Intervention de Dominique Nachury

Séance en hémicycle du 12 mars 2013 à 15h00
Refondation de l'école de la république — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Nachury :

Débattre, proposer pour l'école est un temps important, un temps enthousiasmant. Ce doit être un temps de lucidité, de clarté et d'ambition.

Vous nous proposez, monsieur le ministre, une loi pour la refondation de l'école de la République. Je voudrais m'arrêter quelques instants sur le mot, choisi et répété, de « refondation ». Refonder, c'est fonder sur de nouveaux principes, de nouvelles bases. D'une part, ce mot est choquant en ce qu'il semble mettre un doute sur ce qu'est l'école aujourd'hui, sur ce qui s'y fait de bien et d'innovant, sur les acteurs engagés quotidiennement. D'autre part, nul ne peut contester la nécessaire continuité de l'école, son édification progressive : la loi Guizot pour l'enseignement des classes populaires, les lois Jules Ferry pour l'enseignement obligatoire, gratuit et laïc…

En revanche, adapter l'école à une société qui a changé et qui change : oui. Sur le fond, et parce que le temps limite l'exposé, je retiendrai quelques éléments organisés en trois points : ce que la loi fait disparaître de manière regrettable ; ce que la loi porte mais de façon bien trop générale et imprécise ; ce que la loi ne contient pas.

Tout d'abord, ce que la loi fait disparaître de manière, selon moi, regrettable. Vous supprimez le dispositif d'initiation aux métiers en alternance, qui avait pourtant le mérite de répondre à une vraie demande de diversification des parcours à partir de la classe de quatrième. De même, vous supprimez les cycles et l'aide personnalisée qui allaient dans le sens de la prise en compte individuelle de l'élève, de son évolution, de son rythme. La Cour des comptes, dans son rapport thématique sur l'Éducation nationale face à la réussite de tous les élèves, recommandait notamment d'adapter l'organisation scolaire aux besoins des élèves. Écrire que tout élève « en vaut » un autre, comme d'ailleurs tout enseignant en vaut un autre ou tout établissement en vaut un autre, affirme l'égalité mais crée l'inégalité.

Ensuite, ce que la loi porte mais de façon trop générale et imprécise. L'article 7 exprime le but de la scolarité obligatoire : « l'acquisition d'un socle commun de connaissances, de compétences et de culture, auquel contribuent l'ensemble des enseignements. La maîtrise du socle est indispensable pour accomplir avec succès la scolarité, poursuivre la formation, construire un avenir personnel et professionnel et se préparer à l'exercice de la citoyenneté. » Cette disposition semble contenir l'engagement essentiel de l'école mais commence par : « garantir au moins les moyens ». C'est un peu faible et un peu flou. Si l'on ne peut garantir avec obligation de résultat, il serait au moins nécessaire de lier moyens et évaluation de leur mise en oeuvre.

L'article 5 généralise quant à lui la possibilité d'accueil en maternelle des enfants de moins de trois ans. Il est certes fait référence aux conditions particulières et adaptées à cette scolarisation précoce, mais il me semble indispensable de régler l'articulation entre l'accueil du jeune enfant et l'école maternelle. La maternelle doit rester une école, mais les cloisons ne peuvent plus être étanches entre deux mondes, deux organisations, deux modèles professionnels. Et l'un des grands freins au développement des structures de transition est la question de la prise en charge financière.

Enfin, ce que la loi ne contient pas. Aucune évocation dans ce texte de l'évolution du métier d'enseignant, de l'évolution des métiers de l'enseignement. On parle des écoles supérieures du professorat et de l'éducation, de l'adaptation au numérique, mais on ne dit rien de cette profonde mutation. Le métier d'enseigner a changé ; le bon cours ne suffit plus, il faut aider les élèves à réussir. Le métier d'enseigner change sur sa durée de trente-cinq ans : il faut donc de la formation continue, de l'évaluation, de l'accompagnement des enseignants.

Cette loi affirme l'importance du primaire mais, sur le statut de l'école primaire, sur celui du directeur d'école, sur l'articulation locale entre les différents acteurs, dont les collectivités territoriales, sur l'évolution vers un pilotage local, garantie de l'adaptation aux besoins : rien ou peu de chose.

Pour toutes ces raisons, je voterai contre ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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