Intervention de Jean-Paul Chanteguet

Séance en hémicycle du 25 juillet 2012 à 21h30
Recyclage sûr et écologiquement rationnel des navires — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Chanteguet :

Monsieur le président, madame la ministre déléguée, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous discutons aujourd'hui du projet de loi autorisant la ratification de la convention de Hong Kong pour le recyclage sûr et économiquement rationnel des navires. Le démantèlement a été abandonné au cours de la décennie 1980 par les nations occidentales pour se concentrer dans les pays où la main-d'oeuvre est la moins coûteuse, tant et si bien que le sous-continent indien – Inde, Pakistan et Bangladesh – concentre désormais 80 % du marché international.

Cette situation n'est pas satisfaisante. Elle se révèle même honteuse sur le plan humain, social et environnemental. En effet, elle méprise tout autant la sécurité des travailleurs sur les chantiers de démantèlement que la préservation minimale de l'environnement, en privilégiant des conditions rudimentaires parce que peu chères, au bénéfice d'armateurs plus soucieux de rentabilité que d'exemplarité. Dans un passé récent, la France a éprouvé l'immense embarras de se retrouver du côté de quelques détestables profiteurs lorsque le ministère de la défense tenta d'oublier le porte-avions Clemenceau sur le chantier indien d'Alang. Fort heureusement, la justice administrative a empêché la conclusion de cette opération déshonorante. Certes, on me rétorquera que cet exemple n'est pas pertinent, car le projet dont nous débattons concerne les navires civils et non les bâtiments militaires. Mais il a l'avantage de résonner encore dans la mémoire collective. Oui, il fallait mettre fin au hiatus qui subsistait dans la convention de Bâle et dans le règlement européen du 14 juin 2006, car on ne peut pleinement assimiler un navire en voie de démantèlement à un déchet. Il nous manquait une règle spécifique : la voici.

M. le rapporteur a déjà largement évoqué les détails techniques et juridiques. Je n'y reviendrai donc que fort brièvement. La France aura trois fois son mot à dire. Comme État recycleur, cela restera négligeable au vu de notre faible activité dans ce domaine. En revanche, quand notre pays sera l'État du pavillon ou l'État du port, il reviendra aux centres de sécurité des navires de procéder aux contrôles et aux inventaires adéquats. Nous avons acquis une expérience dans le domaine militaire qui ne demande qu'à trouver une valorisation économique dans le secteur civil. Par ailleurs, je note avec satisfaction que notre législation est déjà suffisamment stricte pour que nous n'ayons pas à la renforcer.

Mes chers collègues, si j'ai tenu à prendre la parole sur ce texte en qualité de président de la commission du développement durable, c'est pour affirmer la validité d'une démarche coopérative, conjointe, commune, entre les différents États de la planète. Certains, nous le savons, se gaussent encore ostensiblement lorsqu'on leur parle des enjeux du développement durable, de la lutte contre le changement climatique ou du nécessaire combat global contre la pollution.

Je sais aussi que, pour novatrice qu'elle soit, cette convention est vouée à entrer en vigueur dans un futur relativement lointain, soit deux ans après la ratification par quinze États représentant 40 % du tonnage mondial et recyclant 3 % de leurs flottes au cours de la décennie précédente. Quand on sait que la France sera la première à procéder à une ratification, on se dit que la traversée sera longue avant de toucher la terre promise !

Alors, pourquoi agir ? Parce que l'histoire nous apprend l'inertie du droit de la mer et la culture du consensus sur laquelle il repose, aussi bien que l'acceptabilité parfaite de ses normes une fois celles-ci régulièrement adoptées. Dans cette optique, il est important que l'Europe soit à l'avant-garde du monde, et la France à l'avant-garde de l'Europe. Il faudra encore convaincre pour généraliser cette convention à l'ensemble de la planète, et plus particulièrement aux États du sous-continent indien. Nous nous y emploierons avec d'autant plus d'ardeur.

C'est un signal fort que nous allons envoyer avec cette loi de ratification : celui de l'exemplarité. Je vous invite donc à l'approuver comme je vais le faire moi-même. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)

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