Intervention de Dominique Lefebvre

Séance en hémicycle du 5 décembre 2016 à 16h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2016 — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure générale de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État chargé du budget et des comptes publics, monsieur le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, mes chers collègues, nous engageons la discussion de la dernière loi de finances de cette législature, une loi de finances rectificative pour l’exercice 2016.

Je le dirai d’emblée, comme vous, monsieur le secrétaire d’État : quoi qu’en aient dit les Cassandre, les engagements pris dans la loi de finances initiale auront été tenus. C’est donc pour moi l’occasion de souligner à quel point ce quinquennat aura été le quinquennat du sérieux budgétaire et du redressement des comptes publics ; bref, de la responsabilité.

Je voudrais vous rappeler quelques chiffres que l’opposition feint généralement d’oublier. Nous avions en 2012 hérité d’un déficit public, toutes administrations publiques confondues, supérieur à 5 % du PIB, soit 105 milliards d’euros ; d’une situation, qui s’est prolongée deux quinquennats durant, dans laquelle les dépenses publiques croissaient de 3,6 % par an ; d’un déficit du régime général de la sécurité sociale hors Fonds de solidarité vieillesse de 13,3 milliards d’euros. J’ai même le souvenir d’avoir entendu un Premier ministre dire dès 2007 – et cela ne s’est pas arrangé ensuite – qu’il était à la tête d’un État en faillite. Voilà l’héritage que nous avions reçu de la précédente majorité : tel était l’état de nos finances publiques voilà maintenant cinq ans.

Année après année, le Gouvernement, en lien avec notre majorité, a oeuvré pour le redressement de nos finances publiques tout en finançant nos priorités en faveur de l’emploi, de l’éducation et de la jeunesse. Nous avons également lancé un plan de grande ampleur de baisse du coût du travail pour les entreprises, avec en particulier le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, tout en améliorant le caractère redistributif de notre système fiscal pour plus de justice sociale.

Tout ceci n’avait pas été fait dans notre pays jusqu’alors. Et les résultats sont là aujourd’hui : d’aucuns diront qu’ils sont insuffisants, mais ils sont là.

En 2016, le déficit public sera de 3,3 points de PIB, conformément à l’engagement pris en loi de finances initiale et à la trajectoire tracée dans la loi de programmation des finances publiques que nous avons adoptée en 2014 ; et je crois que nul ici ne conteste aujourd’hui ce chiffre – n’est-ce pas, monsieur le président de la commission des finances ? –, qui a en tous les cas été jugé crédible tant par le Haut conseil des finances publiques que par la Commission européenne, comme vous l’avez rappelé, monsieur le secrétaire d’État.

En 2017, le régime général de la sécurité sociale sera à l’équilibre et le déficit public en dessous de la barre des 3 %. C’est ce qu’a confirmé la Commission européenne, écartant de ce fait les doutes émis au début de l’automne par le Haut conseil des finances publiques, et c’est bien loin des 4,7 % prévus par le programme du candidat issu des primaires de la droite et du centre.

La comparaison des bilans est donc cruelle pour l’opposition. Celle des promesses de campagne pourrait également l’être. Avec la droite, le déficit public avait progressé de 55 milliards d’euros entre 2007 et 2011. Avec la gauche, le déficit public a baissé de 40 milliards d’euros en cinq ans. Avec la droite, le déficit public reviendrait en 2017 à son niveau de 2012, effaçant cinq années de bonne gestion de nos comptes publics. Avec la gauche, la France sortira de la procédure de déficit excessif en 2017. La droite a accumulé 900 milliards d’euros de dette entre 2002 et 2012. La gauche aura réussi à stabiliser le ratio de la dette publique.

Oui, ainsi que je l’ai dit dans l’exercice d’autres fonctions dans cet hémicycle, la gauche gère mieux les finances publiques que la droite dans ce pays : c’est un fait désormais durablement établi. Et c’est au moment où nos finances publiques sont enfin redressées que la droite propose de laisser à nouveau filer les déficits, de détruire notre modèle social et de mettre à mal nos services publics.

Ce projet de loi de finances rectificative est donc à l’image du quinquennat. Nous atteignons nos objectifs, et faisons même mieux que prévu. Comme en 2015, l’exécution est meilleure que la prévision sur le budget de l’État. Je rappelle que le déficit budgétaire prévu en loi de finances initiale était alors de 74,4 milliards d’euros ; il atteint 70,5 milliards d’euros en exécution. En 2016, le solde budgétaire de l’État sera amélioré de 2,4 milliards d’euros par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale.

Ce résultat a été obtenu alors même que nous avons décidé d’engager de nouvelles dépenses au cours de l’exercice actuel : plan d’urgence pour l’emploi, plan de soutien exceptionnel aux agriculteurs, mesures en faveur des jeunes, augmentation du point d’indice dans la fonction publique, création d’un fonds d’urgence pour les départements, surcoûts liés aux opérations extérieures et aux opérations intérieures menées par le ministère de la défense, apurements communautaires agricoles, montée en charge plus rapide que prévu de la prime d’activité.

Les normes de dépenses de l’État seront pourtant à nouveau tenues en 2016, car nous avons eu le courage de financer ces nouvelles dépenses, celles que nous avons choisies et celles qui nous ont été imposées par les circonstances, notamment le contexte international, en les gageant sur de nouvelles économies.

Ces redéploiements de crédits entre ministères ont fait l’objet de trois décrets d’avance qui ont été examinés au cours de l’exercice par notre commission des finances, y donnant chaque fois un avis favorable.

Je voudrais d’ores et déjà répondre aux propos que pourraient tenir le président de la commission des finances, puisqu’il les répète, ou d’autres collègues. Il y a bien sûr, comme chaque année, des économies non pérennes ; il y a toutefois également des dépenses non pérennes. Les premières sont souvent des économies sur la charge de la dette. Cependant, si nous pouvons réaliser de telles économies, c’est parce que nous avons établi une prévision extrêmement prudente en loi de finances initiale. Nous aurions pu inscrire d’autres crédits alors, mais nous ne l’avons pas fait. Nous utilisons donc ces aléas de gestion, que vous connaissez bien, monsieur le président de la commission, vous qui avez été rapporteur général du budget pendant dix ans, mais cela ne veut pas dire que cette situation pourrait se reproduire. Nous savons très bien en effet quel risque il y aurait à laisser dériver la dette, car les taux remonteront un jour. Ces éléments illustrent donc davantage la prudence de nos prévisions que des artifices de fin de gestion, et vous ne sauriez blâmer un tel comportement.

Je ne mentionnerai qu’une dépense non pérenne ; elle a déjà été évoquée, et vous avez vous-même admis, monsieur le président de la commission des finances, que son effet sur le solde budgétaire était neutre. Il s’agit du renforcement des fonds propres de l’Agence française de développement. Cela représente 2,4 milliards d’euros d’ouvertures de crédits sur les 5,4 milliards d’euros prévus dans le projet de loi de finances rectificative. Je le précise, car j’ai entendu parler, ici ou là, de 7 milliards d’euros de dépenses nouvelles. Il ne s’agit que des épures habituelles ; elles sont peut-être un peu accentuées au regard des circonstances dont j’ai parlé, mais leur niveau reste acceptable, en particulier s’agissant des dépenses non reconductibles. Les ajustements de fin de gestion ne sont donc guère plus importants que d’habitude.

Le propre de la bonne gestion consiste précisément à prendre en compte ces éléments imprévus ou exogènes et à les intégrer dans la construction du budget afin de tenir la trajectoire que l’on se fixe. C’est ce que nous faisons depuis près de cinq années, comme l’illustre ce dernier projet de loi de finances rectificative. Nous verrons bien ce qui se passera en 2017, monsieur le président de la commission des finances, mais annoncer autant que vous le faites que le déficit ne sera pas tenu en 2017 et qu’il dérapera exonère à l’avance le prochain gouvernement des efforts qu’il convient habituellement de faire en cours de gestion pour tenir ses objectifs !

Tel est le danger : profiter d’une alternance pour tout mettre sur le dos de ses prédécesseurs tout en s’affranchissant de la rigueur de gestion qu’il est pourtant parfaitement possible d’atteindre !

C’est ce que nous avons fait et bien fait, depuis cinq ans, en termes de dépenses. Ce projet de loi finances rectificative, non seulement prend acte des orientations de notre majorité à propos de la trajectoire de redressement des comptes publics, mais comprend également un important volet relatif aux procédures fiscales. Je rappelle que la lutte contre l’évasion fiscale est un objectif à valeur constitutionnelle. De nouvelles procédures, plus rapides, moins intrusives et mieux adaptées au contexte des entreprises sont créées. Des aménagements sont prévus afin de faciliter les investigations de l’administration fiscale tout en préservant les garanties accordées au contribuable. La notion de bien professionnel est précisée afin de lutter contre l’optimisation abusive en matière d’ISF. La sanction du délit de non-déclaration de compte à l’étranger est renforcée. Nous débattrons de ces mesures et procéderons probablement à quelques ajustements en dialoguant avec le Gouvernement, mais elles vont dans le bon sens.

Afin de tenir compte des jurisprudences constitutionnelles et européennes, le projet de loi de finances rectificative prévoit également une extension de l’exonération de la taxe à 3 % sur les dividendes des filiales détenues à 95 % par des groupes étrangers et une mise en conformité du régime mère-fille. Il fallait procéder à ces ajustements au profit de la neutralité budgétaire. Même si nous en débattrons, nous soutiendrons cette mesure. La mise en place d’un compte PME innovation dépourvu de plafond constitue la mesure fiscale majeure du PLFR. Nous aurons l’occasion d’en débattre et avons déjà adopté certains amendements et procédé à des auditions en commission. Ce dispositif de report de l’imposition des plus-values incitera les entrepreneurs vendant une société à réinvestir le produit de leur vente dans des jeunes PME ou des entreprises innovantes.

Il faudra veiller à l’articulation du dispositif pour lui donner toute sa force sans pour autant ouvrir la porte à des optimisations fiscales, mais il ne faut pas que cette préoccupation l’empêche de prendre toute son ampleur. Les cibles seront les PME de moins de sept ans et de moins de dix ans si elles sont innovantes. Je ne doute pas que la discussion qui s’engage permettra d’améliorer encore le dispositif. Nous discuterons également d’autres mesures fiscales comme l’exonération facultative de contribution économique territoriale des disquaires indépendants ou encore de la trajectoire de la composante « Déchets » de la taxe générale sur les activités polluantes.

Enfin, nous autoriserons trois nouvelles garanties de l’État, l’une, habituelle, à l’Unédic et deux autres à des projets industriels situés en Nouvelle-Calédonie. Même s’il faut être vigilant sur ce point, ces garanties semblent essentielles au soutien à l’activité économique et à la préservation de l’emploi dans ce territoire. Ainsi, le PLFR illustre le redressement de nos finances publiques. Il est riche et nous l’enrichirons encore au cours de notre discussion ! Notre commission a d’ailleurs commencé à l’enrichir en examinant mercredi dernier 255 amendements, dont 66 ont été adoptés. Les amendements adoptés précisent et rééquilibrent certaines mesures relatives au contrôle fiscal, notamment les articles 13 et 14, et proposent des évolutions, par exemple du compte PME innovation.

Certains de ces amendements permettront également d’engager le dialogue avec le Gouvernement sur quelques sujets chers aux membres de la commission des finances sur lesquels un tel dialogue nous a semblé opportun, tels que la déclaration automatique des revenus des utilisateurs de plateformes collaboratives à l’administration fiscale ou la création d’une taxe sur la diffusion en vidéo physique et en ligne de contenus audiovisuels, même si nous avons déjà débattu de ce dernier point dans le cadre du PLF pour 2017. À titre personnel, j’estime qu’il n’est pas très raisonnable de revenir sur des débats que nous venons de clore. Nous évoquerons à nouveau ces sujets, mais j’estime pour ma part qu’il faut respecter ce qu’a voté l’Assemblée nationale dans le cadre du PLF.

Enfin, le sujet des collectivités territoriales a nourri de riches débats en commission, comme toujours. Il a donné lieu, par exemple, à un amendement déposé par notre collègue Nicolas Sansu visant à traiter le problème des effets de bord de l’exonération de taxe d’habitation en faveur des ménages à revenus modestes. Nous connaissons parfaitement ce débat. L’amendement a été rejeté par notre commission pour des raisons bien compréhensibles, mais nous sommes tous convenus qu’il faut approfondir le débat. Notre collègue a donc déposé à nouveau son amendement en application de l’article 88. Il a de nouveau fait l’objet d’un avis défavorable de Mme la rapporteure générale, mais le débat aura lieu dans l’hémicycle. Compte tenu de l’ensemble de ces modifications, la commission des finances a adopté le projet de loi de finances rectificative pour 2016 et je vous invite, mes chers collègues, à faire de même.

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