Intervention de Gérard Bapt

Séance en hémicycle du 15 novembre 2016 à 21h30
Projet de loi de finances pour 2017 — Mission santé

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGérard Bapt :

Il ne s’agit pas ici de l’effet indésirable d’un médicament sur un organisme, qui cause des dégâts personnels, mais de dégâts familiaux. Ils sont certes sériels, comme pour le Mediator, mais cette affaire n’a rien à voir, notamment en ce qu’aucune obstruction par l’industrie n’a été prouvée – encore que l’instruction judiciaire fera la lumière sur ce point. Elle s’en rapproche cependant par la durée pendant laquelle ces effets indésirables n’ont pas été repérés, ni les alertes, lancées dès les années 1980 pour les malformations et dans les années 1990 pour les troubles du développement neurocognitif, prises en compte. Il ne faut pas non plus oublier les morts in utero, lorsque les malformations du foetus sont massives.

Comme moi, vous avez sûrement rencontré des familles concernées, avec parfois plusieurs enfants souffrant non seulement de malformations physiques, mais aussi de troubles du comportement pouvant aller jusqu’à l’autisme. Je pense aussi aux dégâts familiaux : on sait par exemple que les divorces sont presque deux fois plus fréquents dans les familles concernées par l’autisme. C’est dire la souffrance des parents, et encore plus lorsque plusieurs enfants sont atteints. Les familles ont découvert le rôle joué par la Dépakine soit par hasard sur internet – c’est ce qui est arrivé à la présidente de l’APESAC, qui a oeuvré de manière admirable pour diffuser cette alerte – soit à l’occasion d’un dépôt de plainte, soit en recevant par exemple le résultat d’études pharmaco-épidémiologiques visant à évaluer le nombre de cas et de familles concernés. Bref, nous parlons d’un drame social au moins aussi important que celui du Mediator.

Par ailleurs, madame la ministre, je veux saluer la façon dont vous avez travaillé, en concertation avec les familles des victimes, en particulier avec l’APESAC. L’amendement que vous nous présentez ce soir a fait l’objet d’un long travail, y compris avec les conseillers juridiques de cette association.

Il y a quand même un point sur lequel je souhaite vous entendre, madame la ministre. Mme Batho a évoqué tout à l’heure un sous-amendement déclaré irrecevable au titre de l’article 40 et qui visait à préciser que l’indemnisation concerne non seulement la victime, c’est-à-dire l’enfant, éventuellement devenu adulte, mais aussi les personnes du contexte familial et médico-social. Certes, nous allons indemniser un dommage. Mais nous parlons d’un médicament indûment prescrit pendant une longue durée, sans information des médecins ni des familles. Pour ces dernières, dont certaines doivent assurer l’éducation et le destin d’enfants autistiques, serait-il juste et solidaire d’indemniser le seul préjudice de la victime ? Ne devons-nous pas faire preuve d’une solidarité particulière à leur endroit ? La justice nous dira quelles sont les responsabilités engagées et comment elles sont partagées.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion