Intervention de Lionel Tardy

Séance en hémicycle du 10 novembre 2016 à 15h10
Projet de loi de finances pour 2017 — Gestion des finances publiques et des ressources humaines

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLionel Tardy, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques :

Madame la présidente, madame la ministre, messieurs les rapporteurs spéciaux, monsieur le rapporteur pour avis, mes chers collègues, dans le cadre de l’examen des crédits de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », je veux tout d’abord m’arrêter sur le programme 156, qui évoque la mise en oeuvre du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu prévu à l’article 38 du projet de loi de finances pour 2017 dont nous avons discuté ce matin en commission des finances.

Il s’agit de mettre en place à compter du 1er janvier 2018 une contribution aux charges publiques contemporaine de la perception des revenus.

Selon le Gouvernement, cette réforme permettra d’améliorer la lisibilité pour le contribuable de l’impôt sur le revenu, avec un prélèvement contemporain de la perception des revenus.

Cependant, cette réforme d’ampleur pose de grandes difficultés, pas seulement du fait d’imperfections techniques – nous en avons encore traité ce matin. Mais il y a aussi des difficultés de fond, qui concernent de très nombreux contribuables.

Il y a en particulier le fait que c’est l’entreprise qui sera chargée de prélever le montant de l’impôt et de le reverser ensuite à l’administration fiscale. Ce sont de nouvelles charges, non compensées, pour les entreprises, qui devront adapter leur système de paie, avec un coût élevé de gestion en régime de croisière.

Vous allez me rétorquer que les entreprises prélèvent déjà la CSG. Oui, mais celle-ci n’a pas un taux individualisé comme ce sera le cas de l’impôt sur le revenu. En outre, toutes les entreprises, notamment les plus petites d’entre elles, ne seront pas prêtes à passer à la déclaration sociale nominative – DSN –, qui doit être généralisée au 1er juillet 2017.

La confidentialité des informations personnelles des contribuables – patrimoine, revenus du conjoint, etc. – est une autre difficulté fondamentale. Là encore, vous me répondrez que le contribuable pourra demander un taux neutre. Certes, mais cela fera forcément naître la présomption que le salarié concerné dispose d’autres revenus qu’il cherche à occulter.

Notre administration fiscale a déjà développé des outils très perfectionnés pour la collecte de l’impôt. Le taux de recouvrement de l’impôt sur le revenu atteint en 2015 plus de 98 %, c’est l’un des plus élevés au monde. L’imposition contemporaine du revenu aurait dès lors pu être atteinte plus simplement à travers la mensualisation obligatoire et un calcul plus rapide des versements mensuels.

Je veux ici réaffirmer la forte opposition du groupe les Républicains à une réforme qui va créer beaucoup plus de difficultés qu’elle n’en résout.

Concernant les économies à réaliser sur la masse salariale, nous regrettons que ce gouvernement n’ait pas maintenu la RGPP, cette révision générale des politiques publiques, qui avait le mérite de donner à notre administration lisibilité et efficacité en diminuant les budgets de masse salariale.

Rappelons ici que la mesure phare de la RGPP a été le non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux dans les ministères. Elle a dégagé une économie de plus de 4 milliards d’euros sur la période 2008-2012, équivalente à 5 % de la masse salariale de l’État. Cette politique a aussi permis une baisse des effectifs de 144 000 équivalents temps plein.

Depuis 2012, la masse salariale est repartie à la hausse. La France est ainsi le seul pays de l’Union européenne à avoir augmenté sa masse salariale publique en volume depuis 2010. Les autres pays, quelle que soit la sensibilité politique de leur gouvernement, l’ont réduite, certains, considérablement, comme les Pays-Bas, l’Italie ou encore le Royaume-Uni.

Le candidat François Hollande faisait la promesse à l’époque que le nombre total des fonctionnaires de l’État n’augmenterait pas. Dans le projet de loi de finances pour 2017, le Gouvernement prévoit pourtant la création de 14 000 postes dans la fonction publique d’État. Le bilan de l’actuel chef de l’État se solde quant à lui par la création de près de 30 000 postes sur le quinquennat.

L’exécutif brandit désormais cet étendard pour montrer les efforts faits en matière de sécurité. Toutefois, l’affectation des moyens humains à la sécurité civile et militaire imposerait au moins de renoncer à l’objectif démagogique des 60 000 créations de postes dans l’éducation nationale. Au lieu de cela, votre majorité n’a cessé de créer des postes de fonctionnaires.

Votre majorité a aussi supprimé le jour de carence sans prévoir de dispositif alternatif. Il en est résulté une remontée immédiate de l’absentéisme de courte durée dans la fonction publique. Cette abrogation a été un très mauvais signal mettant à bas l’idée selon laquelle l’effort n’est juste que s’il est partagé.

Au-delà, nous défendons une gestion beaucoup plus dynamique de la fonction publique, rémunérant davantage la performance, avec des effectifs adaptés aux missions de l’État dont le périmètre serait redéfini. Avoir des fonctionnaires moins nombreux, mais mieux payés et travaillant sans doute plus longtemps, doit être un chantier à mener dans les prochaines années. C’est ce que nous nous attacherons à faire, si nous parvenons à obtenir une nouvelle majorité.

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