Intervention de Charles de Courson

Réunion du 12 avril 2017 à 11h30
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCharles de Courson :

Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, vous avez globalement un mauvais bilan. D'après vos chiffres, entre 2011 et 2017, le déficit public est passé de 5,1 à 2,8 points de PIB, soit une différence de 2,3 points. Pour ma part, je pense que le déficit pour 2017 sera plutôt de 3,2 ou 3,3 %, mais, même si l'on s'en tient à vos chiffres, il faut se demander comment vous avez obtenu ce résultat. Tout simplement en faisant adopter une hausse massive des prélèvements obligatoires : ils sont passés de 42,6 points de PIB, en 2011, à 44,3 en 2017, soit 1,7 point de différence ! Et encore, présentez-vous des données nettes des crédits d'impôt. Si vous teniez compte de ces derniers, vous constateriez que quasiment 90 % de la réduction du déficit a pour origine la hausse massive des prélèvements obligatoires. Voilà la dure réalité ! Vos documents mettent en avant « des prélèvements obligatoires stabilisés » nets des crédits d'impôt, mais les prélèvements obligatoires augmentent si l'on tient compte des crédits d'impôt : ils passent de 44,4 à 45,6 % du PIB entre 2016 et 2017.

Je ne suis pas de ceux qui prétendent que vous n'auriez fait aucun effort en matière de finances publiques. Vous en avez fait, mais ils sont très insuffisants. Vos documents montrent par exemple que la part des dépenses publiques dans le PIB, hors crédits d'impôt, est passée de 55,1 à 54,3 %, soit une différence de seulement 0,8 point – et cette différence n'existe même plus si l'on intègre les crédits d'impôt. Autrement dit, pendant cinq ans, vous avez fait quelques efforts pour ralentir la hausse de la dépense publique, mais ils ont été très insuffisants.

Le Haut Conseil des finances publiques souligne que « l'évaluation d'un écart de production très important conduit à minorer l'effort à réaliser pour rééquilibrer les finances publiques ». Plutôt qu'un effort structurel de 0,5 point annuel, conforme aux voeux de la Commission européenne et non des traités, il faudrait atteindre les 0,8 ou 0,9 point, c'est-à-dire faire une économie de 16 à 17 milliards par an pour redresser nos finances publiques, soit près de 100 milliards d'euros en cinq ans. Vos efforts correspondent donc à peine à la moitié de ceux qui seraient nécessaires.

Que pensez-vous de l'avis très clair du Haut Conseil relatif à votre estimation de l'écart de production ? Tous les ans, depuis quatre ans, je m'inquiète de l'écart croissant que vous annoncez en vous signalant que vos chiffres ne peuvent pas correspondre à la réalité.

Nous ne redresserons nos finances publiques que si la compétitivité de l'entreprise France s'améliore. La faiblesse de la France en termes de compétitivité lui coûte en moyenne 0,4 point de taux de croissance annuel. En annonçant une croissance d'1,5 à 1,7 % du PIB, vous faites l'hypothèse d'une neutralité de la balance commerciale alors que, depuis cinq ans, cette dernière a toujours eu un effet négatif pour environ 0,4 ou 0,5 point, selon vos propres chiffres. Sur quels éléments cette hypothèse est-elle fondée ?

Vos documents présentent un histogramme intitulé : « Une dette maîtrisée ». Je fais partie des quelques députés qui regardent les comptes de l'État – il paraît que nous ne sommes que trois ou quatre. En lisant ceux de 2015, j'ai essayé de comprendre pourquoi la hausse de la dette ne correspondait pas du tout à l'augmentation du déficit. J'ai creusé cette affaire, et j'ai découvert le problème des primes d'émission. Dans les comptes publics de l'État, à la fin de 2015, il y en avait pour un peu plus de 50 milliards d'euros. D'après mes calculs, pour l'année 2016, il faudrait compter 25 milliards supplémentaires, et encore 15 à 20 milliards pour 2017. Faites l'addition : vous obtiendrez un montant de 90 à 95 milliards cumulés sur cinq ans ! On arrive presque à 100 milliards, soit quasiment 4 points de PIB.

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