Intervention de Guillaume Chevrollier

Séance en hémicycle du 8 décembre 2016 à 9h30
Reconnaissance du génocide perpétré par daech — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGuillaume Chevrollier :

Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, en avril 2016, avec mes collègues Yves Fromion et Jean-Marie Tétard, nous avons fait un déplacement au Liban, au Kurdistan irakien et en Syrie dans le cadre d’une mission non officielle organisée par l’association CHREDO. A son terme, nous avons pris l’initiative de cette proposition de résolution visant à reconnaître le génocide perpétré par Daech contre les populations chrétiennes, yézidies et d’autres minorités religieuses.

En effet, ce que nous avons vu, ce que nous avons entendu ne pouvait rester sans suite. Le silence n’est pas possible car il revient à laisser faire alors que ce qui se passe dans ces pays est intolérable. Comment supporter ces exactions ? Comment supporter cette violence ? Comment supporter cette volonté d’éradication ? Une telle volonté existe, nous ne pouvons le nier : l’État Islamique veut mettre fin à la présence sur le territoire de quelques minorités ciblées.

Rien ne leur est épargné : villages rasés, massacres collectifs, meurtres de religieux et de civils, femmes, enfants et vieillards, viols, enlèvements, persécutions à grande échelle, conversions forcées, églises incendiées, monastères et écoles détruits. Ces minorités religieuses vivent aujourd’hui dans l’angoisse du lendemain, dans la peur et la souffrance quotidienne. Elles sont donc contraintes de fuir.

Si l’on prend l’exemple des chrétiens d’Orient, les chiffres sont impressionnants : en Irak, le nombre de chrétiens est passé de 1,4 million en 2003 à 275 000 en 2015 ; en Syrie, 500 000 d’entre eux ont fui alors qu’ils étaient près de 2 millions. Dans le pays voisin, la Turquie, un habitant sur quatre était chrétien en 1900, aujourd’hui, moins d’un sur dix.

Il est consternant de voir que la communauté internationale ne réagit qu’à l’occasion de faits particuliers : ce fut le cas lors de l’attaque de la cathédrale de Bagdad puis de l’église des Saints d’Alexandrie en 2010 ou, encore, lors de la destruction partielle de la ville de Palmyre. Une telle indignation devrait être continue car ces populations souffrent quotidiennement.

La France se doit de réagir pour deux raisons au moins. Son rôle historique dans la région tout d’abord : est-il nécessaire de rappeler le rôle de saint Louis qui, déjà, à l’époque, se voulait protecteur des chrétiens d’Orient et des minorités ? Ensuite, parce que la France est doublement concernée par l’État islamique en raison des nombreux attentats que nous avons subis sur notre sol et du rôle joué par certains de nos ressortissants dans ces exactions. Nous sommes donc attendus dans ces pays, que nous avons le devoir de ne pas décevoir : notre crédibilité est en jeu.

Nous devons donc intervenir pour que ce génocide soit reconnu car telle est bien la triste réalité. Nous assistons à la destruction de l’altérité, à un nettoyage ethnique inadmissible visant les chrétiens et les yézidis mais, également, d’autres minorités, c’est exact. Ces exterminations étant perpétrées selon des critères politiques, ethniques et religieux, il s’agit bien de génocides.

Nous devons garantir la présence de ces minorités sur ces territoires. Établies depuis 2000 ans dans ces régions, elles ont été un facteur de développement économique et de stabilité politique. La richesse de l’orient résidait dans le mélange des cultures et des religions. Les persécutions actuelles choquent d’ailleurs l’immense majorité des musulmans.

C’est pourquoi notre devoir est d’agir afin de condamner ces actes et de permettre que ces crimes ne restent pas impunis. D’autres pays ou organisations ont déjà réagi. Ainsi l’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, le Parlement européen, la Chambre des communes du Parlement britannique ont qualifié les massacres commis par Daech de « génocide » – tout comme d’ailleurs le secrétaire d’État américain John Kerry.

Les sénateurs ont voté mardi dernier à l’unanimité un engagement similaire. Il serait bien que l’Assemblée nationale soit capable de s’unir également autour de ce projet de résolution. Le Gouvernement, ensuite, devra être capable de faire entendre la voix de la France, de défendre à l’ONU une demande de résolution reconnaissant le génocide des chrétiens et des minorités d’Orient. Notre devoir, enfin, sera de construire la paix et de permettre le retour de ces minorités sur cette terre qui est aussi la leur. Notre pays doit continuer à jouer le rôle international qui fut le sien en faveur de la paix, de la justice et de la défense des opprimés.

1 commentaire :

Le 10/12/2016 à 14:27, Laïc1 a dit :

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"Si l’on prend l’exemple des chrétiens d’Orient, les chiffres sont impressionnants : en Irak, le nombre de chrétiens est passé de 1,4 million en 2003 à 275 000 en 2015 ; en Syrie, 500 000 d’entre eux ont fui alors qu’ils étaient près de 2 millions. Dans le pays voisin, la Turquie, un habitant sur quatre était chrétien en 1900, aujourd’hui, moins d’un sur dix."

On va vous taxer d'"islamophobie"...

Vous trouvez ce commentaire constructif : non neutre oui

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