Intervention de Jérôme Bonnafont

Réunion du 25 octobre 2016 à 17h00
Commission des affaires étrangères

Jérôme Bonnafont, directeur d'Afrique du Nord et du Moyen-Orient au ministère des affaires étrangères et du développement international (MAEDI), sur l'Irak, la Syrie et l'initiative française de paix au Proche-Orient :

Non, ce n'est pas la guerre, monsieur le ministre, c'est le régime politique. Cela a commencé en 2011, je vous le rappelle, par des manifestations parfaitement pacifiques qui ont été réprimées dans le sang. Tous les alliés arabes de Bachar Al-Assad lui ont conseillé de négocier avec les manifestants et d'organiser un semblant d'évolution politique. Jamais, a-t-il répondu à tous. Et il a lancé la répression aveugle qui a conduit à la situation actuelle.

Il existe une opposition dont vous dites qu'elle est constituée de salonards parisiens. Je vous laisse la responsabilité de cette affirmation. Cette opposition, rassemblée dans une coalition compliquée à mettre en place, s'est dotée d'un document politique qui exprime l'aspiration à une Syrie unie qui respecte ses minorités et les croyances de chacun. C'est un document politique extrêmement important.

Pour notre part, nous avons conduit notre politique selon deux principes : concentration de nos moyens militaires sur Daech ; absence totale de complaisance à l'égard de l'ex-Jabhat al-Nosra, groupe listé parmi les organisations terroristes par l'ONU. Au sein du groupe international de soutien, nous avions même commencé à faire avec la Jordanie un travail visant à trouver un consensus sur la nature de chacun des groupes. Les Russes et les Iraniens n'ont pas voulu poursuivre ce travail, ce qui est assez dommage.

En ce qui concerne la CPI, nous avons engagé une réflexion sur ces crimes de guerre commis à Alep. Là encore, l'expression est celle du secrétaire général de l'ONU et non pas la nôtre. Bombarder systématiquement des infrastructures civiles dans une ville, cela s'appelle un crime de guerre et non un acte de guerre. Ce crime est condamné par les conventions de Genève et donne lieu à des poursuites devant la CPI. Nous avons engagé une réflexion qui n'est pas évidente : d'une part, la Syrie n'est pas partie aux statuts de la CPI ; d'autre part, un ou même deux pays opposeront leur veto au conseil de sécurité sur cette hypothèse. Il faut réfléchir à la manière de s'y prendre.

S'agissant d'une éventuelle mise en cause de la France devant la CPI, je vous rappelle ce que le ministre et d'autres membres du Gouvernement ont eu l'occasion de vous dire à plusieurs reprises sur les règles d'engagement de nos forces dans le combat contre Daech. Ces règles sont extraordinairement rigoureuses en ce qui concerne l'attention portée à éviter des pertes civiles, à éviter des objectifs civils, y compris dans l'hypothèse où il y aurait une « prise en otage » de la part des groupes terroristes.

1 commentaire :

Le 06/02/2017 à 23:21, chb17 a dit :

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On ne peut pas s'attendre à ce que le ministère d'un pays en guerre contre la Syrie soit honnête et objectif en s'adressant à ses parlementaires. Aussi comprend-t-on la part de la comm' de guerre dans ses propos.

Ce qu'il appelle "communauté internationale", ce n'est que l'OTAN et ses alliés. Les crimes imputés au seul "régime" syrien sont, depuis 2011, plus répartis que ce qu'en dit M.Bonnafont. Le président syrien est élu, et populaire dans une large partie de son pays. Un dossier en CPI ne pourra prospérer si l'on s'en tient à sa charte : il s'agit exclusivement d'un acte d'intimidation de la part du Quai. Etc. Diabolisation cynique, dans l'optique de "virer al Assad" malgré tout.

Par ailleurs, les "règles extraordinairement rigoureuses en ce qui concerne l'attention portée à éviter des pertes civiles" n'ont pas empêché des massacres collatéraux, de notre fait, dans un pays... souverain. C'est la guerre, cruelle et souvent criminelle !

Veut-on toujours l'installation au pouvoir à Damas de bandes d'assassins sectaires que nous avons aidés et armés - en violant la Charte de l'ONU ? ?

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