Intervention de Christian Eckert

Séance en hémicycle du 14 février 2017 à 9h30
Questions orales sans débat — Domaine public portuaire

Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget et des comptes publics :

Madame la députée, vous m’interrogez sur l’état d’avancement de l’ordonnance portant réforme de la domanialité publique. À cette question très technique, je m’efforcerai d’apporter des réponses précises.

Vous soulevez le risque de déstabilisation du secteur portuaire et indiquez que des investissements pourraient être différés, notamment à Rouen. Vous avez à ce propos rappelé les travaux que vous avez conduits avec d’autres parlementaires sur la question des ports.

Ce que je veux vous dire en premier lieu, c’est que cette ordonnance vise à simplifier le droit domanial. Le droit domanial en vigueur ne subordonne la délivrance d’autorisations d’occupation du domaine public à aucune obligation de publicité ou de mise en concurrence préalables.

En deuxième lieu, cette question des obligations de mise en concurrence et de publicité présente une actualité certaine, non pas seulement du fait de l’adoption de l’article de la loi dite « Sapin 2 », que vous avez évoqué, mais plus encore en raison de l’évolution du cadre jurisprudentiel issue du prononcé par la Cour de justice de l’Union européenne de l’arrêt dit « Promoimpresa », le 14 juillet 2016. Alors que la jurisprudence administrative française, encore confirmée en 2010 par la décision du Conseil d’État dite « Jean Bouin », ne dégageait aucune obligation générale de mise en concurrence et de publicité, la Cour de Luxembourg a jugé, sous l’empire tant de la directive « Services » que de l’article 49 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, qu’une telle obligation pèse sur le gestionnaire du domaine public dans deux hypothèses principales.

La première est celle où un titre d’occupation s’analyse comme un régime d’autorisation visant à permettre le déroulement d’activités économiques qui exigent l’utilisation de ressources naturelles et où le nombre d’autorisations disponibles pour une activité donnée est limité en raison de la rareté des ressources naturelles ou des capacités techniques utilisables.

La deuxième hypothèse est celle où la délivrance d’une autorisation d’occupation domaniale permet à son titulaire d’occuper « une zone domaniale en vue d’une exploitation économique » et que le droit d’occupation ainsi conféré présente un intérêt transfrontalier au sens du droit de l’Union européenne.

Tel est donc aujourd’hui, sans même attendre l’édiction de l’ordonnance, l’état du droit en vigueur, l’arrêt Promoimpresa devant être lu comme explicitant l’état des règles.

Le travail engagé par le Gouvernement sur le fondement de l’habilitation que le Parlement lui a accordée doit permettre de clarifier l’état du droit en ce domaine. II est conduit dans le cadre d’une large concertation, tant avec les opérateurs économiques qu’avec les collectivités. Des échanges nourris sont d’ores et déjà intervenus, notamment avec les opérateurs portuaires et les gestionnaires de ports. Ces échanges visent en particulier à ce que le projet d’ordonnance en cours de préparation permette d’expliciter, dans le respect du droit de l’Union européenne, les hypothèses dans lesquelles, soit du fait de la nature des activités dont le déploiement est subordonné à l’autorisation domaniale, soit pour des motifs inhérents à la sécurité publique, l’organisation d’une procédure de sélection ne se justifierait pas. Sont également examinées les hypothèses et conditions dans lesquelles la prolongation d’une autorisation existante – vous avez évoqué ce cas – peut se concevoir sans remise en concurrence.

Tels sont l’esprit et la lettre du travail mené par le Gouvernement. Vous me pardonnerez d’avoir été un peu long, monsieur le président, mais le sujet et très technique.

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