Intervention de Manuel Valls

Séance en hémicycle du 18 février 2013 à 16h00
Élection des conseillers départementaux des conseillers municipaux et des délégués communautaires et modification du calendrier électoral — Présentation commune

Manuel Valls, ministre de l'intérieur :

Ne dites pas de mal du Sénat, monsieur Sauvadet, car vous y arriverez peut-être un jour ! (Sourires.)

Pour l'élaboration de ce projet de loi, j'ai consulté, écouté. J'ai examiné attentivement, sans préjugé, tous les projets. Toutes les forces politiques disposant d'un groupe au Parlement ont été reçues au ministère de l'intérieur, ainsi que les grandes associations d'élus concernées.

Parmi les options – il faut en effet planter le décor –, j'ai écouté la présentation de projets visant à appliquer au niveau départemental un scrutin de liste calqué sur celui des élections régionales. La parité aurait évidemment été respectée, mais c'eût été renoncer à la proximité. J'ai également entendu ceux qui souhaitaient un scrutin dans un cadre infradépartemental, au niveau de l'arrondissement ou de l'intercommunalité. L'arrondissement – nous pouvons tous en convenir rapidement – est un échelon purement administratif, sans signification pour les citoyens. Il peut d'ailleurs être conduit à évoluer, tant aujourd'hui il ne correspond plus à la réalité de nos départements. Quant à l'intercommunalité, sa carte reste inachevée et elle doit, pour l'heure, demeurer un espace de projet, de compromis, de consensus ; elle ne pourrait devenir un espace de compétition politique.

Nos cantons actuels ne permettent plus d'organiser des élections réellement démocratiques : il faut le reconnaître. L'égalité devant le suffrage est un fondement, une condition nécessaire de la démocratie ; c'est aussi un principe constitutionnel auquel le législateur doit se conformer. Ce principe n'est pas une abstraction dégagée par la jurisprudence. L'article 3 de notre Constitution est là pour nous le rappeler : le suffrage doit être « universel » et « secret », bien sûr, mais aussi « égal ».

Je ne remets pas en cause la démocratie ou l'élection de tel ou tel conseiller général, bien évidemment, mais quelle égalité y a-t-il lorsque l'écart de population, lorsque le rapport entre le canton le plus peuplé et le canton le moins peuplé d'un même département, par exemple l'Hérault – j'ai puisé dans vos réflexions, monsieur le rapporteur – peut atteindre 1 pour 47 ? Certains électeurs vaudraient-ils 47 fois moins que d'autres ? L'égalité est-elle respectée dans les 88 départements où ce ratio dépasse 1 pour 5 ou encore dans les 18 départements où il est supérieur à 1 pour 20 ? Non ! Nous ne pouvons pas accepter de telles inégalités.

La représentation des territoires – nous en débattrons bien évidemment –, est une nécessité, notamment dans les départements à fort caractère rural, mais elle ne peut primer sur la représentation des électeurs. Les limites territoriales de trois-cinquièmes des cantons n'ont pas été modifiées depuis 1801. Nous sommes tous attachés à Bonaparte et au Consulat, mais reconnaissons que, sur un certain nombre de sujets, nous pouvons peut-être moderniser l'oeuvre de ce dernier. Ces cantons ne reflètent plus la France d'aujourd'hui, ses réalités démographiques, ses bassins de vie et d'activité.

Démocratiser le département, c'est d'abord lui redonner une représentativité. Il faut donc procéder à un redécoupage global de la carte cantonale. Pour cela, nous avons fait le choix d'une règle simple : l'écart entre la population d'un canton donné et la moyenne départementale ne pourra excéder 20 %. Cette règle est stricte, mais simple et lisible. Une règle est d'autant mieux comprise qu'elle s'applique largement : le chiffre de 20 % est déjà celui que retient le Conseil constitutionnel pour le découpage des circonscriptions législatives.

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