Intervention de Sergio Coronado

Séance en hémicycle du 19 mars 2013 à 21h30
Débat sur le rapport d'information sur les moyens de lutte contre la surpopulation carcérale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSergio Coronado :

…et vous avez eu raison de les dénoncer, madame la garde des sceaux. Je regrette qu'en ce qui concerne l'affaire du palais de justice de Paris, vous n'ayez pas eu le pouvoir de conviction nécessaire pour être totalement suivie.

Le montant des autorisations d'engagement qui restent à couvrir par des crédits de paiement est de 5,446 milliards d'euros. Le contribuable français va payer pendant des années les cadeaux faits à Bouygues et Vinci par l'ancienne majorité.

Ces programmes n'ont jamais réglé le problème de la surpopulation carcérale. Ils en ont au contraire entretenu l'illusion en augmentant indéfiniment le nombre de places en prison. En 1982, il y avait 31 551 détenus. Depuis, à chaque décennie, nous gagnons environ 10 000 détenus, pour arriver au 1er février 2013 à plus de 77 000 personnes sous écrou, 66 746 personnes détenues et plus de 12 000 détenus en surnombre.

Cette hausse suit celle de l'augmentation du parc pénitentiaire. Depuis trente ans, si la justice a gagné en sévérité, je ne suis pas sûr qu'elle ait gagné en efficacité avec des peines de plus en plus longues, et des incarcérations de plus en plus nombreuses pour de petits délits.

La hausse du parc pénitentiaire explique aussi en partie la stagnation des mesures d'aménagement de peine ou d'alternatives à la prison comme le travail d'intérêt général ou la libération conditionnelle.

On ne sortira pas de la surpopulation carcérale en construisant sans cesse de nouvelles prisons à remplir. Toutes les études montrent en effet que, notamment pour les courtes peines, les alternatives à l'incarcération sont souvent plus efficaces pour lutter contre la récidive, car ces peines sont plus individualisées et permettent un meilleur suivi des détenus.

Deux des principales causes de l'inflation carcérale sont connues : les peines planchers et la comparution immédiate. Faire le choix d'une politique pénale responsable, c'est refuser les peines planchers. La loi sur les peines planchers avait été mise en place, officiellement, pour lutter contre la récidive criminelle.

Dans les faits, elle n'a touché que les délits, en particulier les délits mineurs, les peines en cours d'assises étant souvent largement supérieures aux minima prévus, même pour les primo-délinquants. L'aggravation la plus importante parmi les peines prononcées concerne les vols, les dégradations et les infractions à la législation sur le séjour.

Comme l'a noté le magistrat Jean-Paul Jean, le niveau de peines y est six fois plus élevé après la loi qu'avant. Ont été particulièrement concernés les toxicomanes, les alcooliques, les personnes atteintes de troubles psychiatriques, les personnes sans qualification, en échec scolaire ou en rupture familiale. Si l'on voulait parler de justice de classe, on ne trouverait pas de meilleur exemple.

Faire le choix d'une politique pénale responsable, c'est aussi lutter contre la justice d'abattage que représentent les comparutions immédiates.

La Ligue des droits de l'homme a mené une étude à Toulouse qui démontre le lien étroit entre la durée d'audience et la condamnation à une peine de prison. Cette justice d'abattage, intransigeante avec les petits délits, a abouti à des drames humains qui ont parfois fait la une de nos quotidiens.

Il y a trente ans, on ne voyait pas tant de personnes en prison pour des délits mineurs ; on ne voyait pas tant d'incarcération pour des défauts de permis ; on ne voyait pas de perpétuité réelle ; on ne voyait pas non plus autant de malades psychiatriques.

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