Intervention de Michel Piron

Séance en hémicycle du 8 novembre 2016 à 21h45
Projet de loi de finances pour 2017 — Égalité des territoires et logement

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Piron :

Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission des affaires économiques, madame et messieurs les rapporteurs, chers collègues, le budget qui nous est présenté, stable par rapport à l’an passé, peut laisser un sentiment partagé. Il est vrai que les chiffres récents montrent une réelle reprise de la construction de logements dans notre pays, même si l’objectif naguère affiché de 500 000 logements neufs demeure inatteignable, parce qu’il n’est tout simplement pas réaliste.

Cette tendance, évidemment positive, tient à de nombreuses raisons : certaines sont extérieures à l’action du Gouvernement, tels les taux d’intérêt historiquement bas ; d’autres sont liées aux nouvelles orientations du Gouvernement, avec un effet de rattrapage après des années de resserrement de la construction et le maintien de dispositifs vertueux tels que les mesures Pinel et le prêt à taux zéro, qui ont permis de rétablir une confiance minée par les débats autour de la loi ALUR.

Sur l’ensemble du quinquennat, le constat en matière de logement est donc celui d’un départ assez désastreux, corrigé, en partie seulement, en fin de mandat. Il est dommage d’avoir perdu plus de deux ans pour mettre l’accent sur l’offre insuffisante de logements. Nous tenons en effet à le rappeler : la hausse considérable des prix, tant pour l’accession à la propriété que pour la location, est en premier lieu liée à l’insuffisance de l’offre, et c’est sur cela qu’aurait dû se concentrer dès le début l’action du Gouvernement.

En matière de rénovation de logements, où le Gouvernement affichait également l’objectif aussi ambitieux qu’inatteignable de 500 000 rénovations par an selon les nouvelles normes énergétiques, force est de constater un décalage persistant entre l’objectif et la réalité. Selon la dernière enquête de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie – l’ADEME –, 288 000 logements ont été rénovés en 2014, ce qui n’est pas négligeable. Encore faut-il prendre ces chiffres avec précaution, tant il est difficile de déterminer si une rénovation répond véritablement aux objectifs d’économies d’énergies.

À cet égard, le groupe UDI s’inquiète des ressources affectées à l’ANAH, qui ne semblent pas pérennes. Si les recettes tirées de la cession des quotas carbones constituent un mécanisme innovant et intéressant, il demeure en effet insuffisant. Le prix de la tonne de carbone demeure trop bas pour assurer une recette stable et suffisante à l’agence, et il conviendrait peut-être d’affecter d’autres ressources. Cette année, comme en 2016, Action Logement doit encore doubler sa contribution à l’ANAH : 100 millions d’euros, contre 50 millions en 2015.

Pour autant, nous saluons le choix du Gouvernement de proroger des outils utiles, tels le crédit d’impôt pour la transition énergétique, le CITE, et le prêt éco-PTZ – même si ce dernier mériterait d’être simplifié –, qui pourront désormais être cumulés sans conditions. Autre point sur lequel nous sommes partiellement satisfaits : la mise en oeuvre du Fonds national des aides à la pierre. Son objectif, la sécurisation des ressources pour le financement des opérations de développement et d’amélioration du parc de logements locatifs sociaux, est bien entendu louable. Toutefois, il est dommage que la programmation du FNAP pour 2017 ne soit pas encore finalisée : il aurait été bienvenu de faire coïncider la présentation de celle-ci avec l’examen du budget.

Enfin, notre critique la plus sévère porte sur la partie « patrimoine » de la réforme des APL adoptée l’an dernier et actuellement mise en oeuvre. Le dispositif prévu par décret revient à considérer que les livrets d’épargne populaire ont un rendement théorique, fictif, de 3 % par an. Certes, madame la ministre, vous avez rappelé en commission élargie que les méthodes de calcul retenues étaient calquées sur celles existantes pour calculer les droits au RSA. Cette réponse n’est cependant pas satisfaisante : doit-on reprendre une méthode de calcul quand bien même celle-ci devient absurde ? En l’espèce, le taux fictif dépasse très largement le taux réel du livret A. Nous estimons qu’il faudrait retirer purement et simplement les livrets d’épargne populaire de la prise en compte du patrimoine pour le calcul des APL. J’ajoute que l’on pourrait s’interroger sur le concept même de revenus fictifs, qui témoigne certes d’une capacité d’imagination propre à notre pays, mais ne peut être pertinent dans tous les domaines – sûrement pas, en tout cas, dans le cas présent.

Enfin, nous tenons à saluer l’augmentation des crédits consacrés à l’hébergement d’urgence. C’est un geste important, dans un contexte international très difficile et alors que la France se doit d’être solidaire de ses voisins européens en matière d’accueil des réfugiés.

En conclusion, si le Gouvernement a su opérer un changement de cap louable dans sa politique du logement, de nombreuses questions demeurent posées à l’ensemble des acteurs de la construction, tant sur les perspectives que sur les contraintes, notamment réglementaires, qui continuent de peser très lourdement sur leurs activités. Pour ces raisons, le groupe UDI s’abstiendra sur ce budget.

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