Intervention de Cécile Untermaier

Séance en hémicycle du 1er février 2017 à 15h00
Obligation de casier judiciaire vierge pour les candidats à une élection — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCécile Untermaier, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République :

Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la rapporteure, mes chers collègues, que l’on appartienne à l’opposition ou à la majorité, que l’on soit frondeur ou légitimiste, on ne peut critiquer le bilan du quinquennat en matière de déontologie de la vie publique. Jamais nous n’avons été aussi impliqués dans cette thématique de la probité et de la transparence que pendant les quatre dernières années. Alors que nous étions très en retard par rapport à nos voisins et à de très nombreux pays anglo-saxons, nous sommes désormais à la pointe en matière de déclarations de patrimoine et d’intérêts. La gauche a pris ses responsabilités.

Pour parachever cette oeuvre et répondre à une aspiration populaire évidente au regard de l’ampleur de certaines pétitions citoyennes et de la pression de l’opinion publique, la majorité a décidé d’adopter ces propositions de loi visant à instaurer une obligation de casier judiciaire vierge pour les candidats à une élection. Contrairement à ce que l’on peut entendre dans des discours malhonnêtes, il s’agit non pas de stigmatiser les élus mais d’aligner les exigences qui s’imposent à ces derniers sur celles qui existent pour certains fonctionnaires, pour les avocats et pour les magistrats dont la bonne moralité est exigée. En effet, plusieurs centaines de professions exigent un casier judiciaire vierge, ou au moins ne comportant aucune mention incompatible avec l’exercice des fonctions remplies.

Être élu n’est pas une fonction ni une activité comme les autres. L’image que renvoie la représentation politique a une incidence sur la société tout entière. Tendre vers cette exigence doit participer de la volonté de renouer un lien de confiance avec les citoyens. On ne peut pas prétendre gouverner, décider au nom et pour le compte des citoyens sans exigence. Être élu exige de démontrer une capacité à aller au-delà de ses propres intérêts, à se transcender en faveur de l’intérêt général.

On comprend qu’il soit paradoxal, pour le citoyen, de voir des élus édicter des règles qu’ils ne respecteraient pas eux-mêmes. Si l’élu n’est pas un citoyen extraordinaire, s’il n’est pas nécessairement un modèle de vertu – à mon sens, d’ailleurs, l’exemplarité ne peut s’imposer de manière maximaliste sans porter atteinte au principe constitutionnel d’égalité –, il doit toutefois être à la hauteur du citoyen ordinaire qui lui a donné sa confiance. Ces propositions de loi à la fois mesurées et exigeantes vont dans le bon sens.

Bien entendu, il faut respecter le droit à l’oubli et accepter, comme le prévoit déjà le droit d’ailleurs, que soient effacées les mentions d’un bulletin à l’issue d’une période de plusieurs années d’exemplarité. Il faut admettre la possibilité de se racheter après quelques années d’engagement exemplaire dans la vie publique, voire politique.

Enfin, de telles mesures déontologiques mettent progressivement en oeuvre un nouvel état d’esprit au sein de notre République : elles inspirent à nos élus comme à nos concitoyens une nouvelle mentalité qui aura des répercussions sur l’efficacité de l’action publique.

La mesure préventive que constitue la présentation d’un extrait de casier judiciaire au stade de la candidature ne nous exonère pas de la nécessité de repenser le système de responsabilité civile et pénale des élus, du Président de la République et des membres du Gouvernement.

La présomption d’innocence doit bénéficier aux élus non encore condamnés et candidats à une élection. Mais vous savez comme moi qu’un élu national ou un membre de l’exécutif jouit d’une immunité qui fait obstacle – sauf si certaines conditions sont rassemblées – à la poursuite d’une instruction judiciaire l’impliquant directement ou non. Or l’élection ne doit pas être un refuge. Comme l’avait proposé le Président de la République, le droit doit permettre d’engager la responsabilité pénale et civile des élus, sous de strictes conditions. Je rappelle à ce sujet que l’opposition a refusé de voter le projet de loi constitutionnelle relatif à la responsabilité juridictionnelle du Président de la République et des membres du Gouvernement déposé à l’Assemblée nationale le 14 mars 2013.

Nous devons tous jouer le jeu de cette déontologie tant attendue par nos concitoyens. Je me félicite d’ailleurs de constater que le pouvoir judiciaire en a pris la mesure et a décidé de condamner fermement ceux qui n’avaient pas mérité de représenter notre nation. La déontologie évitera ce que les citoyens ressentent comme des trahisons et contribuera à restaurer le lien de confiance indispensable à la légitimité de la représentation politique.

Je conclurai mon intervention en rendant hommage à tous les élus. La très grande majorité d’entre eux méritent notre reconnaissance et celle de tous les citoyens.

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