Intervention de Yannick Favennec

Séance en hémicycle du 2 février 2017 à 9h30
Revalorisation des pensions de retraite agricoles — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaYannick Favennec :

Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le groupe de l’Union des démocrates et indépendants a régulièrement tiré la sonnette d’alarme sur la situation dramatique que vivent nombre d’agriculteurs.

Aujourd’hui, c’est avec le sens des responsabilités, et en étant conscient que la pérennité même de cette activité est menacée, que j’interviens à cette tribune au nom de mon groupe. À de multiples reprises, nous avons interpellé, aussi bien le Premier ministre que vous-même, monsieur le ministre de l’agriculture, sur les conditions de vie difficiles que connaissent de trop nombreux exploitants et salariés agricoles, des hommes et des femmes isolés, endettés, qui ne comptent pas leurs heures, mais qui, pourtant, ne parviennent plus à vivre de la force de leur travail.

Depuis 2012, à la crise économique et à la fracture sociale s’ajoute la désespérance morale, parce que, derrière les chiffres, il y a aussi de l’humain. Selon une étude de l’Agence de santé publique, trois cents agriculteurs se sont suicidés en 2010 et 2011, soit un taux de suicide supérieur de 20 % au reste de la population, et la tendance ne devrait malheureusement pas s’inverser. Le nombre d’agriculteurs en détresse ne cesse de croître et nous assistons sur nos territoires à la précarisation croissante du monde paysan : je le constate tous les jours dans mon département de la Mayenne. La situation est catastrophique et tout le monde rural s’en trouve fragilisé.

En 2015, 30 % des agriculteurs imposés au régime réel ont perçu des revenus équivalents à 354 euros par mois. La situation des agriculteurs en activité est donc plus qu’inquiétante. Mais que dire des conditions de vie des agriculteurs une fois à la retraite ? Avec à peine 800 euros par mois, comment avoir une fin de vie apaisée ? Dans notre pays, près de 1,5 million de retraités agricoles et 41 000 retraités exploitants agricoles bénéficient du minimum vieillesse. Le coût d’un hébergement en maison de retraite est difficile à assumer pour la grande majorité des personnes âgées et de leurs familles, dans la mesure où la retraite mensuelle moyenne est inférieure au coût mensuel d’un séjour. Le calcul est simple : comment les familles peuvent-elles s’occuper de leurs aînés, alors que, dans le privé, le coût moyen d’un hébergement est de 2 200 euros par mois ?

L’exploitant agricole est l’une des catégories professionnelles qui connaît le plus d’aléas, outre des débuts de carrière parfois difficiles. Comment pouvons-nous tolérer un écart aussi important entre le montant des retraites agricoles et celui des retraites du régime général ? Il n’est plus acceptable que des retraités ayant une durée de cotisation complète aient droit à une pension de retraite aussi faible, souvent inférieure au seuil de pauvreté.

En 2012, François Hollande, alors candidat à la présidentielle, s’était engagé à améliorer le niveau des pensions versées aux anciens agriculteurs, en faisant appel à la solidarité nationale. Les mois ont passé et, à notre grande déception, cette promesse ne s’est finalement traduite qu’a minima dans la loi de 2014. Loin de répondre aux préoccupations des agriculteurs, la loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites a seulement prévu une attribution gratuite de points de retraite complémentaire pour que, à l’horizon 2017, les plus petites retraites agricoles soit portées à 75 % du SMIC net, soit environ 840 euros. Pire, la dépense correspondante a été mise à la charge du régime des retraites complémentaires obligatoires agricoles – RCO. Or chacun sait bien que la pérennité financière de ce régime est menacée.

Mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons s’attaque à deux sujets : le montant des pensions agricoles et le financement du régime de retraites complémentaires obligatoires agricoles. De fait, si nous ne pouvons tolérer que le monde agricole soit le parent pauvre de notre système de retraite, nous ne pouvons pas non plus éluder la faillite de la RCO. Depuis plusieurs années, le régime de retraite complémentaire obligatoire, la fameuse RCO, accumule un déficit exponentiel, au point de mettre aujourd’hui en péril le versement des pensions de nos agriculteurs.

La conférence sur les retraites agricoles, organisée le mercredi 30 novembre 2016, avait pour but de trouver une solution à l’épineux problème du financement de la revalorisation des petites retraites agricoles à hauteur de 75 % du SMIC à l’horizon 2017. Finalement un décret du 28 décembre 2016, publié au Journal officiel du 30 décembre, est venu mettre fin au débat sur les différentes options pour financer les retraites agricoles. Mais c’est peu dire qu’il ne satisfait personne, et surtout pas, bien sûr, les agriculteurs.

Monsieur le ministre, dans le contexte de crise profonde que connaît ce secteur, aggravé par plusieurs années de récoltes difficiles, on ne peut imposer en plus une telle charge aux exploitants. Au groupe de l’Union des démocrates et indépendants, nous ne nous résignons pas à amputer les revenus de nos agriculteurs et c’est pourquoi nous avons dénoncé la hausse de 2 % de la cotisation de la RCO à compter de 2017.

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