Intervention de Éric Alauzet

Réunion du 27 octobre 2016 à 15h00
Commission élargie : finances - affaires économiques - développement durable - affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Alauzet, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, pour la sécurité alimentaire :

La politique de sécurité alimentaire veille, avec les professionnels responsables au premier chef, à la qualité de l'alimentation des 66 millions de Français, sans compter le secteur stratégique des exportations de produits alimentaires.

Ses moyens d'action propres sont frugaux, puisque le programme 206 ne représente, avec 506 millions d'euros de crédits de paiement, que 0,1 % du total des dépenses des trente et une missions du projet de loi de finances pour 2017. De plus ce programme 206 a fait l'objet, ces dernières années, de fortes économies budgétaires, si bien que la baisse des crédits du programme 206 (hors titre 2) a atteint 32 % en six ans – de 2009 à 2015.Elle s'est répercutée sur les effectifs,alors même que le budget du ministère de l'agriculture a augmenté en exécution de 4,1 % entre 2012 et 2015. La priorité a donc été donnée à la production plutôt qu'au contrôle.

La mission « Sécurité alimentaire »bénéficie cette année d'un léger rebond budgétaire avec 506 millions d'euros, soit plus 4,2 %. De nombreux rapports de l'Office alimentaire et vétérinaire, qui est la structure européenne de contrôle, ou de la Cour des Comptes, ont tiré la sonnette d'alarme sur la baisse des effectifs des corps de contrôle vétérinaire dans les abattoirs, ou sur les risques que la baisse des effectifs fait peser sur la veille sanitaire.

Si les services du ministère ont endigué les différentes alertes sanitaires de l'année 2016 comme la bactérie Xylella fastidiosa en Corse et en PACA ou le virus influenza aviaire dans le Sud-Ouest, les alertes dans les abattoirs ont donné lieu à une Commission d'enquête parlementaire qui a rendu un rapport très argumenté le 20 septembre dernier.

La hausse de 4 % des crédits de paiement est bienvenue après six ans de baisse, mais qu'en est-il réellement des 60 emplois prévus dans le PLF pour 2017, alors que les créations prévues l'année dernière ont été effacées par le transfert de 74 équivalents temps plein travaillé (ETPT) vers d'autres missions, soit une perte totale de 14 équivalents temps plein ?

L'insuffisance de moyens humains apparaît maintenant au sein des services vétérinaires chargés d'inspecter les abattoirs. Elle est patente à l'ANSES, pour répondre aux missions confiées par la loi, comme pour répondre dans les délais voulus aux demandes des laboratoires.

Il est certain que le travail de l'ANSES s'effectue de façon tendue, alors que 35 ETPT seraient nécessaires pour faire face aux nouvelles missions. Le budget 2017 est de 138 millions d'euros avec une subvention de la mission « Sécurité alimentaire »en légère baisse, et des taxes affectées plafonnées. Or, compte tenu des missions accrues confiées par la loi d'avenir pour l'agriculture et de sa dépendance à l'égard de ses quatre ministères de tutelle – agriculture, environnement, santé et travail –, l'ANSES devrait renforcer ses moyens humains. Il semble donc indispensable de lever la pression sur le plafond d'emplois, afin de rendre à l'ANSES plus de flexibilité pour s'adapter à une charge de travail croissante.

Monsieur le ministre, j'ai cinq questions à vous poser.

En ce qui concerne le plan Ecophyto, la baisse des doses de pesticides est très lente. Et les résultats du plan EcoAntibio sont encore mitigés. Qu'en est-il de la baisse du recours aux antibiotiques critiques ? A contrario, le ministère a-t-il connaissance du risque létal auquel seraient exposés les animaux affectés de certaines pathologies, pour lesquels le temps nécessaire à la livraison de l'antibiogramme s'avérerait trop long ?

En ce qui concerne la surveillance dans les abattoirs, après les révélations et vidéos diffusées par l'association L214, les crédits attendus pour prévoir plus de vétérinaires sont absents. L'arrêté modifié du 12 décembre 1997 – page 7 du rapport – n'est pas respecté, ni dans sa lettre ni dans son esprit.

La commission d'enquête avait suggéré un certain nombre de mesures : généralisation des vidéos, comme c'est le cas au Royaume-Uni ; création d'une brigade bien-être animal rattachée à la Brigade nationale d'enquêtes vétérinaires et phytosanitaires (BNEVP) ; modernisation des abattoirs de plus de cinquante salariés et création d'un comité local avec les élus, l'exploitant, les associations, les éleveurs, les services vétérinaires. Lesquelles seront mises en oeuvre ? Nous attendons une réponse.

En ce qui concerne la maladie ESB, un seul cas a été décelé dans les Ardennes, et il s'en est suivi la perte de statut de la France comme « pays à risque négligeable » et le maintien d'une politique coûteuse pour l'État, de l'ordre de 10 millions d'euros, mais aussi pour les professionnels de la viande, soumis à de lourdes contraintes pour éliminer les carcasses, et à des coûts supplémentaires. Les règlementations européennes ne doivent-elles pas être revues ?

Où en est la surveillance des perturbateurs endocriniens qui pourraient être incriminés dans la recrudescence de certains cancers ?

Enfin, le statut d'établissement public administratif et le plafonnement des taxes affectées sont des freins à l'embauche de personnes qualifiées par l'ANSES alors que ses missions se multiplient, en lien avec la demande sociétale. Monsieur le ministre, comment pourriez-vous envisager de desserrer ces contraintes juridiques ?

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