Intervention de Pascale Crozon

Séance en hémicycle du 24 juillet 2012 à 21h30
Harcèlement sexuel — Après l'article 6, amendements 71 82

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPascale Crozon, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République :

Une telle disposition est nécessaire non seulement pour faciliter l'action indemnitaire exercée par les victimes de faits de harcèlement sexuel qui ne sont plus poursuivables pénalement, mais aussi pour éviter des situations qui ne manqueront pas d'être perçues comme des dysfonctionnements du service public de la justice, voire, plus largement, de l'État.

En effet, dans l'affaire qui a donné lieu à la QPC, ainsi que dans toutes les affaires où l'extinction de l'action publique sera constatée au stade de la cassation, il est probable qu'en l'absence d'une telle disposition, les conséquences seraient les suivantes.

La Cour de cassation cassera l'arrêt de condamnation et renverra le dossier à la cour d'appel, une cassation sans renvoi semblant exclue puisqu'il est nécessaire de permettre aux juges du fond de vérifier que les faits ne peuvent pas être poursuivis sous une autre qualification. Dans quelques mois, la cour d'appel constatera l'extinction de l'action publique et déboutera les parties civiles. Les parties civiles seront alors informées par le parquet, comme le leur aura demandé la ministre de la justice par circulaire, de la possibilité d'engager une procédure civile. On peut, d'ores et déjà, anticiper que de nombreux articles dans les journaux et médias feront sans doute état de l'incompréhension des victimes expliquant que la procédure a déjà duré plus de trois ans.

Quelques mois plus tard, il y aura sans doute décision civile de première instance condamnant l'auteur à des dommages et intérêts, mais un appel de la personne condamnée est à prévoir, de même que de nouveaux articles de presse expliquant le parcours du combattant des victimes. Viendra ensuite la décision civile en appel, puis, sans doute, un pourvoi en cassation.

Enfin, avec de tels délais, on ne peut pas exclure que ces victimes portent plainte devant la CEDH pour violation de leur droit à voir leur cause jugée dans un délai raisonnable, en application de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'Homme.

C'est pour éviter de tels feuilletons judiciaires et médiatiques, qui risquent de se dérouler dans quelques dizaines d'autres affaires, que l'adoption du présent amendement est souhaitable.

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