Intervention de Patrick Calvar

Réunion du 24 mai 2016 à 18h00
Commission d'enquête relative aux moyens mis en œuvre par l'État pour lutter contre le terrorisme depuis le 7 janvier

Patrick Calvar, directeur général de la sécurité intérieure, DGSI :

Je vais vous répondre clairement tout en tâchant de respecter le secret de l'instruction. Farouk Ben Abbes se trouve à la jonction de deux dossiers différents, celui lié au projet d'attentat de 2009 contre le Bataclan et celui lié à la mort de notre jeune compatriote Cécile Vannier lors de l'attentat perpétré au Caire la même année.

Farouk Ben Abbes est interpellé une première fois en Belgique – pays dont il est ressortissant – parce qu'il est suspecté d'appartenir à une filière d'envoi de combattants en Irak. Un non-lieu sera prononcé et il ne sera donc pas poursuivi. Il s'installe ensuite en Égypte d'où il part pour Gaza. Là, il entre en relation avec un mouvement extrémiste et il va regagner l'Égypte en 2009, où il sera trouvé porteur d'une clef USB contenant de la documentation sur la fabrication d'engins explosifs. Passé par l'un des tunnels clandestins, il a été arrêté et interrogé. Un service tiers déclarera que les Égyptiens auraient obtenu des aveux de l'intéressé selon lesquels il était missionné pour perpétrer une attaque en France et qui aurait pu viser le Bataclan, cet établissement organisant – nous sommes en 2009 – des galas de bienfaisance au profit de l'armée israélienne alors engagée dans l'opération « Plomb durci ».

Jamais les Égyptiens n'ont répondu à aucune demande d'entraide et n'ont apporté aucun élément concret à ce sujet. Néanmoins, quand Farouk Ben Abbes a été libéré, après un passage par la Belgique où il a été à nouveau interrogé, il s'est rendu en France où il a été interpellé, mis en examen et incarcéré. Toutes les investigations réalisées à partir de là n'ont pas permis de le relier à ce pseudo-projet dont on ignore, encore une fois, s'il a existé ou non – on n'en sait strictement rien, les Égyptiens n'ayant jamais donné, je le répète, aucun élément. La justice ne pouvait donc conclure qu'à un non-lieu, indépendamment du fait qu'elle avait parfaitement fait son travail, allant jusqu'à demander et obtenir son incarcération.

L'affaire Cécile Vannier est toute autre et concerne un attentat perpétré au Caire. On veut y lier Farouk Ben Abbes via des témoins qui ensuite ne le reconnaîtront pas. L'instruction n'est ici pas terminée. L'intéressé a été récemment placé en garde à vue dans ce cadre.

Reste que tous les éléments susceptibles de faire avancer l'enquête, s'ils existent, sont entre les mains des autorités égyptiennes. Aussi, aujourd'hui, rien ne relie les affaires Bataclan et Vannier, de 2009, et les attentats du 13 novembre 2015. D'aucuns vous diront cependant qu'en Égypte il a croisé les frères Clain. Mais les frères Clain n'étaient en rien concernés par ce qui se passait à Gaza, et quant à l'attentat qui a causé la mort de Cécile Vannier, les Clain étaient déjà rentrés depuis bien longtemps en France quand il a été commis.

Dès lors qu'on ne peut établir un lien entre ce qui s'est passé en 2009-2010 et ce qui s'est passé en 2015, pourquoi voulez-vous qu'il y ait eu une information directe des responsables ou des propriétaires du Bataclan ?

Rien, absolument rien n'indique qu'il y ait un lien. La justice a parfaitement fait son travail. Farouk Ben Abbes a été incarcéré pendant une période assez longue, des investigations tous azimuts ont été menées et aucun élément n'est venu corroborer cet éventuel lien ; de plus, je le répète, nous n'avons obtenu aucune réponse aux demandes d'entraide internationale formulées auprès des autorités égyptiennes. On ignore donc jusqu'au fait que l'intéressé aurait pu, un jour ou l'autre, tenir les propos qu'on lui attribue.

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