Intervention de Paul Giacobbi

Séance en hémicycle du 9 février 2017 à 9h30
Ratification d'ordonnances relatives à la corse — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul Giacobbi :

Madame la présidente, monsieur le ministre, chers collègues, l’histoire est souvent prise à témoin durant ces derniers débats législatifs. Je ne vais pas la refaire mais je tiens tout de même à rappeler que tout a été dit sur la question suivante : la Corse doit-elle avoir une ou deux collectivités au-dessus des communes ?

Le XIVe siècle, déjà, avait séparé la Corse en deux, l’en deçà et l’au-delà des monts. Telles étaient les structures administratives, avec leurs différences quant au droit de propriété et d’organisation sociale. La Révolution superposa les deux départements, alors dénommés le Golo et le Liamone, sur les limites anciennes.

Bonaparte réunit la Corse en un seul département, mais lui donna comme chef-lieu sa ville de naissance, Ajaccio – dont le député-maire est ici présent –, ce qui était une innovation importante, puisque Bastia avait toujours été le siège du gouvernement génois de l’île. Cependant, il fit de Bastia sa capitale juridictionnelle, rôle qu’elle a toujours avec la cour d’appel, le tribunal administratif et la chambre régionale des comptes.

M. Giscard d’Estaing, quant à lui, créa en 1975 deux départements, dans la logique de l’instauration progressive des régions. Puisque la Corse était une région, il fallait logiquement, même si cette logique n’a pas toujours été appliquée outre-mer, qu’elle comportât deux départements. Ce sont les limites traditionnelles, celles du XVIIIe siècle, qui furent reprises. Dans le projet de loi initial déposé par le Gouvernement, les deux départements s’appelaient respectivement le Golo et le Liamone, comme ils devaient s’appeler au XVIIIe siècle.

Par la suite, l’émergence d’une collectivité territoriale de Corse, renforcée par plusieurs statuts particuliers successifs, souleva de plus en plus la question des départements, même si ceux-ci, du fait de leur ancienneté comme de l’élection au scrutin uninominal sur une base territoriale, conservent encore une légitimité, celle d’une assise locale incontestable.

Il y eut, en 2003, une réforme avortée, soutenue par beaucoup d’élus, comme moi-même ou Camille de Rocca Serra – trois députés sur quatre, si mon souvenir est bon. Cependant, lors du référendum, le non l’emporta de justesse, à la suite d’une campagne vigoureuse, menée en particulier par notre ancien collègue, Émile Zuccarelli. Mais les Corses, vous l’avez dit monsieur le ministre, sont des gens déterminés, qui ne se laissent pas facilement abattre, et j’en suis d’ailleurs un exemple.

Dès 2013, l’Assemblée de Corse, à ma demande, puisque j’étais président du Conseil exécutif, a relancé ce projet. Cela s’est fait de manière extrêmement sérieuse, dans le cadre d’une étude menée par la commission des compétences législatives et réglementaires, présidée par Pierre Chaubon, et soutenue administrativement par José Colombani, inspecteur général de la collectivité territoriale. Cela s’est fait dans un très bon esprit, dont pourraient témoigner certains membres du public présents aujourd’hui dans les tribunes. Il s’agissait de rassembler. Le travail, qui aura été technique, politique et de conviction, a permis d’aboutir à un vote favorable très large.

Aujourd’hui, nous pouvons dire que les esprits sont enfin apaisés. Peut-être pas totalement, puisque le Sénat a repoussé de manière un peu surprenante le projet de ratification qui nous est aujourd’hui présenté… Je pense que cet incident passera très rapidement pour un épiphénomène. Je crois qu’il est déjà à peu près oublié, même si le ministre a, lui, la mémoire longue et qu’il conservera un certain temps le souvenir de cette affaire.

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