Intervention de Patrick Kanner

Séance en hémicycle du 15 novembre 2016 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2017 — Mission politique des territoires

Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports :

Au préalable, je veux répondre à M. Benoit qui s’était ému de la baisse des crédits de la mission « Politique des territoires ». Mais, M. Baylet l’a rappelé dans son propos liminaire, que cette baisse n’était qu’apparente car elle reflète le changement de portage opéré sur la compensation d’exonération de charges en zone franche urbaine. Ces 12 millions d’euros de crédits en moins n’ont pas d’effet sur la capacité d’intervention qui est la nôtre en matière de politique de la ville : je tiens à vous rassurer, monsieur le député. J’ajoute qu’en trois ans, nous avons rétabli tous les crédits qui avaient été supprimés dans une époque précédente, ce qui pénalisait le secteur associatif.

La cohérence du budget que je défends repose sur un volet « habitat » et « renouvellement urbain » très ambitieux. Notre ambition vise la transformation physique, en profondeur, des quartiers prioritaires de la politique de la ville. Le 2 octobre 2015, nous avons signé une convention avec Action logement et l’ANRU qui permet de financer ce Nouveau programme national de renouvellement urbain sur des bases consensuelles jusqu’en 2031.

Lorsque nous sommes arrivés aux affaires en 2012, je tiens à le rappeler aux députés de l’opposition ici présents, nous avons trouvé une situation extrêmement fragile s’agissant du financement de l’ANRU. Nous avons réussi à mener à bien les engagements pris par M. Borloo que je tiens à saluer pour l’action qui a été la sienne, mais dont les financements étaient pour le moins aléatoires.

Le projet de loi « Égalité et citoyenneté » en cours de discussion donne de nouveaux outils pour lutter contre les logiques de ségrégation : je citerai l’attribution de 25 % de logements sociaux en dehors des quartiers prioritaires de la ville aux 25 % des ménages les plus modestes. Il s’agit de favoriser un parcours résidentiel, de ne pas faire de ces quartiers une forme de prison sans barreaux dans lesquels les personnes ne pourraient pas évoluer naturellement.

²Je souhaiterais, mesdames, messieurs les députés, vous sensibiliser sur les effets qu’auraient les modifications substantielles, envisagées en commission des finances, des dispositifs d’exonération sur la TFPB, la fameuse taxe foncière sur les propriétés bâties. J’entends les arguments financiers en défaveur de cette exonération de TFPB. Pour autant, faut-il noircir à l’excès ce dispositif, cette situation ?

Il ne s’agit pas pour nous de stigmatiser, mais uniquement de cibler les bailleurs sociaux qui ne joueraient pas le jeu. J’entends trop de maires – et j’en parlais récemment avec un maire, qui se reconnaîtra dans cette assemblée –, se plaindre de ne pas savoir ce que devient l’argent lié à cette exonération. Cet argent doit revenir aux quartiers qui ont permis sa création. À cet égard, je souhaite que nous puissions être en symbiose sur cette question importante. En tout état de cause, c’est ce que nous allons faire par le biais d’une disposition que nous avons adoptée dans le cadre du projet de loi « Égalité et citoyenneté ». Je souhaite que la concertation puisse constituer une réponse adaptée et par transposition de la méthode qui a été retenue pour réformer le dispositif des zones franches urbaines – méthode qui a permis de faire bouger les territoires entrepreneurs –, nous pouvons envisager de faire des avancées sur la bonne utilisation des fonds de cette exonération de la TFPB. C’est la proposition que nous avons faite avec Hélène Geoffroy au Premier ministre.

Il m’apparaît également important de dire que nous voulons bâtir un nouveau projet dans les quartiers populaires. Nous avons bien entendu évoqué l’appel porté par de nombreux acteurs, bailleurs, collectivités locales. Si nous sommes en mesure de porter ce programme au-delà des 5 milliards d’euros apportés par l’ANRU, c’est-à-dire au-delà des 20 milliards d’euros tous financeurs confondus en termes de travaux effectifs, nous disposerons d’une capacité accrue de répondre aux besoins des habitants des quartiers.

« Action logement » souhaite financer le logement et se plaignait de devoir utiliser son argent pour des opérations de service public et d’équipements publics qui ne relevaient pas totalement de son autorité. Nous avons entendu ce message et le 27 octobre dernier, François Hollande et le Premier ministre ont fait des annonces au congrès de l’Union sociale pour l’habitat. C’est un geste fort que nous allons engager par le biais de l’amendement no 479 et l’amendement no 480 , qui viendra ultérieurement dans la discussion.

Le premier prévoit 1 milliard d’euros au bénéfice du Nouveau programme national de renouvellement urbain lequel sera porté de 5 à 6 milliards d’euros. Le second concrétise, dès 2017, les autorisations d’engagement et les crédits de paiement correspondants prévoyant 100 millions d’euros qui seront rattachés au programme 147 « Politique de la ville ». Voilà des moyens concrets pour permettre aux quartiers d’évoluer favorablement.

Nous revenons ainsi à l’esprit de la loi de 2009 avec un retour de l’État. Il n’était pas normal que l’État quitte la table des financeurs, en 2009, s’agissant du financement de l’ANRU. Nous voulons amplifier notre action en faveur des équipements structurants pour faire de ces quartiers, non des quartiers de ville, mais des quartiers de vie pour leurs habitants et lutter contre toute forme de stigmatisation. La rénovation des quartiers doit être complète : rénovation, réhabilitation, démolition lorsque c’est nécessaire. Il faut construire des écoles, des équipements culturels et sportifs. Bref, des outils qui permettent de vivre dans de bonnes conditions et faire en sorte que la fierté et la dignité reviennent dans ces quartiers. Aussi, je vous invite à adopter ces deux amendements qui vont dans le sens souhaité par les six millions de nos concitoyens qui habitent dans les quartiers prioritaires de la politique la ville.

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