Intervention de Georges Fenech

Séance en hémicycle du 7 février 2017 à 15h00
Sécurité publique — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGeorges Fenech :

Monsieur le ministre, j’approuve dans toutes ses dispositions ce dernier projet de loi – le vôtre –, même s’il comporte des insuffisances, même s’il arrive tardivement, comme cela a été souligné par notre collègue Meyer Habib.

J’ai toutefois un regret sur la question du port d’armes, mais je ne désespère pas que le Gouvernement fasse sienne ma position. Je déposerai d’ailleurs un amendement sur le port d’armes des fonctionnaires de police et des militaires de la gendarmerie. Lors de votre audition devant la commission des lois, et encore tout à l’heure, monsieur le ministre, vous m’aviez répondu que vous préciseriez ce point en séance.

De quoi s’agit-il ? Face à une menace terroriste élevée, il est nécessaire, dans le cadre de l’État de droit, d’étendre la possibilité aux forces de l’ordre de porter leurs armes hors de l’exercice de leur fonction, en tout lieu, compte tenu de leur devoir premier d’assurer la protection des citoyens, des biens et des institutions, dans le respect de nos grands principes.

Je rappelle que les fonctionnaires actifs des services de la police nationale reçoivent en dotation une arme individuelle, qu’ils portent en service et qu’ils peuvent désormais porter hors service, suivant leur volonté. Son usage est assujetti aux règles de la légitime défense et aux dispositions législatives et réglementaires.

En revanche, le port de leur arme hors service est limité par certains exploitants d’établissements ouverts au public, alors même qu’il serait de nature à prévenir la commission d’attentats ou à en diminuer l’impact. Je propose donc, monsieur le ministre, d’amender votre texte, dont j’approuve toutes les autres dispositions, de façon à permettre aux fonctionnaires de police, sans l’accord exprès des propriétaires de ces établissements, de pouvoir conserver leur arme de service.

Lors de votre audition par la commission des lois, j’ai rappelé l’exemple tragique du Bataclan : le commissaire Arnaud Beldon, âgé de 38 ans et aujourd’hui paraplégique, a eu un comportement héroïque qui lui a valu d’être décoré de la Légion d’honneur. Il ne portait pas son arme de service sur lui – il ne le pouvait pas puisqu’une salle de concert est un lieu privé. Compte tenu du contexte actuel, je demanderai donc une modification de ces dispositions.

D’une manière plus générale, monsieur le ministre, vous vous êtes récemment félicité d’une « tendance globale à la baisse de la délinquance depuis le début du quinquennat ». Or vous avez aussitôt été démenti par les résultats publiés par l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales. Et quand bien même nous admettrions une lecture, sans doute erronée, des chiffres et statistiques – ils sont toujours sujets à controverse, il faut bien le reconnaître –, une simple comparaison avec d’autres pays européens démontre, hélas, votre incapacité à assurer une meilleure sécurité des Français. Selon les chiffres rendus publics par Eurostat – l’INSEE de l’Union européenne – dans une récente étude comparative pour 2014, la France a compté 114 000 vols avec armes et vols avec violence, l’Allemagne 45 000, le Royaume-Uni 52 000 et l’Italie 58 000. Nous faisons deux fois moins bien que nos grands voisins : nous avons donc une large marge de progression.

Enfin, comment ne pas évoquer le terrible bilan des attentats, avec 240 morts depuis 2015 ? La commission d’enquête que j’ai présidée, dont M. Sébastien Piestrasanta était le rapporteur, a formulé quarante propositions. Nous aurons d’ailleurs l’occasion de procéder à votre audition, monsieur le ministre – je vous remercie de l’avoir acceptée –, le 10 février à neuf heures dans le cadre du suivi de nos préconisations.

Si, incontestablement, des mesures importantes ont été prises – je pense notamment à l’équipement des forces intermédiaires et au nouveau schéma d’intervention des forces d’élite –, nous regrettons fortement qu’il n’y ait pas eu de prise en compte de la refonte des services de renseignement, avec la création suggérée d’une agence nationale de lutte contre le terrorisme.

Dans la réponse à notre questionnaire, vous avez été très clair : le poids des enjeux liés à la lutte antiterroriste ne permet pas d’envisager de supprimer ce qui fonctionne bien en la matière. Comment pouvez-vous invoquer le bon fonctionnement de nos services de renseignements quand les patrons de la DGSI – direction générale de sécurité intérieure – et de la DGSE – direction générale de la sécurité extérieure – eux-mêmes ont honnêtement dit, devant notre commission d’enquête, que les attentats étaient un échec de leurs services ? Ce sera, j’en suis convaincu, le prochain chantier – parmi tant d’autres – de la majorité qui sortira des urnes.

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