Intervention de Pierre Morel-A-L'Huissier

Séance en hémicycle du 11 avril 2013 à 21h45
Modernisation du régime des sections de commune — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre Morel-A-L'Huissier, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République :

Par ailleurs, les règles organisant la répartition des charges financières entre les budgets sectionaux et communaux sont peu opérantes en pratique : le principe est posé de l'interdiction pour la commune de financer ses dépenses sur le budget de la section de commune, à une exception près, à savoir le cas où des travaux d'investissement ou des opérations d'entretien relevant de la compétence de la commune sont réalisés au bénéfice non exclusif des membres ou des biens d'une section.

En pratique, il arrive que le juge admette que certaines dépenses, qui seraient à la fois d'intérêt communal et sectional, soient en partie financées avec des fonds sectionaux dès lors que les charges de financement sont réparties entre la commune et la section au prorata du nombre de leurs habitants respectifs.

Enfin, s'il existe des régimes permettant le transfert de biens de la section de commune à la commune, ils sont caractérisés par leur relative inefficacité.

Coexistent trois régimes en la matière : un premier, par demande conjointe entre le conseil municipal et la commission syndicale ; un deuxième, si cette dernière n'a pas été constituée ; un troisième, s'il existe une forme de présomption d'absence d'activité réelle de la section ou d'un désintérêt de ses ayants droit.

C'est la raison pour laquelle la présente proposition de loi procède à une révision équilibrée des règles applicables aux sections de commune.

Si l'enrichissement progressif du texte par la commission des lois du Sénat, puis par les sénateurs en séance publique, n'a pas toujours facilité sa lecture, il n'en poursuit pas moins trois objectifs.

Le premier objectif, prévu par la proposition de loi initiale, consiste à faciliter le transfert des biens sectionaux aux communes.

Il est, d'une part, proposé d'assouplir les critères permettant de juger que la section n'a plus d'existence réelle : quand moins de la moitié des électeurs se sont déplacés ou quand les impôts dus par la section n'ont pas été payés depuis plus de trois ans.

Il est, d'autre part, prévu d'instaurer la possibilité de demander le transfert dans un objectif d'intérêt général. Le conseil municipal en sera à l'initiative, le préfet prononçant ensuite ce transfert par arrêté motivé. Un mécanisme d'indemnisation des ayants droit est prévu.

Deuxièmement, l'organisation d'un recensement exhaustif des sections de commune, demandée par les auteurs de la proposition de loi, a été écartée par la commission des lois du Sénat, au motif que l'ampleur de la tâche ne devait pas reporter encore d'autant la modernisation du statut des sections.

Troisièmement, le Sénat, en enrichissant considérablement le texte initial, y a ajouté trois autres aspects.

Tout d'abord, sa commission des lois a précisé les éléments de définition et de gestion des sections. Ainsi que l'ont montré les échanges lors de la séance publique du 15 octobre 2012 au Sénat, « toutes les sections ne sont pas problématiques », selon l'expression utilisée par M. Jacques Mézard. Dès lors, poursuivait celui-ci, il convient non seulement de faciliter la suppression de celles qui ne fonctionnent que peu ou plus, en assouplissant le régime des transferts de biens, mais aussi de « faciliter et de rationaliser le fonctionnement des sections » quand elles ont une existence réelle et un fonctionnement quotidien. La commission des lois du Sénat a donc précisé que la section de commune était une personne morale « de droit public » et interdit la constitution à l'avenir de nouvelles sections.

Ensuite, afin de clarifier le droit, elle a défini et unifié les notions de membre de la section de commune, d'ayant droit et d'électeur de la commission syndicale, en mettant en place deux catégories aisément identifiables : d'une part, les membres, qui sont les habitants ayant « leur domicile réel et fixe » sur le territoire de la section de commune – en supprimant toute notion d'ayants droit pouvant arguer de droits anciens dans la section sans y résider ; d'autre part, les électeurs, qui sont les membres de la section inscrits sur les listes électorales de la commune. Elle a aussi donné pouvoir à la municipalité, en l'absence de commission syndicale, pour représenter la section de commune en justice, sauf dans l'hypothèse où les intérêts respectifs de la commune et de la section seraient opposés, auquel cas une commission ad hoc représenterait alors celle-ci.

Puis, à l'initiative de M. Pierre Jarlier, elle a clarifié le régime d'attribution des baux et contrats d'exploitation des terres de la section et acté que le conseil municipal déciderait à l'avenir de l'adhésion d'une section de commune à une structure de regroupement de gestion forestière.

Enfin, elle a entrepris de clarifier le régime financier de la section.

Votre commission des lois a entrepris de compléter ce travail, sans en modifier ni l'esprit ni les principales dispositions.

À l'initiative de votre rapporteur, elle a apporté un certain nombre de précisions ou d'améliorations concernant aussi bien le statut juridique des sections que leur gestion quotidienne et leurs finances.

En ce qui concerne le statut juridique des sections de commune, la commission des lois a introduit un dispositif permettant à une section possédant des biens indivis avec d'autres sections de mettre fin à cette indivision.

En ce qui concerne la gestion des sections, la commission des lois a clarifié les compétences exclusives reconnues au conseil municipal et systématisé la consultation de la commission syndicale.

En ce qui concerne les finances des sections, elle a regroupé au sein du chapitre dédié correspondant toutes les dispositions relatives aux revenus des sections.

Enfin, afin de favoriser l'acceptabilité des régimes de transfert des biens de section au profit des communes, la commission des lois a systématisé, dans tous les régimes permettant au préfet d'autoriser le transfert des biens de section, l'information des membres et du public. À l'initiative de M. Alain Calmette, elle a prévu que le transfert, demandé par la commune pour mettre en oeuvre un objectif d'intérêt général, d'un terrain agricole ou pastoral devrait faire l'objet d'une consultation de la chambre d'agriculture, afin qu'elle puisse rendre un avis sur l'utilisation projetée de cet espace.

Mesdames et messieurs, le travail que le Sénat a entrepris, sur proposition du groupe RDSE – auquel vous avez appartenu, madame la ministre –, a abouti à un vote non partisan, transcourant, avec l'intervention de dix sénateurs sur treize amendements.

Je note tout particulièrement les propos du sénateur de la Lozère, Alain Bertand, qui concluait en affirmant qu'il s'agissait d'une bonne proposition de loi, plus conforme au droit général, mettant fin à certains passe-droits qui n'étaient pas compatibles avec notre République.

En tant que rapporteur je vous propose tout naturellement de poursuivre ce travail. Afin de compléter, d'enrichir, voire de justifier l'initiative prise par le Sénat, je me suis astreint à entendre tous les protagonistes : Jacques Mézard, auteur de la proposition de loi, Pierre-Yves Collombat, rapporteur, Pierre Jarlier, l'AMF, l'Association des maires ruraux de France, la direction générale des collectivités locales, la Fédération nationale des communes forestières, l'ONF, la Fédération nationale des sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural, Jean-Pierre Lemoine, inspecteur général,…

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