Intervention de Marie Castelli

Réunion du 8 février 2017 à 9h30
Commission des affaires économiques

Marie Castelli, secrétaire générale de l'Avere-France :

Il ne faut pas oublier que les Français parcourent en moyenne 34 kilomètres par jour et que plus de 90 % des déplacements en voiture sont inférieurs à 100 kilomètres. Un véhicule électrique n'arrive donc pas à vide à son point de recharge ; aussi, l'enjeu de l'autonomie n'est pas aussi déterminant qu'on le dit. L'important est de trouver un point de charge partout où l'on stationne, de manière à pouvoir faire du « biberonnage ». Outre que cela répond à la demande des usagers, qui ne recherchent pas des stations-service, cela limite l'intensité des appels de puissance. La question de l'augmentation de l'autonomie des batteries est très importante mais la résoudre ne modifiera pas ce schéma. Il faut en venir à un réseau de recharges « du quotidien » couplé à un réseau de recharges en couloir qui seront utilisées quand on va loin, sans fantasmer sur un excès de besoin en infrastructures de recharge rapide ; l'objectif de 10 % me semble correct.

Actuellement, près de 110 000 véhicules rechargeables roulent en France, dont 97 000 sont des véhicules électriques, les autres étant des hybrides rechargeables. L'an dernier, plus de 27 000 nouveaux véhicules électriques ont été vendus, et le rythme de croissance des ventes escompté est de 40 % par an, ce qui permet d'atteindre l'objectif fixé par les pouvoirs publics dans la programmation pluriannuelle de l'énergie. Le maillage nécessaire est de 1,2 point de charge par véhicule électrique en circulation : un point de charge principal et 0,2 point pour la recharge d'appoint ; 10 % des infrastructures de recharge doivent se situer en voirie et dans des zones accessibles au public.

Pour ce qui est de la tarification, le véhicule électrique ne parviendra pas à être compétitif sans aides publiques. Ce sont les véhicules d'occasion qui permettront l'accès de tous à la mobilité électrique, aujourd'hui réservée à une certaine catégorie de population, celle des acheteurs de véhicules neufs. Aussi le marché de l'occasion doit-il être soutenu : c'est par ce biais que ce mode de mobilité se diffusera en France.

Le véhicule électrique représente aussi une remarquable opportunité de stockage de l'énergie. Les constructeurs étudient la réutilisation des batteries en seconde vie : quand elles ont perdu 25 % de leur capacité, ce qui les rend impropres à l'usage pour la mobilité, elles pourraient être réutilisées en stockage dans les bâtiments ou en stockage tampon pour l'énergie renouvelable. M. Thomas Veyrenc a aussi évoqué le branchement bidirectionnel dit vehicule-to-grid ou V2G, technologie conçue pour permettre que les batteries des véhicules électriques en stationnement alimentent le réseau général électrique lors des pics de consommation.

L'interopérabilité des infrastructures de recharge est indispensable et un décret paru le 12 janvier dernier la rend obligatoire pour toutes celles qui sont accessibles au public, en prévoyant « l'itinérance de la recharge » pour tout utilisateur, qu'il soit titulaire d'un abonnement auprès d'un opérateur de mobilité ou qu'il paye à l'acte. Le décret incite fortement à passer par les plates-formes d'interopérabilité telles que GIREVE, qui sont des agrégateurs de données. L'interopérabilité est déjà effective pour les membres du SIEL.

La question a été posée de l'équilibre territorial des infrastructures de recharge. De nombreux syndicats ruraux de l'énergie y sont très impliqués et le déploiement n'est pas uniquement urbain. Certes, les implantations dominent en Île-de-France, mais on constate une sorte de vague depuis les départements de l'Ouest, la zone la plus maillée, qui va s'amenuisant vers l'Est, la région Provence-Alpes-Côte-d'Azur étant également assez active.

Mieux vaut, je vous l'ai dit, répartir les stations de recharge en tous les lieux où les utilisateurs stationnent que d'être obsédé par l'installation de recharges rapides dans les centres urbains.

L'acheteur d'un véhicule neuf est, statistiquement, un homme âgé de cinquante-quatre ans, membre d'un foyer fiscal dont le revenu annuel est supérieur à 60 000 euros ; tous les autres achètent des véhicules d'occasion. Les entreprises achetant des véhicules neufs, c'est le dynamisme du marché du véhicule électrique en entreprise qui donnera accès à ces véhicules à tous les Français, car il induira le développement consécutif du marché de l'occasion. Jusqu'à présent, l'acquisition de véhicules électriques par les entreprises n'allait pas de soi, leur coût global de possession étant supérieur à celui de véhicules thermiques. La loi de finances pour 2017 a introduit des modalités d'amortissement spécifiques dont nous espérons qu'elles auront un effet bénéfique sur le développement de ce marché ; il faudra en faire le bilan dans un an.

L'engagement des pétroliers est inégal mais certains s'engagent. Ainsi, le groupe Total a fait l'acquisition du fabricant de batteries Saft et annoncé qu'il équiperait l'ensemble de ses stations-service.

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