Intervention de Jean-Marc Germain

Séance en hémicycle du 8 avril 2013 à 9h30
Sécurisation de l'emploi — Article 13, amendement 2080

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Marc Germain, rapporteur de la commission des affaires sociales :

Avant de répondre à vos questions sur ce point important, je vous recommande, si vous souhaitez savoir ce que voulait le MEDEF, de vous reporter au document mis sur la table le 14 octobre dernier. Vous constaterez que le texte en discussion aujourd'hui n'a plus rien à voir, car sont intervenus entre-temps la négociation et le travail du ministre.

Ce que souhaitait le MEDEF était simple. Il voulait que le licenciement fasse l'objet d'un accord de l'administration, interdisant en échange tout recours, et qu'un bloc de compétence administratif empêche les contentieux individuels devant les prud'hommes et la juridiction judiciaire. Or il n'y a rien de tout cela dans le texte. L'employeur avait auparavant face à lui un seul juge, qui jugeait à la fois de la procédure collective et individuelle ; aujourd'hui, il en a deux.

Dans les milieux patronaux, certains ont peut-être fait le pari que le juge administratif serait plus clément que ne l'était le juge judiciaire. En réalité, comme l'ont confirmé nos auditions de membres du Conseil d'État et de la chambre sociale de la Cour de cassation, les deux juridictions se coordonnent pour la raison très simple qu'ils ont à statuer sur les mêmes plans sociaux, puisque le juge administratif est aujourd'hui le juge des salariés protégés, les syndicalistes, dont le licenciement est soumis à une autorisation administrative délivrée par l'inspection du travail. Ils se coordonnent donc pour parvenir à une évaluation commune du motif économique et des compensations prévues pour les salariés.

J'ai d'ailleurs posé directement la question au président de la chambre sociale de la Cour de cassation, outrepassant peut-être, ce faisant, mon rôle de rapporteur. Pensez-vous, lui ai-je demandé, que le juge administratif sera plus clément que vous ? Il a clairement répondu non, et les jugements prononcés sur les salariés protégés montrent bien que ce n'est pas le cas.

On a donc deux juges qui d'ores et déjà se coordonnent, auquel il faut en ajouter un troisième, dans la mesure où, si le chef d'entreprise fait preuve de mauvaise volonté pour communiquer à l'administration les documents d'information destinés aux salariés, le juge pénal sera saisi du délit d'entrave. Ce n'est pas systématique, comme le disait M. Taugourdeau, mais cela se produit parfois.

Vous avez enfin demandé pourquoi l'administration intervenait dans le cadre d'un accord d'entreprise, signé entre personnes morales de droit privé. C'est un des apports essentiels du ministre sur un point que la négociation n'avait pas traité et qui renvoie à la logique des deux voies parallèles : celle de l'accord majoritaire des partenaires sociaux – qui comprend un droit de veto, dont le groupe GDR ne cesse de faire la promotion – et celle de l'accord de l'administration.

Il est très important pour les salariés que ces deux procédures soient gérées de la même façon, notamment dans les cas où, la négociation ayant échoué, on bascule vers la procédure d'homologation. En effet, lorsque les procédures sont parallèles du premier au dernier jour, le pouvoir qu'on donne à l'administration pour peser sur les reclassements internes renforce le pouvoir de négociation des salariés dans l'entreprise.

Je suis donc très attaché à ce régime et émets un avis défavorable sur vos amendements.

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