Intervention de Marc Goua

Séance en hémicycle du 13 février 2013 à 15h00
Séparation et régulation des activités bancaires — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarc Goua :

Madame la présidente, monsieur le ministre, chers collègues, l'objectif premier de ce texte est de tirer les conséquences de la crise de 2008 qui a fait peser sur l'économie mondiale un risque important dont nous subissons encore les séquelles.

Celle-ci a cruellement souligné les lacunes du cadre de régulation et de contrôle du système bancaire et financier international. Les outils à la disposition des autorités de supervision, quand ils existaient, n'étaient ni adaptés ni efficaces ni réactifs ni anticipateurs.

Après Bâle III qui vise à mettre en place un premier socle de renforcement des fonds propres et des règles prudentielles, il convient de compléter le dispositif pour éviter le renouvellement d'un choc financier dont l'ampleur et les répercussions ont mis l'économie mondiale en péril.

De nombreuses réflexions ont été lancées sur le sujet au niveau international.

Aux États-Unis, la règle Volker, en attente de décrets d'application, vise à interdire certaines activités risquées.

Au Royaume-Uni, la règle Vickers, qui ne sera applicable qu'en 2019, cloisonne les activités bancaires au sein d'un même établissement et sanctuarise la banque de dépôts.

L'Allemagne prépare une loi qui concernerait uniquement les banques dont la part des activités risquées dépasse 20 % du total de bilan et dont l'application est prévue en juillet 2015.

Enfin, et c'est certainement le plus important, une réforme est en cours au niveau européen suite au rapport Liikanen qui propose une voie de séparation visant à isoler les activités de marchés au sein des groupes bancaires.

C'est dans ce contexte que la France se mobilise sur le sujet, dans la droite ligne des engagements pris par François Hollande lors de la campagne présidentielle. Il convient de noter que notre pays sera le premier à fixer un cadre contraignant et une séparation des activités bancaires et financières : les décrets d'application seront publiés rapidement après son adoption ; le Gouvernement a refusé que son application soit reportée en 2017. Les banques auront jusqu'à 2015 pour se mettre en conformité.

Le coeur du projet de loi consiste donc à la séparation des activités bancaires spéculatives, les activités pour compte propre, des activités utiles à l'économie réelle.

Les activités pour compte propre seront cantonnées dans une filiale de la banque. Cette filialisation sans couverture de la maison mère garantira et préservera les dépôts des épargnants. De même, il sera interdit aux filiales cantonnées de mener certaines activités spéculatives à haut risque comme le trading à haute fréquence, ou encore d'être actionnaire de fonds spéculatifs du type hedge funds.

La crise de 2008 a souligné les lacunes des outils à la disposition des autorités de supervision pour le règlement d'une crise bancaire. Ainsi, l'Autorité de contrôle prudentiel rebaptisée Autorité de contrôle prudentiel et de résolution – ACPR – voit ses pouvoirs de surveillance et de sanctions renforcés. Elle pourra notamment révoquer des dirigeants, nommer des administrateurs provisoires et même aller jusqu'à interdire certaines activités si le plan de résolution de la banque est jugé défaillant.

Les dépôts des clients seront protégés des erreurs des banques. C'est dans ce cadre que le projet de loi transforme le Fonds de garantie des dépôts en un Fonds de garantie des dépôts et de résolution, financé par les banques elles-mêmes et dont la capacité d'intervention sera fortement renforcée.

Les travaux en commission et les échanges avec le Gouvernement ont permis d'enrichir le texte, notamment sur la question des paradis fiscaux. Les amendements adoptés en commission sous l'impulsion des groupes majoritaires permettent d'aller vers une meilleure transparence. Dorénavant, et nous y étions particulièrement sensibles, les établissements de crédit devront publier en annexe à leurs comptes annuels des informations sur leurs implantations et leurs activités dans chaque État ou territoire, pays par pays.

Le projet de loi ne propose pas de filialiser les activités de tenue de marché qui jouent un rôle souvent fondamental dans l'apport de liquidités à des clients, et qui, de façon générale, permettent d'assurer un bon fonctionnement des marchés au service des entreprises ou de l'État lorsqu'il émet des titres de dette. Mais ces activités doivent être sérieusement encadrées afin de ne pas dissimuler dans la société mère des activités spéculatives. Suite à l'adoption d'amendements de notre groupe, le ministre des finances aura la possibilité, s'il le juge utile, de limiter leur poids dans la maison mère de chaque banque par simple arrêté.

Enfin, le dernier objectif du texte, et non le moindre, vise à protéger les clients des banques. Sur cette question, je ne doute pas que nos travaux permettront de trouver un équilibre satisfaisant afin de protéger nos concitoyens, notamment les plus modestes, des frais bancaires abusifs.

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