Vous devez être identifié pour donner une opinion sur cet élement

Intervention de Grégoire Doré

Réunion du 11 mai 2016 à 16h15
Commission d'enquête relative aux moyens mis en œuvre par l'État pour lutter contre le terrorisme depuis le 7 janvier

Grégoire Doré, chef adjoint de l'Unité de coordination des forces d'intervention, UCOFI :

Toutes ces questions ont été prises en compte dans le schéma national d'intervention.

La proximité n'est pas le seul critère à prendre en compte pour faire intervenir une unité. Il faut savoir si elle est disponible : elle peut être en déplacement pour un entraînement loin de son lieu implantation, donc ne pas pouvoir intervenir, mais elle peut le faire, si besoin, là où elle se trouve. En outre, certaines unités ont développé davantage que d'autres des capacités spécifiques. Le schéma national d'intervention prend cette donnée en compte : il recense cent trente capacités nécessaires et fixe huit domaines qu'il faut maîtriser pour pouvoir intervenir dans les cas de tuerie. Ces capacités ont été normées et seront testées sous l'égide de l'UCOFI.

Une unité qui maîtrise moins bien qu'une autre une capacité peut avoir recours à celle-ci grâce à la procédure de concours capacitaire. Cette procédure s'applique soit par modularité – par exemple, pour effectuer une effraction complexe, on fait appel au module « effraction » d'une autre unité très spécialisée dans ce domaine –, soit par complémentarité, pour compléter avec des membres d'une autre unité un effectif qui ne serait pas suffisant. En tout état de cause, tout est organisé de manière à optimiser la réponse.

Si deux forces arrivent en même temps sur un lieu, il n'est pas nécessaire de prendre une décision. Les unités savent où elles doivent intervenir ; elles connaissent leur zone de compétence. Le principe du menant-concourant permet ensuite de définir un cadre, sauf en cas d'application de la procédure d'urgence absolue qui fait primer l'unité arrivée sur place en premier. Par ailleurs, les unités se parlent et s'entendent : si elles arrivent concomitamment sur place, l'unité menante prendra le commandement des opérations. Cela ne pose aucune difficulté majeure.

La note conjointe de la DGGN, de la DGPN et de la préfecture de police, du 16 octobre 2015, organise l'articulation de la primo-intervention en cas de tuerie de masse. Elle révolutionne une doctrine séculaire, partagée par la police et la gendarmerie, selon laquelle les unités non spécialisées dans le contre-terrorisme n'intervenaient pas. Désormais, l'objectif étant de mettre fin à la tuerie, tous les personnels qui arrivent sur place armés y contribuent. Quand ils ont les moyens de mettre fin à la tuerie, alors ils ont l'obligation de la faire – comme le commissaire de la BAC 75N au Bataclan.

Cependant, il ne s'agit pas que les primo-arrivants ou les primo-engagés « aillent au carton » ; il ne faut pas en faire des cibles. Un îlotier, un vététiste, une équipe de police-secours ne disposent pas de l'équipement nécessaire pour intervenir ; ils doivent donner l'alerte afin que les unités d'intervention intermédiaire arrivent dans les délais les plus brefs – il peut s'agir de quelques secondes. C'est dans cet esprit que le plan BAC-PSIG dévoilé par le ministre de l'Intérieur en octobre 2015 a permis de « monter en gamme » les BAC et les PSIG Sabre, afin de leur donner des capacités de primo-intervention avec le souci d'une couverture géographique rehaussée. Les unités d'intervention spécialisée ne prennent le relais qu'ensuite, afin de réduire définitivement la crise, s'il y a lieu.

Le schéma national d'intervention, dans sa version actuelle, est circonscrit aux forces de sécurité intérieure. Si les forces armées donnent aujourd'hui un coup de main essentiel aux forces de sécurité intérieure, elles sont considérées comme un élément visible qui rassure la population sans intervenir. Si elles intervenaient, elles le feraient après avoir été sollicitées dans le cadre de protocoles spécifiques. Les forces de sécurité intérieure détiennent l'ensemble des capacités d'assaut nécessaires.

Le schéma national d'intervention est néanmoins révisable : chaque fois que cela est nécessaire, et au moins chaque année. Il est donc possible de réfléchir à la place des forces armées. Cela dit, nous ne sommes pas encore en état de siège – espérons ne jamais y être – et certains principes juridiques empêchent les forces armées d'intervenir au même titre que les forces de sécurité intérieure. Une expérimentation de collaboration entre les forces a néanmoins été menée en Isère ces deux dernières semaines. Ce n'est pas vraiment mon domaine, mais je crois savoir qu'elle a donné totalement satisfaction. Elle doit désormais faire l'objet d'un RETEX qui permettra d'évaluer l'articulation entre les forces.

Est-il pertinent de disposer de trois unités d'élite ? À vrai dire, il y a bien trois unités principales, mais il faut aussi compter toutes les antennes du RAID et du GIGN, et toutes les forces d'outre-mer.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion