Intervention de Jean-René Marsac

Réunion du 21 février 2017 à 18h30
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-René Marsac, rapporteur de la mission :

Merci beaucoup pour vos questions et vos éclairages. Je vais essayer d'être bref et si possible complet.

Par rapport à ce que dit Michel Destot, effectivement dans le rapport nous n'avons pas pris d'options ni sur les questions d'investissements, infrastructures et autres dispositifs de soutien des opérations plus immatérielles, ni en termes de thématiques, parce que je considérais que nous n'avions pas l'expertise immédiate pour le faire. Mais l'idée, plus généralement, et en particulier à travers cette proposition de contrat de développement solidaire négociée de pays à pays ou de pays aux régions concernées, c'est peut-être de mettre davantage de stratégie et de choix politique en face de la montée en puissance - ce qui est très bien - d'opérateurs techniques comme l'AFD ou Expertise France. On l'a vu au Burkina Faso, l'AFD intervenant à 18% dans le montage d'un projet d'infrastructure, on peut s'interroger sur la pertinence de cette intervention. Mais il est vrai qu'Expertise France ou l'AFD raisonnent, et c'est normal, sur la qualité d'un dossier, l'intérêt d'être ou pas présent dans tel ou tel dossier - c'est un choix relevant de la stratégie de l'opérateur. Je pense qu'il faut que cela s'adosse à une autre démarche stratégique avec un dialogue dans le cadre de ce contrat passé de pays à pays : qu'est-ce que le pays concerné souhaite d'une intervention prioritaire de la France, dans quel endroit, dans quel domaine, y compris l'arbitrage entre ce qui est fait dans le cadre multilatéral et le cadre bilatéral ? C'est vrai que le rapport ne prend pas une option directe, mais la question mérite d'être posée. Moi je fais le pari que c'est dans le cadre de ces négociations pour un contrat bilatéral de développement solidaire, à moyen et long terme, que ces questions trouvent leur réponse.

Sur la Grande-Bretagne, le Fonds européen de développement (FED) n'étant pas budgété, la Grande-Bretagne peut rester au FED. On peut souhaiter qu'elle y reste, pour continuer à mener des actions coordonnées.

Jacques Myard évoquait la question de l'orientation budgétaire qu'il approuve. Sur les ONG, là aussi, tout le monde nous a parlé depuis le début des auditions de la question de la coordination des acteurs. Quand on va dans les pays concernés, on nous parle de la dispersion des acteurs, d'ONG multiples. Dans le rapport, nous le disons : il ne faut pas freiner l'initiative, elle est tout à fait positive, il faut au contraire l'accompagner, y compris les opérations de petite dimension des collectivités locales et territoriales. Pur autant il faut qu'elles trouvent un cadre global. Donc plutôt que de coordonner par des rassemblements, des coordinations nouvelles, un système administratif, un système d'évaluation, on préfère mettre cette question de manière prospective dans une négociation qui soit aussi portée peut-être plus fortement par le bénéficiaire. Cela signifie impliquer plus fortement le pays bénéficiaire dans la définition de la stratégie, qu'il ne soit pas simplement le réceptacle, voire quelque fois le spectateur de ce qui se passe sur son territoire. Parfois, trop souvent, il est plus en position d'observation que d'acteur impliqué, donc je pense que la question des ONG, en référence à ce cadre négocié, peut permettre d'apporter une réponse.

Boinali Said posait une question sur la manière de faire en outre-mer en termes d'aide au développement : pour moi tout est ouvert. Simplement, ce qui nous est apparu fortement dans les auditions que nous avons eues, c'est qu'entre les ministères concernés il n'y a pas forcément un travail suffisant, même s'il y a un CICID qui a vocation à faire de l'interministériel de manière générale sur l'aide au développement. Entre le secrétariat d'État chargé du développement d'un côté, le secrétariat chargé des outre-mer de l'autre, il n'est pas certain qu'il y ait un travail approfondi au-delà du CICID pour définir un certain nombre de projets qui puissent porter sur l'eau, la santé, la pêche, etc. Il y a pleins de sujets qui peuvent être abordés de manière concordante dans les régions concernées. La forme que tout cela doit prendre reste à définir. L'AFD nous a avoué aussi que de leur côté, puisqu'ils interviennent également dans les DOM TOM parallèlement aux pays bénéficiaires de l'aide au développement, la coordination n'est pas complètement établie chez eux non plus. Donc à vous de faire des propositions à partir de cela.

Michel Destot, Chantal Guittet et d'autres ont relayé le débat sur le fonds SIDA, je n'ai pas à ce sujet une position complètement arrêtée, mais il s'agit d'un sujet récurrent. La France contribue plus que d'autres en moyenne, puisqu'elle est le deuxième contributeur dans ce dispositif, le sujet est venu à plusieurs reprises, donc je crois qu'il faut vraiment en débattre. La proposition que certains acteurs font est celle d'une réduction de notre contribution, pour y revenir peut-être sous une forme multilatérale. Il s'agit d'aller plus aujourd'hui vers la construction et la consolidation des systèmes de soin dans les pays concernés. Evidemment qu'il faut avoir des outils multilatéraux pour lutter contre les épidémies et les pandémies sur les graves crises sanitaires, évidemment que c'est dans le cadre multilatéral que cela peut se jouer. Pour autant, en termes de prévention, mais aussi en termes de suivi des malades, c'est par le biais d'un système de soin consolidé dans les pays concernés que cela peut se faire. Outre la question du bilatéral et du multilatéral, il y a la question de la meilleure stratégie pour atteindre les objectifs.

Jean-Marie Tetart, ceux qui seront dans la prochaine mandature pourrons suivre, ou pas, cette trajectoire des 5%, j'ai proposé ce chiffre parce que c'est celui avec lequel le gouvernement est entré dans le débat budgétaire cette année. On a atterri à 3,7. Je propose qu'on isole cette question des 5% concernant les lignes budgétaires, parce que c'est là-dessus que l'on peut intervenir de manière directe dans l'hémicycle.

Concernant la TTF, il y a une question à se poser sur le côté friable de l'assiette. On ne sait pas ce que sera l'avenir en termes de places financières, on ne sait pas ce que les pays proposeront, il ne faut pas que les oeufs soient mis dans le même panier. C'est pour cela que nous proposons d'autres démarches. Jacques Myard a souligné l'intérêt de la proposition sur le Livret de développement durable et solidaire. C'est la proposition que nous faisons à la suite de ce que Jean-Marie Le Guen a souligné lors de son audition sur l'idée de créer une ONG française qui prenne sa place dans le concert international. On a repris les choses sous un autre angle, en considérant qu'il s'agissait plutôt d'avoir une fondation qui permette de mobiliser des moyens nouveaux. Une ONG, par définition, c'est non gouvernemental, donc il y avait une contradiction.

Sur la question démographique que l'on a beaucoup évoquée avec nos interlocuteurs, en particulier au Burkina Faso, bien évidemment la question est relayée, mais l'on sait que la maîtrise de la natalité est un sujet lourd, compliqué, que les gouvernements aussi ont du mal à aborder. C'est aussi l'intérêt que l'on voit à une démarche concertée et contractuelle entre pays sur du moyen et long terme, c'est de pouvoir mettre en orientation stratégique un certain nombre de ces sujets qui vont demander du temps, pour se décliner en politiques locales qui permettent de changer la trajectoire.

Sur les dividendes de l'AFD, c'est un sujet qui a été abordé mais dans un contexte où l'orientation prioritaire était le renforcement des fonds propres, et cela reste encore une priorité au gré du renforcement des capacités d'adaptation de l'AFD. Mais on nous a rappelé dans quelques auditions que la justification de faire en sorte que l'AFD continue à intervenir dans les pays émergents, outre le fait qu'il y avait encore des questions de développement ciblées qui méritaient une intervention, c'était aussi de mutualiser une ressource pour aller plus fortement vers les pays non bénéficiaires d'aides suffisamment conséquentes, en particulier sous forme de dons, ce débat doit être ouvert.

Quel outil pour y parvenir ? Cela est peut-être à trouver dans le débat parlementaire puisque nous proposons qu'il y ait un débat structuré tous les trois ans. Dans la loi de 2014, nous avions inscrit le fait que le gouvernement fasse un rapport tous les deux ans, ce qui n'a au final pas été fait. Comme souvent lorsqu'on demande des rapports, tout le monde les oublie par la suite, soit par manque de temps pour les examiner ou alors après un examen quelque peu rapide. La proposition est donc de faire en sorte qu'il y ait une inscription – certes je ne sais pas vraiment sous quelle forme étant donné que je ne suis pas spécialiste de l'organisation des débats parlementaires – et des étapes beaucoup plus structurées dans l'hémicycle qui permettent de mettre ces objectifs sur la table.

Au sujet du Sahel, il existe plusieurs initiatives dont l'initiative de l'AFD sur la Facilité pour la lutte contre la vulnérabilité et la réponse aux crises. Un travail est donc en cours même si je ne sais pas si cela est satisfaisant ou pas.

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