Intervention de Viviane Le Dissez

Séance en hémicycle du 31 janvier 2017 à 15h00
Adaptation des territoires littoraux au changement climatique — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaViviane Le Dissez :

Madame la ministre, madame la rapporteure, chère Pascale, chère Chantal Berthelot, chers collègues, cette proposition de loi que nous voyons revenir aujourd’hui sur nos bancs avec beaucoup d’enthousiasme mais aussi avec un profond sentiment de responsabilité constitue avant tout une belle loi de prévention et d’anticipation sur les conséquences dramatiques induites par le réchauffement climatique.

Elle a été nourrie par la vision prospective de l’évolution des écosystèmes côtiers à l’horizon de dix, quarante et même quatre-vingt-dix ans du comité de suivi de la stratégie nationale de gestion intégrée du trait de côte, au sein duquel Pascale Got et Chantal Berthelot se sont largement investies. Je salue avec force le travail de mes collègues sur un sujet complexe et de plus en plus prégnant.

La stratégie de gestion du trait de côte suppose une vision globale et de long terme. La France et ses nombreuses communes littorales, dotées de plus de 7 500 kilomètres de côtes, sont particulièrement concernées par les risques littoraux, notamment, l’érosion du trait de côte. Cette proposition de loi vise à en reconnaître la notion juridique mais, aussi, à mieux articuler les stratégies de prévention et d’actions à l’échelon national et local. Il dote surtout les communes touchées par l’érosion des côtes d’outils d’anticipation concrets et efficaces.

Je reviens sur les trois outils originaux qui ont déjà été énumérés.

Le texte institue tout d’abord des zones d’autorisation d’activité résiliente et temporaire – les ZART. La création de ce nouveau zonage intermédiaire dans le code de l’environnement visant à la définition et à l’évaluation du recul du trait de côte est une grande avancée très attendue. Ce dispositif permettra de réaliser ou de déplacer au sein de ces zones des constructions, des ouvrages, des aménagements ou des exploitations tout en prenant en compte les contraintes et les évolutions temporelles de ces zones sujettes à l’érosion côtière. Relevant de la compétence des collectivités locales, ce zonage a été conforté en première lecture par nos collègues sénateurs.

Ensuite, le bail réel immobilier littoral, le BRILi, pour les collectivités publiques et les particuliers, constitue aussi un nouvel outil innovant dont j’ai la conviction qu’il sera efficace. L’amendement de précision déposé en commission par la rapporteure vise à rétablir la possibilité de faire un bail réel immobilier littoral pour un lot de copropriété, ce qui me paraît également important et nécessaire.

Enfin, la création de la zone de mobilité du trait de côte, réintroduite en commission, permettra de définir un périmètre tampon qui prend en compte la protection des écosystèmes côtiers et la gestion du bâti existant dans une opération d’aménagement global.

Ces trois dispositifs témoignent d’une démarche volontaire afin de concilier la réalité environnementale et l’activité économique. Une telle méthode de travail pourrait et devrait d’ailleurs s’appliquer à d’autres champs du développement durable.

La question de l’indemnisation a été présentée par la ministre ; nous devrons en discuter tout à l’heure.

Enfin, un dernier point reste à discuter : les fameux articles 9 A et suivants. Une poignée d’amendements qui tendent à la modification de la loi Littoral est apparue au Sénat. Il faut le dire à cette tribune avec force et fermeté, comme l’a fait notre rapporteure : l’objet premier de ce texte est bien l’adaptation des territoires au changement climatique, non le détricotage de la loi Littoral.

Si nous comprenons les enjeux et les difficultés locales, si nous avons conscience de la place parfois trop large laissée à l’interprétation de la jurisprudence, il faut rappeler qu’aucun coup de canif à la loi Littoral ne pourra être toléré. Je suis, moi aussi, l’élue de communes côtières, à l’ouest de la Rance, du côté de chez M. Lurton.

La proposition de loi que nous étudions aujourd’hui est certes l’occasion de résoudre des problématiques ciblées et complexes, mais il ne s’agit bien de ne viser ici que la question des relocalisations des activités économiques agricoles.

À plusieurs reprises, avec certains de mes collègues élus de circonscriptions littorales, bretons mais aussi normands, j’ai alerté et rencontré Mme Cosse, ainsi que Mme Pinel, lorsqu’elle était ministre du logement, à propos de cette question. Je me réjouis aujourd’hui que la problématique dite des « dents creuses » soit prise en considération et que nous ayons pu nous attacher à modifier ces dispositions mineures par le biais de la présente proposition de loi.

Il me semble néanmoins que nous avons tous conscience de ce que notre magnifique littoral doit à cette belle loi de 1986, qui préserve nos côtes d’un urbanisme sauvage et irraisonné. La loi Littoral a fait ses preuves depuis plus de trente ans ; les contraintes qu’elle nous impose sont le gage du caractère unique de notre littoral. Les ajustements, à la marge, de la loi Littoral, ne doivent pas estomper l’ambition majeure de cette proposition de loi – texte original et ambitieux, qui est attendu, notamment, par de nombreux élus locaux et des citoyens déjà concernés.

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