Intervention de Bernadette Laclais

Séance en hémicycle du 28 novembre 2016 à 16h00
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBernadette Laclais :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, madame la présidente de la commission, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, à ce stade de la discussion en nouvelle lecture, et après plusieurs interventions de mes collègues, je m’en tiendrai, pour ce qui me concerne, à l’article 10.

Hier stable, ou en lente mutation, notre environnement économique est aujourd’hui ouvert aux innovations numériques, ainsi qu’à l’économie dite collaborative. Cette dernière a, au cours de ses balbutiements – les uns partagent leur tondeuse, leur caravane, les autres louent à des hôtes de passage une chambre chez eux ou, pour quelques jours, dans leur résidence secondaire –, échappé aux contraintes du financement de nos régimes sociaux.

Or s’il est utile de laisser émerger de nouvelles formes d’économie, il est tout aussi indispensable de mettre rapidement en place un cadre juridique et social susceptible de garantir une concurrence aussi loyale et équitable que possible entre ces nouvelles activités et l’économie plus traditionnelle.

Nous avons eu, l’an dernier, des débats sur l’ubérisation de la société. L’article 10 de ce PLFSS concerne plutôt les plateformes de location de biens immobiliers et les conséquences de leur développement sur l’ensemble de notre territoire.

Certaines de ces conséquences sont d’ailleurs très positives : tous les hébergements y gagnent une visibilité accrue qui, pour n’être pas gratuite, est de dimension planétaire.

Mais certains de nos sites touristiques majeurs, et notamment notre capitale, voient aussi se développer une professionnalisation de cette économie supposée collaborative. Le fait de proposer en permanence, et nuitée après nuitée, plusieurs appartements en location n’a en effet plus rien de commun avec le partage d’une résidence secondaire à destination d’un hôte occasionnel : il s’agit d’un nouveau métier, qui concurrence aussi bien les formes existantes d’hébergement que la location annuelle, jugée moins rentable et trop encadrée.

Nous devons donc adapter notre législation non seulement pour consolider le financement de notre modèle social, mais aussi pour garantir aux acteurs économiques traditionnels la concurrence équitable à laquelle nous sommes attachés.

Depuis le début de cette législature, la lutte contre la fraude fiscale, la fraude aux cotisations sociales et le travail dissimulé constituent des priorités affichées et suivies d’effets. L’équité, l’égalité passent aussi par des contrôles accrus, afin que tous les acteurs économiques jouent au même jeu avec les mêmes règles. Les hôteliers, par exemple, sont attentifs à ce que tous les hébergeurs soient peu ou prou soumis aux mêmes contraintes et à ce qu’ils soient tenus d’offrir aux touristes et aux visiteurs les mêmes garanties de qualité.

Nous devons, donc, adapter notre législation, mais avec efficacité, sans générer d’effets pervers qui seraient plus graves que le mal initial. Tout le travail fait autour de l’article 10 de ce PLFSS vise à atteindre un tel objectif sans pour autant décourager l’émergence de nouvelles formes d’activités, qui ont aussi leurs avantages.

Soyons cependant attentifs à l’ensemble de la problématique. Il y a quelques semaines, je défendais en tant que rapporteure le projet de loi de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne, c’est-à-dire l’acte II de la loi montagne, un texte porteur d’engagements environnementaux et économiques forts. L’objectif d’une politique touristique en montagne est de parvenir à mettre en location la plus grande partie du parc existant – ce ce que l’on appelle la lutte contre les « lits froids » –, mais aussi de réorienter certains dispositifs fiscaux – comme celui dit « Censi-Bouvard » – vers la rénovation. Une telle politique a des vertus environnementales, puisqu’elle permet de lutter contre l’étalement urbain, mais il importe, pour qu’elle réussisse, que le cadre législatif et social ne dissuade pas les propriétaires de louer leurs biens : il faut donc savoir faire simple, clair et efficace.

Or la rédaction actuelle de l’article 10 a poussé un grand nombre d’acteurs – des gîtes ruraux aux agences immobilières de montagne – à monter au créneau pour nous alerter sur le flou des mesures envisagées. En voulant bien faire, nous avons inquiété l’économie traditionnelle. À quelques jours de l’ouverture des stations de montagne, la profession s’est ainsi inquiétée des débats entre l’Assemblée et le Sénat relatifs au seuil de revenus à retenir pour considérer une activité de location immobilière comme professionnelle.

De même, des précisions sont attendues s’agissant des revenus réellement soumis à cotisation sociales. L’assiette recouvre-t-elle les recettes ou le bénéfice ? En précisant ce point, l’amendement no 229 déposé par le Gouvernement me semble en mesure de rassurer les loueurs, qu’ils soient ou non professionnels.

L’exercice de clarification auquel nous allons nous livrer rendra notre législation plus équitable et favorisera le développement de l’activité économique et touristique dans notre pays. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, de l’avoir permis en vous montrant particulièrement à l’écoute de l’ensemble des acteurs.

Reste à bien définir le champ d’application du dispositif : a t-il vocation à s’appliquer dans les seules zones rurales ou sur l’intégralité du territoire national ? Le sous-amendement que j’ai déposé nous permettra, je l’espère, d’en débattre et de compléter les avancées que constituent d’ores et déjà les précisions que vous avez, monsieur le secrétaire d’État, données tout à l’heure ainsi que l’amendement que vous avez présenté.

Je le répète, une clarification s’imposait pour être fiscalement et socialement efficace. Les lois doivent en effet être simples, non sujettes à interprétations, et favoriser l’activité économique. Je crois que nous sommes en voie d’atteindre cet objectif.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion