Intervention de Guy Teissier

Réunion du 18 janvier 2017 à 9h30
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGuy Teissier, président de la mission d'information :

Jean-Michel Chauveau a raison à propos du tropisme français et européen vers l'Est. Cette perception est d'ailleurs partagée par d'autres de nos partenaires. Je me souviens ainsi avoir entendu des Turcs, lors d'une réception à notre ambassade en Turquie, s'étonner de ce que nous faisions encore en Afrique et nous inviter à plutôt investir chez eux.

S'agissant des coopérations, les choses sont effectivement compliquées par l'écart entre ce que nos partenaires veulent et ce qu'ils nous laissent faire. La question du néo-colonialisme est toujours présente de manière sous-jacente. C'est particulièrement le cas en Algérie lorsque l'on est dans les cercles gouvernementaux.

Par ailleurs, les investisseurs, qui arrivent souvent avec des idées généreuses, connaissent de fortes déceptions du fait du caractère tatillon de l'administration. En Algérie du moins, il reste très compliqué pour les entreprises de s'implanter. Je le vois bien dans ma ville de Marseille, il y a un foisonnement d'associations, de débats, de rencontres, mais il est très difficile de passer des engagements et des promesses à la mise en oeuvre pour toutes sortes de raisons. Le résultat est que nous laissons la place à d'autres, comme les Etats-Unis et la Chine ; cette dernière est maintenant très présente alors qu'elle a été longtemps totalement absente.

La régionalisation est un fait, au moins au Maroc et en Algérie. Nous avons par exemple beaucoup de coopérations directes avec le port de Tanger, qui est un port remarquable et d'ailleurs un futur concurrent du port de Marseille auquel nous devrions prêter attention.

La francophonie est en recul, mais il y aussi une demande forte. La Tunisie demeure le pays le plus francophone, devant le Maroc, puis l'Algérie. Le problème est que tous ces pays, à moment ou à un autre, ont supprimé l'enseignement du français, ce qui était catastrophique. Il y a une revendication générale d'utilisation du français comme langue vernaculaire. Au parlement algérien, un député, un médecin, a évoqué avec nostalgie le temps de sa jeunesse, où toutes les communautés cohabitaient et où il allait à l'école avec Roger Hanin.

Pour Philippe Baumel, j'indique que les infrastructures se développent de manière remarquable au Maroc. Le TGV est en cours de construction et le pays a aussi développé la plus grande ferme solaire en Afrique ; le soleil est leur or noir. Nous avons aussi à Marseille des partenariats sur la gestion de l'eau. S'agissant de la Tunisie, la conférence de Tunis a récemment retenu dix grands projets.

Nicole Ameline a raison de mettre en avant le triptyque sécurité-développement-gouvernance. Nous avons avec ces pays de multiples coopérations, notamment administratives. Par exemple, nous avons rencontré un administrateur de l'Assemblée nationale en mission de coopération au parlement tunisien ; il est très bien accueilli même si son travail est parfois difficile. La coopération militaire est un sujet plus délicat. Avec le Maroc, elle est réduite et fonctionne surtout pour les armées de l'air, mais l'armée marocaine est très solide, bien équipée, présente sur de nombreux théâtres. En outre, il y a tous les ans une manoeuvre commune et les états-majors se parlent régulièrement, grâce notamment au partage de la langue française. La Tunisie est en demande de coopération sur le Renseignement, mais il est plus dur d'avancer. Avec l'Algérie, c'est beaucoup plus compliqué ; la coopération n'existe pas car les Algériens n'en veulent pas.

Jean-Claude Guibal a évoqué la complexité de notre relation avec les pays du Maghreb qui est affectueuse, voire passionnelle. Il y a aussi le problème du fossé culturel qui sépare, dans ces pays, le « vieil homme » et l'« homme nouveau ». Le premier est tourné vers les préceptes du passé et le second vers la culture mondialisée et il est très difficile de passer d'une culture à l'autre, c'est un frein réel au développement. Pour autant, les progrès continuent, notamment en matière de maîtrise de la démographie.

Les pays du Maghreb sont nos voisins les plus proches et notre avenir passe par leur développement. Nous devons donc intensifier nos coopérations avec eux.

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