Intervention de Jérôme Guedj

Séance en hémicycle du 8 avril 2013 à 15h00
Sécurisation de l'emploi — Article 16

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJérôme Guedj :

J'ai pris soin, tout au long des soixante-quatre heures de ce débat, d'intervenir sur les différents articles avec bonne foi. Appréhendant article par article les dispositions qui nous sont soumises, j'ai constaté honnêtement – ce fut parfois l'objet d'un débat avec nos collègues du groupe GDR – que ce texte comportait des avancées, qui, si elles peuvent être considérées insuffisantes, sont aussi – je reprends une expression que j'ai souvent employée – « un pied mis dans la porte » avant d'aller plus loin.

C'est donc avec la même franchise que je dirai que cet article 16 suscite de très vives inquiétudes. C'est la seule véritable régression de ce texte, qui revient sur un droit acquis. Le délai de prescription était, hier, de trente ans. Depuis 2008, il est de cinq ans. À l'époque, dans les rangs socialistes, nous disions qu'il fallait peut-être conserver, en matière de droit du travail, un délai de dix ans. Comment donc aujourd'hui accepter une telle réduction quand on est attaché au fonctionnement des instances prud'homales et à la défense des salariés lors de la rupture du contrat de travail, à la suite de laquelle ont lieu 90 % des saisines de ces instances ? Il s'agit alors d'obtenir le versement d'un salaire dû mais non versé, le paiement d'heures supplémentaires qui n'auraient pas été comptabilisées, de saisir le juge à propos de pauses ou d'autres avantages dont le salarié aurait été privé. Bref, il s'agit de reconstituer les droits pleins et entiers du salarié, y compris en termes de cotisations sociales.

Réduire à deux ans le délai de prescription, c'est pour le moins atypique, pour le moins inédit. Un propriétaire peut, pendant cinq ans, réclamer à un locataire les loyers impayés. En revanche, pour des salariés, le délai de prescription serait réduit à deux ans !

On le sait, cet article est la contrepartie de l'accord, dans cette logique du donnant-donnant qui fonde l'équilibre général du texte.

Cependant, j'espère que certains des amendements déposés permettront de vider cette disposition de sa substance. Je le dis de manière parfaitement sincère et en conscience : je ne peux accepter ce qu'apporte ce article.

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