Intervention de Gilles Lurton

Réunion du 22 novembre 2016 à 21h45
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGilles Lurton :

Cette proposition de loi représente la concrétisation des quarante mesures proposées par le comité de suivi de la stratégie nationale de gestion intégrée du trait de côte, mis en place en 2015 et dont les propositions visent à adapter les territoires littoraux au changement climatique. Je souhaite donc tout d'abord saluer le travail accompli depuis un an par le comité de suivi.

Nos 11 millions de kilomètres carrés de littoral constituent un véritable atout pour la France. Notre devoir est de les préserver au mieux des risques qui les menacent. En ce sens, si elle est souvent décriée compte tenu de son manque de souplesse, la loi du 3 janvier 1986 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral, dite loi Littoral, a quand même permis de protéger notre littoral de façon exemplaire.

Élu du littoral, je constate régulièrement que le recul de côte devient un véritable risque naturel, qui doit faire l'objet d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles. Mais je suis très réservé sur ces textes quelque peu parisiens, qui appliquent les mêmes mesures à l'ensemble du littoral, alors que chacune de nos côtes est différente. Les plans de prévention contre les risques de submersions marines imposés de façon identique à l'ensemble du littoral français à la suite de la tempête Xynthia de février 2010 ont des effets désastreux, économiquement parlant, pour des littoraux qui sont bien différents de celui qui a été frappé en Vendée. Dans la circonscription de Saint-Malo et de la baie du Mont-Saint-Michel, où la mer ne cesse de reculer, nous sommes extrêmement contraints par des mesures de protection, alors que nous savons très bien que, en raison de l'avancée du trait de côte, les risques évoqués ne se produiront vraisemblablement jamais. Vous comprendrez dès lors mes réserves sur un nouveau texte qui viendrait aggraver ces contraintes, même si je suis parfaitement conscient qu'aujourd'hui des risques existent en de nombreux endroits.

En outre, l'application de certaines des mesures proposées suscite quelques interrogations. L'article 3 prévoit ainsi que les plans de prévention introduisant les ZAART et les ZMTC seront identifiés par le préfet. Il pourra, dans les ZAART, imposer des contraintes de construction temporaire ou des garanties financières de démolition au cas où le risque de recul de côte se réaliserait. Les ZMTC lui donnent la possibilité d'interdire tout ouvrage de défense contre la mer, dès lors établi en dehors de l'exercice de la compétence de la GEMAPI.

Or, la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations sont des compétences confiées aux intercommunalités par les lois de décentralisation du 27 janvier 2014 et du 7 août 2015, à compter du 1er janvier 2018, avec possibilité d'anticiper dès maintenant. Un certain nombre d'intercommunalités, comme celle à laquelle j'appartiens, ont d'ailleurs déjà pris la compétence GEMAPI, se substituant ainsi aux actions préexistantes des collectivités territoriales et de leurs groupements, actions qui étaient jusqu'alors facultatives et non uniformément présentes sur les territoires exposés au risque d'inondation ou de submersion marine. Je souhaiterais que la rapporteure précise le caractère facultatif ou obligatoire, les compétences et les pouvoirs réels du préfet par rapport aux intercommunalités dans la détermination de ces deux zonages ainsi que l'exercice des prérogatives y afférentes.

Une autre problématique réside dans le financement de la prévention et de l'indemnisation des dommages. L'article 13 prévoit le maintien temporaire du fonds de prévention des risques majeurs pour les appropriations de biens liées aux mouvements de terrain côtiers. Il prévoit également, dans le cadre d'un bail immobilier littoral, le financement des pertes relatives à un recul de côte ou le financement de la part d'acquisition de biens exposés à un risque inférieur à dix ans. Or, au plus tard au 1er janvier 2022, le fonds de prévention ne prendra plus en charge l'appropriation des biens soumis au risque du recul de trait de côte.

Tout cela nous semble complexe, sujet à interprétation et à des risques de contentieux. Je souhaiterais donc obtenir des précisions sur cet article.

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