout aussi impérieuse : elle doit être capable de lutter efficacement contre le terrorisme et la radicalisation, mais aussi la fraude fiscale.

Elle doit aussi se montrer capable de travailler en rencontrant les acteurs de terrain. Je pense, à cet égard, au déficit de dialogue entre les policiers et les magistrats : un temps d’échange est nécessaire, dans le respect de l’indépendance de la justice. Le dialogue met un terme à l’incompréhension, au « prêt-à-penser ».

Depuis 2012, le budget de cette mission a augmenté chaque année d’un peu plus de 1 %. Cet effort constant s’est accéléré cette année : l’année 2017 représente, par rapport à l’année 2016, une augmentation de 4,8 %, portant le montant total du budget de la mission à près de 7 milliards d’euros.

Les créations d’emploi ne sont pas en reste : 2 100 équivalents temps plein seront créés, ce qui représente un effort très important. L’augmentation de 4 % des crédits hors masse salariale traduit l’effort sans précédent de remise à niveau des moyens de fonctionnement des juridictions, soit plus de 36 millions d’euros par rapport à la loi de finances pour 2016. C’est une mesure indispensable, car le service public de la justice a besoin d’une numérisation, d’une informatisation performante à tous les stades de la procédure. Cela permettra de gagner un temps considérable grâce à la simplification des procédures avec la police judiciaire et la gendarmerie.

Les crédits déjà majorés en 2016 pour lutter contre la radicalisation sont maintenus en 2017.

Le programme « Administration pénitentiaire » est le plus important de cette mission. Il fallait engager d’importants moyens pour faire face aux enjeux de la radicalisation, de l’incarcération des terroristes, de la sécurité et de la surpopulation pénitentiaire. Loin des discours, des dispositions concrètes sont engagées : vous prévoyez ainsi 1 566 cellules supplémentaires dans 28 quartiers de préparation à la sortie, et 3 468 cellules en maison d’arrêt. Par ailleurs, 59 millions d’euros seront consacrés au fonctionnement de l’administration pénitentiaire, notamment à la sécurisation des établissements grâce à la vidéoprotection et la mise en place de brouilleurs.

L’encellulement individuel n’est pas un luxe : c’est une exigence très ancienne qui figure dans le code pénal. La prison n’est pas une peine, mais le lieu d’exécution d’une peine, dans la perspective de la restauration de la personnalité de l’individu condamné. Je vous renvoie, à ce sujet, au rapport très complet de M. le garde des sceaux, intitulé En finir avec la surpopulation carcérale. L’encellulement individuel est un moyen de lutte contre la radicalisation et la récidive. Le budget de cette mission avance résolument dans cette direction.

Je ne détaillerai pas plus les différents programmes. Je rappellerai simplement qu’il faudra relever le plafond d’admission à l’aide juridictionnelle. Un effort substantiel a été accompli dans ce domaine, mais il nous faut le poursuivre ; des citoyens sont encore mis de côté lorsqu’ils doivent aller en justice, en appel ou en cassation, à cause du coût de la procédure.

Le budget de cette mission est cohérent avec la politique menée dans ce domaine depuis 2012. Il prend en compte les multiples exigences dont je viens de parler. Il s’inscrit aussi dans le long terme. Mais cet effort n’aura de sens que s’il est maintenu au-delà de 2017, et s’accompagne des réformes dont M. le garde des sceaux a rappelé l’importance. Il faut trouver un consensus pour une action de long terme. En tout cas, le groupe socialiste, écologiste et républicain votera ces crédits sans réserves. J’invite tous mes collègues, dans cet hémicycle, à faire de même.

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