Intervention de Colette Capdevielle

Séance en hémicycle du 7 février 2017 à 15h00
Sécurité publique — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaColette Capdevielle :

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, chères et chers collègues, ce texte relatif à la sécurité publique ne constitue pas qu’une réaction aux légitimes revendications des policiers ou à des fait divers précis. Il répond à une revendication ancienne, récurrente et, surtout, à la nécessité de mettre en place un cadre juridique stable et cohérent concernant l’usage des armes par les policiers.

Nos policiers exercent leurs missions dans des conditions particulièrement difficiles. La réalité terroriste a modifié les conditions d’exercice d’un métier complexe et très éprouvant. Celles et ceux dont la mission est de nous protéger ont aussi le droit de demander à être eux-mêmes protégés. Depuis plus de deux ans, éloignés de leurs familles et de leurs lieux de vie, les policiers doivent être présents sur tous les fronts. Nous leur demandons beaucoup, donc, nous leur devons beaucoup.

Dès le début de cette législature, des efforts financiers importants ont été réalisés en matière de sécurité et nous avons sans cesse adapté notre législation pour mieux lutter contre le terrorisme tout en préservant chaque fois les libertés publiques et accorder de nouvelles garanties. Ce texte de clarification parachève toutes les mesures déjà prises.

D’une manière assez étonnante, nous constatons que le droit positif en vigueur encadre toujours différemment les statuts des policiers et des gendarmes et, ce, sans justification qui tienne. Jusqu’à ce jour, les policiers ne disposent pas d’un texte de référence précis en ce qui concerne l’usage des armes – c’est le droit commun de la légitime défense qui s’applique.

L’article 1er crée enfin un cadre commun clair et intelligible pour les différentes forces de sécurité – policiers, gendarmes, militaires et douaniers, qui ne peuvent faire usage de leur arme qu’en cas d’absolue nécessité et de manière strictement proportionnée en application de la jurisprudence constante et jamais démentie de la cour européenne des droits de l’homme.

La semaine dernière, notre commission des lois a recadré le champ d’application : il ne faut pas que la menace soit seulement probable ni que la personne visée soit jugée intrinsèquement dangereuse ; il est impératif que le comportement de la personne, dans sa fuite, soit dangereux et rende absolument nécessaire l’usage de la force armée pour écarter ce danger.

La commission des lois a également supprimé les extensions du champ des dispositions aux policiers municipaux et je souhaite qu’il en soit de même en séance publique car cela me paraît conforme à notre droit et à la réalité des situations : la police municipale n’a pas les mêmes missions ni les mêmes prérogatives que la police nationale.

Une fois définitivement voté, ce texte nécessitera d’être bien expliqué à nos concitoyens mais aussi et surtout aux policiers, lesquels devront être formés. Ce renforcement de la formation, qui est très justement demandé par les policiers, est devenu indispensable car la formation est insuffisante et, en tout cas, inadaptée. Nous ne pourrons pas non plus faire l’économie des légitimes revendications de nos services de police, qu’il s’agisse de leurs pénibles conditions de travail ou de la vétusté des locaux et des matériels.

S’agissant des autres dispositions de ce texte visant à protéger des risques de menaces ou de représailles des agents dressant des actes de procédure en matière de police judiciaire et les signataires de décisions administratives fondées sur des motifs liés au terrorisme, la commission des lois a très justement encadré sur le plan juridique ces mesures très dérogatoires au droit commun. Je tiens à rappeler qu’il faut se montrer prudents quant à ce type de dispositif, lequel doit absolument rester exceptionnel et donc ne pas être généralisé.

Sur proposition de son président Dominique Raimbourg, notre commission des lois a aussi enrichi le texte initial de dispositions nouvelles nécessitées par des questions prioritaires de constitutionnalité ayant annulé certains textes.

Enfin, nous avons été nombreux à soutenir par nos amendements une nouvelle disposition qui n’est que la reprise d’une expérimentation jamais mise en place : la protection des femmes victimes de violence par un dispositif électronique de protection anti-rapprochement, lequel a montré sa réelle efficacité dans d’autres pays européens, particulièrement en Espagne, pays que je connais bien. Je vous assure qu’il fonctionne et que toutes les femmes qui l’ont utilisé ont été réellement protégées – elles n’ont été victimes d’aucun récidiviste. Ce dispositif protège donc effectivement la victime.

Je souhaite que nous puissions aboutir en la matière et que nous terminions cette mandature par ce texte nécessaire, courageux et équilibré. Je rappelle toutefois que cette loi n’est pas la dernière que nous examinons puisque nous attendons la discussion, dans quelques jours, d’une loi de liberté, voulue par de nombreuses victimes, qui réforme profondément la prescription pénale.

Nous parachevons donc un travail législatif très sérieux, très complexe et, surtout, très courageux : nous n’avons pas cédé aux sirènes, nous avons répondu en systématiquement et avec à-propos à toutes les situations tout en demeurant très respectueux des principes qui fondent le droit français.

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