Intervention de Jean-Jacques Urvoas

Séance en hémicycle du 24 juillet 2012 à 15h00
Harcèlement sexuel — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République :

La deuxième observation, c'est que cette QPC n'est pas sans incidence sur notre travail de législateur. Je passe sur le fait que, dans le cas d'espèce, nous sommes contraints de légiférer selon la procédure accélérée. Les ministres ont bien voulu indiquer que cette procédure devait être une exception et non un parti à suivre tout au long de la législature. Un vide juridique préjudiciable devait être comblé, et nous avons accepté, de bonne grâce, de nous plier à une procédure que le Parlement n'aime guère : en empêchant les navettes, elle ne lui permet pas, en effet, d'enrichir les textes au fur et à mesure des lectures.

Si j'ai souhaité parler de la QPC dans le travail parlementaire, c'est que je crois qu'il faut nous interroger sur la saisine du Conseil à l'issue d'une inconstitutionnalité prononcée. Nous travaillons aujourd'hui pour combler un vide. Nous avons eu en commission des lois un débat dont chacun a souligné la richesse et je ne doute pas que, ce soir, le débat ne soit de même qualité, mais aucun d'entre nous ne peut affirmer que les mots que nous allons choisir ne présenteront pas d'ambiguïté et qu'une autre question prioritaire de constitutionnalité ne ferait pas demain tomber à nouveau les actions engagées par des victimes, comme cela a été le cas pour celles dont nous avons tous à l'esprit le drame qu'a représenté pour elles l'annulation par le Conseil constitutionnel de l'article que nous allons remplacer.

Nous pouvons donc parfaitement défendre l'idée, au nom de la sécurité juridique, qu'il faille systématiquement saisir le Conseil constitutionnel quand nous avons à corriger une inconstitutionnalité. L'argument s'entend. Il ne s'agit pas d'aller à l'encontre de l'indépendance du Parlement, qui agit dans le respect de la Constitution. Ce respect n'est pas une atteinte à notre indépendance, puisque nous pourrions gagner à être éclairés sur cet aspect. Dans le cas présent, il existe des éléments qui conduisent à s'interroger. Plaider pour une saisine est donc parfaitement défendable, comme une précaution prise dans l'intérêt même des victimes et de la Constitution.

En même temps, que resterait-il de la souveraineté du Parlement si nous donnions le sentiment de demander la permission au Conseil constitutionnel ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.) Quelle image donnerions-nous si nous laissions entendre que nous ne pouvons plus décider sans autorisation préalable ? Ce n'est quand même pas le rôle du Conseil constitutionnel de délivrer un imprimatur au Parlement.

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