Intervention de Catherine Coutelle

Séance en hémicycle du 16 février 2017 à 9h30
Extension du délit d'entrave à l'interruption volontaire de grossesse — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCatherine Coutelle, rapporteure de la commission des affaires sociales :

…garantie de paiement des pensions alimentaires ; sanction envers les entreprises pour absence d’accord ou de plan relatif à l’égalité professionnelle ; lutte contre les violences faites aux femmes. La loi du 4 août 2014 regroupe ces grandes avancées.

Je suis fière, oui, mais il faut dire que les conditions étaient favorables : ces avancées pour les droits des femmes n’auraient jamais été possibles sans une trilogie gagnante.

D’abord, un exécutif volontaire : volonté présidentielle, gouvernement paritaire, ministère des droits des femmes, à la tête duquel se sont succédé Najat Vallaud-Belkacem, Marisol Touraine, Pascale Boistard et Laurence Rossignol. Toutes ont fait preuve d’un grand volontarisme pour porter les droits des femmes et en faire une politique qui irrigue l’ensemble des politiques publiques, même là où on l’attendait le moins, comme en matière de diplomatie.

Depuis 2012, la France a développé une forte diplomatie des droits des femmes, avec les associations, les organisations non gouvernementales, qui font un travail de fond extraordinaire. Cette réalité est peu visible et moins connue, mais c’est une source de fierté. Pour moi, elle représente une incontestable réussite. Je souhaite vraiment que la France continue d’être écoutée à l’international. La lutte contre l’utilisation du corps des femmes comme moyen d’oppression et même, dans son paroxysme le plus insupportable, comme arme de guerre ou objet de traite et de marchandisation doit mobiliser tous nos efforts, avec encore plus de ténacité dans le contexte actuel d’instabilité politique.

Deuxième volet de la trilogie : un Parlement qui légifère vite et bien, et qui évalue les lois. Je suis fière que le Parlement soit doté, depuis le gouvernement Jospin, d’une délégation aux droits des femmes, qui intéresse les nombreuses délégations étrangères que j’ai reçues. J’en salue les précédentes présidentes : Martine Lignières-Cassou et Marie-Jo Zimmermann, avec laquelle j’ai travaillé lorsque j’étais dans l’opposition.

Un Parlement, une délégation et aussi de nouveaux outils de gouvernance, avec le Conseil supérieur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, dont Brigitte Grésy est la secrétaire générale, et le Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, le HCE, dont je tiens à remercier chaleureusement la présidente, Danielle Bousquet. Élaborer des lois, des budgets genrés et toutes les politiques, locales, nationales, européennes en pensant « égalité », c’est l’enjeu de demain ; nous avons commencé à le faire grâce au HCE, qui est désormais inscrit dans la loi et sur lequel je sais que vous pourrez compter.

La trilogie gagnante, ce sont aussi, bien sûr, les associations, les militantes, les battantes des droits des femmes, associations dynamiques, toujours vigilantes, qui se renouvellent. Ce sont elles qui permettent de faire progresser les droits des femmes. Nous leur devons toutes les victoires décisives de l’émancipation des femmes – droits politiques, droit de vote, droits sexuels et reproductifs, droits économiques –, depuis les suffragettes jusqu’aux combats des années soixante, avec la loi de Lucien Neuwirth en 1967 et celle de Simone Veil en 1975.

Nous avons récemment rendu hommage à Lucien Neuwirth, qui a autorisé la contraception. Mais, dans la France conservatrice de la fin des années soixante, au sein d’un hémicycle presque exclusivement masculin, il n’aurait pas été possible d’adopter ces textes de loi sans la voix des femmes, sans les voix de gauche, sans les féministes qui ont porté haut une perspective nouvelle et radicale – « Un enfant si je veux, quand je veux ! » –, ces féministes qui se sont organisées pour revendiquer des droits nouveaux, via des organisations comme le Planning familial, le Mouvement de libération des femmes ou le Mouvement pour la liberté de l’avortement et de la contraception. Ces militantes avaient compris que les femmes acquièrent leur liberté et l’égalité lorsqu’elles sont maîtres de leur corps, de leurs décisions, de leur vie économique, de leur autonomie.

Nous voyons aujourd’hui à quel point leurs slogans étaient justes. « Mon corps, mon choix » : voilà ce que l’on pouvait encore entendre, fin janvier 2017, durant les manifestations de milliers de femmes dans le monde contre les retours en arrière que Trump veut imposer. Ces manifestations ont rassemblé des militantes du Planning familial, toujours mobilisées et que je salue, des associations plus récentes, et des jeunes femmes et jeunes hommes qui se mobilisaient pour la première fois. Les associations historiques ou récentes font en ce moment face aux conservateurs, partout où ceux-ci reviennent en force, à ces réactionnaires qui s’organisent et sont financés abondamment pour peser dans le débat public. Nous l’avons vu ici même, en France, lors du débat sur le mariage pour tous. Nous l’avons vu très récemment en Pologne, en Espagne et ailleurs en Europe, quand des milliers de femmes ont dû descendre dans la rue, encore et toujours, pour défendre leurs droits.

La nouvelle génération est là, et bien là. Elle reprend déjà des combats inachevés comme l’égalité salariale, l’accès à la procréation médicalement assistée pour toutes, la lutte contre le harcèlement et le cyber-harcèlement.

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