Intervention de Maud Olivier

Séance en hémicycle du 24 juillet 2012 à 21h30
Harcèlement sexuel — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMaud Olivier :

Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, l'abrogation de l'article 222-33 de notre code pénal par le Conseil constitutionnel a créé un vide juridique insupportable. Bien sûr, les associations de lutte contre les violences faites aux femmes s'accordaient sur le fait que la définition du harcèlement sexuel telle qu'inscrite dans la loi de 2002 n'était pas satisfaisante. Mais la décision du Conseil constitutionnel a, d'une part, surpris et choqué – pour la première fois, cette décision n'était pas prise en faveur des victimes –, et a, d'autre part, empêché quelques dizaines de femmes de voir leur situation entendue et traitée par la justice. Elle a également conforté dans le déni de la gravité des actes perpétrés celles et ceux qui ont été accusés par le passé. Je tiens donc à saluer la rapidité avec laquelle le Sénat et le Gouvernement ont réagi et proposé, finalement, une loi améliorée et plus précise.

Le travail de la commission des lois, saisie au fond, mais aussi celui de la commission des affaires sociales et de la délégation aux droits des femmes, a permis de travailler à des amendements qui, je l'espère, affineront encore ce projet de loi. Il en est besoin, notamment à l'alinéa 2 de l'article 1er définissant l'acte unique de harcèlement sexuel.

Il nous faut anticiper la possible confusion qui permettrait de sanctionner l'agression sexuelle au niveau du harcèlement sexuel et, pour cela, éviter toute similitude dans la définition des deux actes.

Madame la ministre des droits des femmes, je tiens également à réaffirmer ici l'importance de compléter ce texte de loi par un travail approfondi sur le harcèlement sexuel dans l'enseignement supérieur. Qu'il s'agisse de mesurer le phénomène, de le prévenir et de permettre à la fois l'application des sanctions et, peut-être, le rehaussement de celles-ci, il faut obtenir une réforme des textes législatifs et réglementaires qui régissent la procédure disciplinaire au sein des établissements d'enseignement supérieur et mettre en place une politique de sensibilisation et d'information sur le harcèlement sexuel.

Plus généralement, les débats autour de ce texte ont montré le besoin manifeste que soit créé un observatoire des violences faites aux femmes, qui permettrait de mesurer ces enjeux de société pour lesquels les dépôts de plaintes ne peuvent constituer un indicateur pertinent.

Enfin, je parlerai de la communication autour de cette loi. Il faut la faire connaître autant des victimes que des auteurs potentiels, et il faudra éduquer plus largement et dès le plus jeune âge à la déconstruction des stéréotypes et aux sexualités. Dans les collèges, déjà, nous constatons des injonctions à caractère sexuel qui se rapprochent davantage d'un harcèlement banalisé que de la drague.

Pour que notre action législative ne soit pas qu'un pansement, il est important d'expliquer aux enfants, aux jeunes, quel est l'intérêt de cette loi, et, plus globalement, que le corps de l'autre ne nous appartient pas et que le consentement est le préalable à toute relation. Pour que ressente de la honte, non la femme ou la fille harcelée qui porte plainte, mais celui qui aura commis cette violence, pour que ces actes ne soient plus tolérables et mis sur le compte d'une tradition franchouillarde, celle-là même dont nous avons pu être les témoins encore récemment dans cette assemblée (Protestations sur les bancs du groupe UMP), pour qu'une relation sexuelle ne puisse être envisagée que libre et consentie, pour que la honte change de camp.

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